La grippe a beaucoup tué l’an passé : tout savoir pour s’en prémunir cette année<!-- --> | Atlantico.fr
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Les cas de grippe ont été dus principalement à une souche de virus B Victoria qui n’était pas ciblé par le vaccin de l’an dernier. L’effet protecteur de la vaccination a de ce fait été moins puissant.
Les cas de grippe ont été dus principalement à une souche de virus B Victoria qui n’était pas ciblé par le vaccin de l’an dernier. L’effet protecteur de la vaccination a de ce fait été moins puissant.
©Reuters

A vos écharpes

L'année 2015 a été marquée par une hausse de la mortalité en France (+6,1%) par rapport à 2014. C'est le fait d'une épidémie de grippe particulièrement virulente de janvier à mars. La sous-vaccination des français et les erreurs de communication de la part des autorités sont malheureusement à mettre en cause.

Stéphane Gayet

Stéphane Gayet

Stéphane Gayet est médecin des hôpitaux au CHU (Hôpitaux universitaires) de Strasbourg, chargé d'enseignement à l'Université de Strasbourg et conférencier.

 

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Atlantico : Selon les derniers chiffres publiés par l'Insee (voir ici), l'année 2015 a été marquée par une forte hausse de décès en France par rapport à l'année 2014 (+6,1%), notamment à cause d'une épidémie de grippe importante survenue entre janvier et mars 2015. A quel point ces chiffres sont-ils préoccupants/à prendre au sérieux selon vous ? Quels sont les meilleurs moyens de se prémunir d'une épidémie de grippe cet hiver et quels sont les meilleurs traitements si on tombe malade malgré tout ? 

Stéphane Gayet : La grippe est une maladie virale très contagieuse et potentiellement grave. Chaque année, des milliers de personnes meurent de la grippe en France ; il s’agit essentiellement de personnes âgées et autres sujets fragilisés par une maladie chronique. Lors de la saison froide 2015-2016, l’épidémie de grippe a été tardive et s’est prolongée. Les cas de grippe ont été dus principalement à une souche de virus B Victoria qui n’était pas ciblé par le vaccin de l’an dernier. L’effet protecteur de la vaccination a de ce fait été moins puissant. On a constaté un nombre plus élevé d’enfants atteints que les années précédentes.

On ne le répétera jamais assez, la grippe (la « vraie ») est une maladie qui peut être très grave et dont il est difficile de se prémunir uniquement par des règles d’hygiène, tant sa contagiosité est forte. Les transports en commun, les salles d’attente, les magasins et lieux de travail sont assurément des sites à haut risque de contamination par les virus respiratoires en général et le virus grippal en particulier.

Mais bien sûr les règles d’hygiène restent très utiles : se décontaminer les mains avant de les porter à sa bouche ou de toucher quelque chose qui va aller au contact de sa bouche. Il y a le lavage des mains et la friction hydro-alcoolique désinfectante. Il faut se tenir à distance de toute personne qui tousse (au moins un mètre cinquante) et de tout individu se déclarant « grippé » ou « malade ».

Pour se protéger de la grippe, le vaccin reste ce qui se fait de mieux aujourd’hui. Sa tolérance est bonne et son efficacité de l’ordre de 60 à 90 % (il varie selon les souches virales en circulation et l’état immunitaire des personnes cibles). Quoiqu’on en dise, quoiqu’on en pense, c’est un très bon vaccin. La mauvaise image dont il souffre, surtout en France, est lié à des idées reçues bien entretenues et à des erreurs de communication de la part des autorités de santé, essentiellement lors de la menace de grippe pandémique A H1N1 en 2009. La polémique au sujet de la toxicité de certains adjuvants de l’immunité est très fortement exagérée ; le rapport bénéfices sur risques de ce vaccin est excellent. Mais aucun vaccin n’est à l’abri d’effets secondaires graves, heureusement fort rares.

Si l’on contracte une infection respiratoire aiguë présumée grippale, on peut, si on est un sujet à risque de grippe sévère, se faire prescrire sans délai (dans les heures qui suivent les premiers signes) un antiviral antigrippe. Il n’est efficace qu’au tout début de la maladie. Après 48 heures, c’est déjà bien tard pour attendre une quelconque efficacité.

Lorsque l’on présente une infection respiratoire aiguë présumée grippale et que le délai est dépassé (24 à 48 heures) pour la prise d’un antiviral antigrippal, il est important de rester au repos à domicile. On est dans de meilleures conditions pour guérir et on évite ainsi de contaminer les collègues de travail et les personnes des transports en commun. Il faut boire beaucoup et de préférence de l’eau bien minéralisée, prendre du paracétamol ou de l’aspirine pour soulager les maux de tête et diminuer la fièvre. L’alimentation doit privilégier les aliments bien chauds et les boissons chaudes (potages, infusions…). Le classique grog (rhum, miel, jus de citron et eau très chaude) réchauffe bien le corps et a un effet tonifiant. La vitamine C est toujours utile, mais il ne faut pas en attendre un effet souverain. La grippe guérit seule et en quatre à cinq jours chez la plupart des personnes. Si une surinfection bactérienne survient (expectoration purulente ou mouchage purulent), un traitement antibiotique est en principe nécessaire pour éviter une évolution traînante et affaiblissante.

