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L’Espagne sort de la récession : les leçons à en tirer
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Au sortir de neuf mois de récession, l'Espagne affiche une croissance de 0,1 %. La réduction des coûts salariaux, douloureuse dans un premier temps, ainsi qu'une politique modérée de réduction des déficits ont contribué à cette amélioration.

Thibaut Mercier

Thibaut Mercier

Thibaut Mercier est économiste chez BNP Paribas, spécialiste des pays périphériques de la zone euro : Irlande, Portugal, Grèce et Espagne.

 

 

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Atlantico : Après 9 douloureux trimestres de récession, l'Espagne affiche une croissance à 0.1 % pour le troisième trimestre 2013 et un chômage en recul pour la deuxième fois de l'année. Ces bonnes nouvelles, annoncées par plusieurs économistes, peuvent-elles offrir des enseignements au reste de la zone euro ?

Thibault Mercier : Dans cette reprise qui s’amorce, il faut préciser que l’on trouve en premier lieu des explications purement cycliques. Le PIB ayant effectivement baissé pendant 9 trimestre d’affilée (le niveau d’activité dans l’industrie y est équivalent à celui de la fin des années 1980…), il faut s’attendre à voir un rebond mécanique, notamment grâce la reconstitution du stock des entreprises. Autrement dit, il s’agit d’un faible sursaut partant d’un niveau qui s’est considérablement abaissé sur les dernières années. Il s’agit là de la partie « technique » de cette reprise et il n’y a logiquement que peu d’enseignements à tirer sur ce point.

Ensuite, on peut noter qu’une partie de cette reprise naissante est due à la bonne santé des exportations qui sont en forte  croissance depuis trois ans. Cela s’explique par des gains de compétitivité importants réalisés notamment grâce aux réformes menées par le gouvernement. La réduction des coûts salariaux pour les entreprises a permis de faire baisser l’inflation en deçà du niveau moyen en zone euro.  Les réformes de flexibilisation du marché du travail, en dépit d’un coût initial important sur l’emploi, finissent par porter leurs fruits après quelques années.

Enfin, les objectifs de réductions de déficit à 3% du PIB imposés par la Commission européenne ayant été reportés à 2016, le gouvernement espagnol a pu assouplir une politique d’austérité qui pesait jusqu’ici beaucoup sur la demande intérieure. Même si la pression sur la demande intérieure n’a pas disparu, elle est donc moins pesante qu’auparavant. Une politique modérée de réduction des déficits permet de ne pas étouffer la croissance.

Plusieurs mesures de dévaluation interne, dont la baisse du salaire des fonctionnaires, ont été utilisées pour sortir le pays de l'ornière. Ce modèle peut-il être appliqué de manière plus large aux autres économies européennes en difficulté ?

C’est déjà le cas, en particulier chez les économies en difficulté comme le Portugal, la Grèce ou encore l’Irlande, qui ont largement utilisé cet outil pour pallier l’absence de possibilités de dévaluation monétaire. Cela passe effectivement par le gel, voire la baisse du salaire des fonctionnaires, mais aussi par un corpus de réformes qui permettent une meilleure réactivité des salaires à la conjoncture (ici la hausse du chômage) et provoquent une pression baissière sur les salaires.

De nombreuses annonces optimistes ont déjà été faites par le passé sur le cas espagnol. Est-on encore une fois trop enthousiaste ?

Après la première reprise espagnole au lendemain de la crise de 2009, plusieurs annonces optimistes avaient été faites. C’était sans compter que la bulle immobilière était alors loin d’être corrigée. Dans le même temps la compétitivité était faible et l’état des finances publiques annonçait tout un volet de mesures d’austérité qui allaient logiquement mettre un coup d’arrêt à la croissance.

Aujourd’hui, la bulle immobilière a été en grande partie absorbée (bien qu’une correction des prix du marché soit encore nécessaire) et les finances publiques sont en cours d’assainissement. De plus l’état de la compétitivité espagnole est actuellement bien meilleur qu’en 2010, ce qui laisse entendre que ce début de reprise possède des bases bien plus solides que la précédente. On peut néanmoins s’attendre à un rebond assez lent, et ce pour plusieurs raisons :

- La consolidation budgétaire, bien que largement enclenchée, est toujours nécessaire pour atteindre en 2016 l’objectif de déficit public de 3% de PIB fixé par la Commission Européenne. Les  budgets à venir auront forcément un coût en termes d’activité.

- Ensuite, les banques espagnoles ayant subi l’éclatement de la bulle immobilière et la montée du chômage, elles ont accumulé un stock important de mauvaises créances qui plombent l’octroi de crédit. Tant que les banques seront dans un processus d’assainissement des bilans, elles ne pourront pas appuyer suffisamment l’investissement, et donc la croissance

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