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Impôt à la source, taxe à 3%, emplois aidés, dispositif Pinel ...et si les macronistes se mettaient en risque de conservatisme
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Atlantico Business

L‘ambition de tout changer est-elle tombée ? Toujours est-il que les vieilles recettes du modèle français ont la vie dure.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Alors qu’Emmanuel Macron a été élu sur la promesse de changer la façon de gouverner, de dire la vérité et de choisir l’efficacité novatrice plutôt que de chausser les habitudes administratives, voilà que son gouvernement se laisse aller à retomber dans les vieux travers du conservatisme de l’administration française. 

Par petites touches, réformes après réformes, en moins d’une semaine, les macronistes se sont mis en risque de conservatisme chronique. Quatre exemples. En cherchant bien, on en trouverait bien d’autres.

1er exemple, dernier en date, l’impôt à la source. Le gouvernement, et plus particulièrement le ministre du Budget, a confirmé la mise en place de l’impôt à la source au 1er janvier 2019. Pourquoi ? Parce que c’était prévu, qu’on a simplement retardé d’un an pour simplifier un peu la procédure, et que ça fait moderne puisque toutes les autres grandes démocraties l’appliquent.

Tout cela est vrai, sauf que l’impôt à la source ne changera pas grand chose en France. D’abord, parce que la grande majorité des français est déjà mensualisée, soit par le service des impôts, soit par leur banque. Ensuite, parce que le système choisi ne nous exonère pas de faire une déclaration au fisc pour lui indiquer les particularités de notre situation (famille, enfant, quotient familial, niches fiscales…) pour que le fisc calcule en toute confidentialité le taux d’imposition qui sera transféré à l'employeur, pour qu’il fasse le calcul de l’impôt, le collecte et le verse aux services fiscaux. Vu comme cela, l’impôt à la source ne va pas changer la vie du contribuable.

D’ailleurs, plus de la moitié des contribuables s’en moque puisqu’elle ne paie pas l’impôt. L’impôt à la source version française ne simplifie rien, il va embrouiller les entreprises un peu plus. Si seulement, en contrepartie on savait que les services fiscaux allaient pouvoir alléger leurs effectifs, ça pourrait valoir la peine, mais a priori ça n’est pas prévu.

Donc ça ne change rien. Pour une raison très simple, c’est qu’on ne profite pas de ce projet pour simplifier l’impôt sur le revenu lui-même. On change la couleur de l’enveloppe, on change le facteur chargé de transmettre l’enveloppe, mais on ne change pas l’intérieur. Le calcul restera toujours aussi compliqué.

2e exemple, le traitement de cette fameuse taxe de 3% perçue depuis 2012 et déclarée illégale, ce qui va obliger l’Etat à rembourser 10 milliards d’euros. Cette affaire est un vrai scandale d’Etat. D’autant qu‘il met en difficulté l’équilibre budgétaire. Le ministre des finances a donc commandé un rapport pour chercher les responsabilités d’une telle bévue juridique. Le rapport est sorti hier et il conclut à l’irresponsabilité des différents acteurs. En fait, personne n’est responsable, ni à Bercy, ni à Matignon, ni à l’Elysée (où travaillait Emmanuel Macron à l‘époque). Plus grave, les instances chargées de surveiller et de débattre, à l’Assemblée, au Sénat, et surtout au Conseil d’Etat dont le métier est de donner des garanties juridiques, personne n’a rien vu. A moins que tout le monde savait, tout le monde doutait, mais que ça arrangeait les uns et les autres.

En attendant, cette affaire apporte la preuve qu’une fois de plus, l’administration française ressemble au royaume d’Ubu Roi de Alfred Jarry et qu‘aujourd’hui, ça ne gène personne dans la majorité en marche, vers plus d’efficacité et de transparence. Bravo !

3e exemple, les emplois francs. Au détour d’une petite phrase, lors d’une visite très politique dans une banlieue difficile parce que minée par le chômage, Emmanuel Macron a annoncé qu’il allait demander la création d’emplois francs. Francs de quoi, francs de charge sociale. Pourquoi ?  Pour aider l’emploi. Il a sans doute raison. Mais n’avait-il pas dénoncé l’inefficacité et le coût astronomique des emplois publics aidés, n’a-t-il pas provoqué la colère des élus locaux qui ont vu une partie de leur service public vidé d’une main d’œuvre pas chère ? Donc, ce qui était vrai pendant la campagne électorale pour séduire un électorat plutôt de droite ne l'est plus quand il s’agit de rattraper un électorat de gauche.

4ème. Exemple, le Pinel. Ce dispositif fiscal pour aider l’accession à la propriété avait tous les défauts et notamment celui d’avoir favorisé la construction de logements à louer dans des régions où il n’y avait pas de locataire. L’argument d’y mettre fin se tenait sauf que, sous la pression des marchés, des professionnels du bâtiment et des promoteurs de la ville, la majorité "En marche" se prépare à l'Assemblée à reconduire le dispositif. En matière de politique du logement, on attendait sans doute quelque chose de plus original.

Alors, les esprits chagrins ne vont pas manquer de souligner qu’Emmanuel Macron se laisse aller à accepter quelques vieilles habitudes et traditions bien françaises et bien politiciennes. Le politiquement correct revient sur le dessus du panier.

C’est un peu dommage, Macron est arrivé au pouvoir, parce qu‘il était porteur d’imagination et de volonté de changer vers plus de modernité. Le changement serait-il plus difficile à mettre en œuvre qu’il ne le pensait ? 

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