Comment expliquer que l'épidémie de grippe de l'année 2015 ait été aussi importante et meurtrière en France ? L'Hexagone est-il particulièrement mal armé face aux épidémies de grippe ? Si oui, pourquoi ? 

D’une part, la souche virale prépondérante (virus grippal de type B souche Victoria) n’était pas ciblée par le vaccin, d’autre part le caractère tardif de l’épidémie par rapport aux années précédentes a contribué à décontenancer les personnes concernées : on s’est dit que le cap était franchi, alors que l’épidémie allait commencer. D’une façon générale, les Français ne sont pas favorables aux vaccins. La France est l’un des pays à haut niveau de vie où l’adhésion à la vaccination en général est la plus mauvaise. Il y a eu des erreurs de communication très préjudiciables (vaccin contre l’hépatite B, vaccin contre la grippe pandémique) et les associations et réseaux d’influence anti-vaccins sont efficaces. Le militantisme anti-vaccination est très actif dans l’hexagone. C’est plus qu’une méfiance, c’est une véritable défiance vis-à-vis des vaccins. On leur attribue tous les maux ou presque. Des accidents existent et existeront toujours, mais ce sont des médicaments aujourd’hui très sûrs. Il est curieux d’observer que les Français boudent les vaccins mais se gavent de tranquillisants (benzodiazépines) dont les effets secondaires sont loin d’être négligeables.

Par ailleurs, le peuple français n’est pas très performant dans le domaine de l’hygiène, c’est-à-dire la prévention de la contamination. Ce sont les règles élémentaires que nous avons vues plus haut. Il faut encore ajouter le fait de se gargariser la gorge après un contact potentiellement contaminant, en utilisant un antiseptique comme de la BETADINE ORL verte ou de l’ELUDRIL. Ce gargarisme doit être effectué au plus vite et répété. Il réduit le risque de développer une infection après un contact contaminant.

Si l’on compare les Français aux Japonais, aux Allemands et aux Scandinaves en général, les premiers n’ont pas la culture de l’hygiène, qui n’est pas la propreté : on peut être très propre et avoir une mauvaise hygiène (la confusion est fréquente dans les esprits).

Quelles sont les catégories de population les plus susceptibles d'être contaminées lors d'une épidémie de grippe en France ? Lesquelles courent plus particulièrement un risque mortel ?

Il est essentiel, cette année comme les autres, de vacciner les personnes fragiles. Il s’agit, d’une part, des personnes âgées de 65 ans et plus, d’autre part, des individus, y compris les enfants à partir de l’âge de 6 mois et les femmes enceintes, atteints d’une maladie chronique assez invalidante, dont voici une liste très résumée : affection broncho-pulmonaire évoluée, insuffisance cardiaque grave, maladie rénale sévère, atteinte neurologique lourde, drépanocytose, diabète de type 1 ou de type 2, déficit immunitaire primitif ou acquis.

Sont également concernées les personnes séjournant dans un établissement de soins de suite ainsi que dans un établissement médico-social d’hébergement, et cela, quel que soit leur âge. Ce vaccin s’adresse aussi à l’entourage familial des nourrissons de moins de 6 mois prématurés, atteints de broncho-dysplasie, de cardiopathie congénitale ou de déficit immunitaire congénital.

En milieu professionnel, cette vaccination est également recommandée aux personnes qui sont susceptibles de disséminer le virus : les professionnels de santé et tout professionnel en contact régulier et prolongé avec des personnes à risque de grippe sévère, personnes âgées et autres.

Il convient donc d’insister sur le fait que, en dépit des rumeurs et autres idées reçues qui circulent autant, voire plus que les virus, la vaccination antigrippale reste bien tolérée et de bonne efficacité : elle ne rend certainement pas plus malade que la grippe qui, à l’opposé, tue chaque année un très grand nombre de personnes diminuées et fragiles, en tout premier lieu des personnes âgées mais aussi des enfants fragiles.

Quels symptômes doivent nous alerter sur la contraction d'un éventuelle grippe ?

Les premiers signes et symptômes de la grippe sont une sensation subite d’affaiblissement général. On a mal à la gorge, on ressent des douleurs musculaires et des courbatures diffuses. Le mal de tête est lui aussi presque constant au cours de la grippe. Puis des frissons apparaissent et l’on se met à tousser. La toux est intense, sèche, pénible et bien sûr contagieuse pour les autres. En général, s’il s’agit d’une grippe authentique, les frissons alternent avec des sueurs abondantes. La fièvre est également constante, supérieure à 38°5 C le plus souvent. La fatigue intense et durable est un signe qui ne manque pas dans une infection bien marquée due au virus grippal.

Il est fréquent que le tout premier signe soit un mal de gorge associé à une sensation de malaise général, de faiblesse subite, rapidement suivis de frissons et de mal de tête. Dès que la toux survient, elle évoque nettement la grippe, mais il est déjà tard pour réagir. Il importe donc de prendre en compte les tous premiers signes (fatigue brutale, malaise, affaiblissement, mal de gorge, mal de tête et frissons).

Propos recueillis par Thomas Gorriz

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