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Julien Dray : Luc Ferry a porté "un coup terrible à la démocratie et à la politique"
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Affaire Luc Ferry

Les propos de Luc Ferry sur "un ancien ministre qui s’est fait poisser à Marrakech dans une partouze avec des petits garçons" n'en finissent plus de faire des vagues. Julien Dray, rappelle la nécessité de faire preuve de dignité et de respect dans la période à venir. Il revient également sur le rôle joué par Internet dans la propagation des rumeurs.

Julien Dray

Julien Dray

Julien Dray est ancien député PS de l'Essonne. Il est actuellement conseiller régional d'Île-de-France.

Il est l'auteur de L'épreuve (Cherche Midi, 2009), livre dans lequel il revient sur l'affaire judiciaire à laquelle il a été mêlé, et de La faute politique de Jean-Luc Mélenchon, (Cherche Midi, 2014).

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Atlantico : Luc Ferry a déclaré au « Grand Journal » de Canal+ ce lundi : « dans Le Figaro Magazine de cette semaine, vous avez un épisode qui est raconté, d’un ancien ministre qui s’est fait poisser à Marrakech dans une partouze avec des petits garçons ». Il a ajouté : « nous savons tous ici de qui il s’agit (…) l’affaire m’a été racontée par les plus hautes autorités de l’État, en particulier par le Premier ministre » ». Il ne cite toutefois aucun nom. Que pensez-vous de ces propos ?

Julien Dray : C’est honteux. Il y a toujours eu, dans toutes les périodes, des personnes qui pour exister sont prêtes à « balancer ». Pendant la guerre, on « balançait » les juifs, puis les arabes. Là il n’y a pas de guerre, alors on « balance » son voisin.

Je ne suis pas sûr que Luc Ferry ait eu une mauvaise intention au départ. Mais il ne s’est pas maitrisé. Les personnes qui passent trop de temps dans les médias et qui ne maitrisent pas leurs messages sont obligées pour exister de donner des gages au système. Mais tous ceux qui jouent avec ces valeurs sont en train de porter un coup terrible à la démocratie et à la politique.

On parle beaucoup de morale actuellement. Selon moi, la morale c’est de respecter les autres, de faire preuve de dignité. Cela passe notamment par le respect de la vie privée. La valeur d’un homme ou d’une femme se mesure justement à sa capacité à garder de la dignité et du respect.

Que pensez-vous du fait que des noms soient actuellement lancés sur Internet au sujet de l’identité de « l’ancien ministre » ?

Le problème avec Internet c’est qu’il permet la répétition d’un mensonge qui à terme le fait passer pour une vérité. Le travail des journalistes consiste à attaquer uniquement sur la base de preuves formelles, authentifiées, certifiées. Pas sur la base de « on-dits ».

Il y a toujours un élément déclencheur. Cela a été « l’affaire Strauss-Kahn », mais ça aurait pu être n’importe quel autre événement.

Luc Ferry n’a toutefois fait que citer des propos écrits dans un article de magazine…

C’est ce que je vous disais tout à l’heure : il répète ce qu’il a lu et la répétition de ce mensonge devient une vérité. Moi, je préfère ne pas me mêler de ce genre de choses. S’il n’y a pas de faits pénaux, nous n’avons pas à reprendre ce genre de choses, à s’en faire l’écho, à reprendre ce que l’on aurait entendu.

Assistons-nous à une nouvelle séquence ouverte par « l’affaire DSK » ?

Ce qui est nouveau ce sont les appareils photos des téléphones portables. Désormais, tout le monde se prend pour un reporter. Ce phénomène est accentué en plus par les radios ou les télévisions qui incitent le public à leur envoyer des informations. Le problème c’est qu’il n’existe pas de filtre efficace. 

Après, vous prenez une photo, vous la publiez sur Internet et sa diffusion s’en trouve multipliée par 100 000 ! Un jour ou l’autre, on en viendra à légiférer sur ce sujet. On finira par se rendre compte des dégâts terribles que cela peut faire. Cela n’a rien à voir avec la liberté.

Ce genre de polémique laisse-t-il augurer du ton de la campagne présidentielle 2012 ?

Je pense qu’il faut faire une séparation très stricte entre vie privée et vie publique, il faut refuser de rentrer dans toutes ces polémiques et ne rien laisser passer sur le plan judiciaire : si quelqu’un s’amuse à calomnier, il faut l’attaquer en justice, tout de suite.

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