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Hausse de la CSG : le gouvernement osera-t-il essayer de rétablir
la compétitivité des entreprises
en transfèrant une partie du financement de la sécu aux salariés ?
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Salarié, tous frais payés

Alors que le sommet social s'est ouvert lundi, Pierre Moscovici ne s'est pas déclaré opposé à une hausse de CSG si un consensus avec les syndicats se dégage. Objectif : transférer une partie du coût du financement de la sécurité sociale des entreprises aux salariés, afin de relancer la compétitivité. Une révolution pour un gouvernement de gauche ?

Olivier Babeau

Olivier Babeau

Olivier Babeau est essayiste et professeur à l’université de Bordeaux. Il s'intéresse aux dynamiques concurrentielles liées au numérique. Parmi ses publications:   Le management expliqué par l'art (2013, Ellipses), et La nouvelle ferme des animaux (éd. Les Belles Lettres, 2016), L'horreur politique (éd. Les Belles Lettres, 2017) et Eloge de l'hypocrisie d'Olivier Babeau (éd. du Cerf).

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Les débats actuels concernant un éventuel transfert de la CSG patronale aux salariés ont tout d’abord le mérite de rappeler cette évidence : le chômage en France est largement dû au coût trop élevé du travail, coût qui est aussi responsable de notre faible compétitivité. Sommes-nous pour autant devant les prémices d’un retour à une politique de l’offre ? On peut encore en douter, même si il y a huit mois je défendais précisément l’idée que, contrainte et forcée, la France finirait fatalement par se rendre à ce véritable Canossa idéologique [1].

Alors que des économistes tels que Philippe Aghion parlent - avec raison - du nécessaire « choc d’offre » qui pourrait seul relancer la croissance, les dispositifs complexes de transfert de la CSG dont on augmente par ailleurs le taux s’apparente beaucoup plus à des tours de passe-passe qu’à une politique économique volontariste en faveur des entreprises : on essaye surtout de masquer l’augmentation de la pression fiscale — alourdissement de la fiscalité pesant sur l’épargne, les placements, les revenus fonciers et les pensions — derrière des justifications plus facilement communicables.

En l’état actuel du projet gouvernemental, on parle d’une baisse de 5,5 points des cotisations patronales. C’est évidemment non négligeable, mais encore loin de « l’onde de choc en faveur des entreprises » dont parle le commissaire général à l’investissement Louis Gallois, et donne hélas surtout l’impression d’un Gouvernement manipulant des curseurs fiscaux de quelques crans pour continuer à colmater des déficits sociaux qu’il est incapable de maîtriser.

Il est frappant de constater combien l’Etat a peu d’idée de la psychologie élémentaire de l’entrepreneur. Les décisions d’embaucher ou la capacité à conquérir des nouveaux marchés à l’étranger dépendent d’un ensemble de facteurs dépassant de très loin les seules questions fiscales. L’atmosphère favorable à l’entreprise dépend sans doute bien plus de facteurs essentiels tels que la simplicité de l’environnement administratif et le degré de sécurité juridique. Or dans ces deux domaines, la France est un cauchemar pour les entreprises : la jungle de notre droit, la densité de nos règles sociales, la rigidité du contrat de travail et le tourbillon incessant des nouvelles normes et des palinodies créent l’ambiance la plus délétère qui soit pour celui qui entreprend.

La vérité, c’est qu’avec 44% de prélèvements obligatoires, le Gouvernement n’a aujourd’hui ni les moyens d’une réelle politique de la demande — et tant mieux, car elles ont prouvé leur inefficacité [2] — ni la volonté de mettre en œuvre une réelle politique de l’offre.

Si le Gouvernement commence à prendre conscience du fait qu’il n’y a ni emplois ni solidarité possibles sans activité économique — ô découverte ! —, qu’il en tire les conséquences et qu’il déroule enfin le tapis rouge aux entreprises à l’image de ce que le Royaume-Uni, on s’en souvient, sait faire depuis longtemps et se propose de faire encore.

Rompant avec les discours soupçonneux voire franchement comminatoires à l’égard de la sphère productive et de tous ceux qui ont réussi par leur travail, la France doit devenir un lieu accueillant à toutes les entreprises. Cela nécessiterait que l’on ose une révolution de notre logiciel de politique économique fondée sur le pragmatisme.



Notes

[1] « Le grand retour (forcé) des politiques de l’offre », La Tribune, 29/12/2011.

[2] Voir à ce sujet la tribune de F. Aftalion, « L’illusion de la relance par la dépense », Le Figaro, 29/05/2012

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