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Bonnes feuilles

Il est urgent de substituer aux recettes de management simplistes des vingt dernières années (rentabilité, innovation et flexibilité à tout prix) une nouvelle forme de management. Extrait de "Qu'est-ce que le management responsable ?" (2/2).

Yves Michaud

Yves Michaud

Yves Michaud est philosophe. Reconnu pour ses travaux sur la philosophie politique (il est spécialiste de Hume et de Locke) et sur l’art (il a signé de nombreux ouvrages d’esthétique et a dirigé l’École des beaux-arts), il donne des conférences dans le monde entier… quand il n’est pas à Ibiza. Depuis trente ans, il passe en effet plusieurs mois par an sur cette île où il a écrit la totalité de ses livres. Il est l'auteur de La violence, PUF, coll. Que sais-je. La 8ème édition mise à jour vient tout juste de sortir.

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Il y a des conditions à la responsabilisation de soi et elles relèvent d’abord de la lucidité sur les situations. Il faut bien identifier ses domaines d’action, jusqu’où ils vont et où ils s’arrêtent. Il faut ensuite bien identifier ses objectifs en faisant la part entre ceux qui constituent les objectifs propres du manager et ceux qui relèvent de la politique générale et de la stratégie de l’entreprise.

Ce travail d’identification permet de déterminer le champ des responsabilités et, plus encore, les marges de manœuvre dont on dispose à l’intérieur de ce champ. L’absence de marges de manoeuvre ou l’équivoque sur ces marges provient très souvent d’un travail insuffisant d’analyse des tâches et des objectifs, y compris par manque de clarification avec les échelons supérieurs. Il faut ensuite identifier et hiérarchiser les contraintes selon leur degré et leur ordre de priorité : certaines sont rigoureuses, d’autres moins, d’autres encore relèvent du souhaitable. De même, l’identification des synergies et des partenariats possibles contribue à définir le champ d’action, y compris dans ses lointaines conséquences. Les conséquences des actions s’élargiront quand les actions entreront en synergie avec d’autres. À l’inverse, l’absence de synergie, voire les « dysergies » (synergies négatives), vont devoir être endossées comme conséquences des actions.

Voilà pour le versant intellectuel et cognitif de la responsabilisation : il consiste à voir jusqu’où et comment s’étendent les effets des actions. Cette analyse doit évidemment intégrer et peser les effets humains : coopération, retrait, refus, freinage, crise, hyper-adaptation, etc. Il y a aussi une seconde part, morale ou éthique, à la responsabilisation. Il s’agit en effet d’être soi, de faire preuve de courage et d’avoir confiance en soi et en ce que l’on peut faire. Il n’y a pas de recette miracle pour être soi, mais déjà le fait de se poser la question et de chercher à s’examiner est une contribution à être soi : on cesse de se perdre dans l’action et de se fuir.

Des interrogations sur la manière d’être un manager, sur les réussites et les échecs, peuvent aussi jouer un rôle positif, sans oublier ce que peut apporter le regard d’autrui ou les échanges entre managers sur les pratiques et les manières de gérer. Le courage dépend en grande partie de la solidité du moi. Si je sais qui je suis, avec mes qualités et mes défauts, avec mes dynamismes et mes limites, il me sera plus facile de me situer entre excès et défaut, entre témérité et lâcheté : je saurai jusqu’où je peux assumer sans me faire d’illusions sur mes capacités. Et puis il y a la confiance en soi, qui tient aussi à la manière d’être de l’identité personnelle. Elle tient également au retour qui est donné par les autres. Il y a là une dialectique de la confiance : la confiance en moi induit celle des autres, qui en retour me confortent dans ma confiance

Où nous retrouvons le charisme du manager : sa confiance en lui-même inspire confiance aux autres et lui revient. Attention simplement que ce cercle vertueux de la confiance ne devienne pas un cercle infernal d’auto-persuasion. C’est pourquoi l’intervention d’un regard extérieur est indispensable. Quant à la responsabilisation d’autrui, elle dépend d’un processus et donc demande du temps, de la patience et de la clarté.

On ne responsabilise pas du jour au lendemain par un : « Prenez vos responsabilités ! » On produit la responsabilisation. Comment ? Par la définition claire des objectifs et des marges d’action, par la définition des procédures admises, recommandées, et surtout de celles qui sont exclues. Ce qui implique un partage d’informations.

Extrait de "Qu'est-ce que le management responsable ? Confiance, décision, réflexivité", Yves Michaud, (Eyrolles Editions), 2013. Pour acheter ce livre, cliquez ici.

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