Hollande-Merkel : la France et l'Allemagne ont (chacune) un incroyable talent de déni des réalités économiques<!-- --> | Atlantico.fr
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François Hollande et Angela Merkel promènent leurs certitudes dans une même attitude de mépris.
François Hollande et Angela Merkel promènent leurs certitudes dans une même attitude de mépris.
©Reuters

Cécité volontaire

Alors que le président français s'entête dans une stratégie économique manifestement sans issue, la chancelière allemande reste aveugle des conséquences européennes de sa politique.

Nicolas Goetzmann

Nicolas Goetzmann

 

Nicolas Goetzmann est journaliste économique senior chez Atlantico.

Il est l'auteur chez Atlantico Editions de l'ouvrage :

 

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S’il existe aujourd’hui une réalité du tandem franco-allemand, il s’agit d’une alliance indéfectible dans la capacité au déni. Malgré les alertes, les remontrances, sincères ou partisanes, les deux gouvernements promènent leurs certitudes dans une même attitude de mépris. Alors que François Hollande persiste dans une voie manifestement sans issue, Angela Merkel reste aveugle des conséquences européennes de sa politique. 

Le gouvernement de Jean-Marc Ayrault s’est évertué à nier la réalité tout au long de la semaine. Les nombreux rappels à la « baisse du chômage des jeunes » pourtant contestée par les chiffres publiés par Eurostat (26,1% des jeunes sont au chômage en France en septembre 2013, record historique et en hausse de près de 3% sur un mois) en sont sans doute le partie la plus indécente. La conclusion est revenue à François Hollande qui, suite à la décision de S&P d’abaisser la note de la France, a choisi de réaffirmer la politique menée jusqu’alors. Les Français ont tort, les agences de notation ont tort, la France va mieux, c’est le Président qui vous le dit.

Du côté allemand, même constat. Le département du Trésor américain a beau insister sur le caractère néfaste du modèle mercantiliste allemand sur la croissance mondiale, pointant l’absurdité de la recherche permanente d’excédents commerciaux, Angela Merkel y reste sourde. Son ministre des Finances, Wolfgang Schauble, rejette toute critique d’un geste « notre surplus n’est pas une un problème, ni pour l’Allemagne, ni pour l’Europe, ni pour le monde ». La critique du Trésor américain est jugée « incompréhensible ». Les articles du FT « L’Allemagne est un poids pour le monde», mais également de The Atlantic « L’obsession Allemande pour l’exportation conduit l’Europe à la dépression » notamment, contestent assez largement la position du gouvernement d’Angela Merkel. A la surprise générale, c’est la Commission européenne qui est également venue manifester quelques réticences face au modèle allemand.

Le monde entier exprime ainsi son mécontentement face à l’indigence du traitement européen de la crise. L’incapacité de la plus grande zone économique mondiale à établir un diagnostic correct, c’est-à-dire monétaire, représente une menace pour l’économie mondiale.

François Hollande devrait profiter de telles attaques, mais il n’en est rien. Car la position défendue par le Président est encore plus éloignée de la solution que celle défendue par Angela Merkel. La France a deux coups de retard.

En effet, incapable de diagnostiquer correctement le caractère monétaire de la crise, au contraire du Japon, des Etats-Unis, du Royaume Uni, de la Chine, du Canada, de l’Australie etc. le gouvernement se contente d’appliquer une simple vision comptable des événements. La hausse d’impôts apparaît comme la seule réponse à la crise que connaît le pays. Ce qui revient à dire que la cause de la crise en France serait la trop faible pression fiscale. Evidemment, personne n’a jamais pu faire un constat aussi vide de sens, mais il s’agit bien de la réponse apportée par le gouvernement.

Il est tout aussi consternant de constater que la position dominante de l’opposition consiste à vouloir faire de l’Allemagne un modèle. Alors même que ce modèle est jugé être la cause même de la crise européenne, notamment par les Etats-Unis.

La France est aujourd’hui empêtrée dans les profondeurs de toute logique économique. Il serait pourtant bien simple de provoquer un rapport de force européen tout à fait en sa faveur. Pour cela, il conviendrait de rejoindre la position américaine en posant un diagnostic monétaire sur la crise, et de susciter ainsi un ralliement de positions, aussi bien en Europe, qu’à travers le monde.

En assumant de la sorte son rôle de leader européen, la France peut faire fléchir la position d’Angela Merkel et procéder à une réforme du mandat de la BCE. En effet, cette dernière se contente aujourd’hui de lutter contre l’inflation alors que c’est bien la déflation qui menace.

L’isolement de François Hollande, qu’il doit également juger incompréhensible, n’est que la conséquence de l’incompréhension internationale de la politique qu’il mène. La concentration d’attaques envers la politique mercantiliste européenne, symbolisée par le mandat de la BCE, représente pourtant une chance historique de réformer l’Europe vers une politique de croissance.

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