Quand "l'assassin du siècle" faisait la fierté de ses parents<!-- --> | Atlantico.fr
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Hermann Göring nomme Heinrich Himmler à la tête de la Gestapo (1934).
Hermann Göring nomme Heinrich Himmler à la tête de la Gestapo (1934).
©German Federal Archive

Quand un nazi réuSSit

"Les frères Himmler" : dans ce récit familial et historique, Katrin Himmler dessine le portrait du cadet de la fratrie, Heinrich Himmler, son grand-oncle. Portrait du maître absolu de la SS et architecte de la "Solution finale". (Extrait 2/2)

Katrin Himmler

Katrin Himmler

Katrin Himmler est née à Dinslaken (Rhénanie-Westphalie) en 1967. Après des études de sciences politiques, elle sʼoccupe dans différents contextes du problème de la prise en compte du passé nazi et prend ses distances avec lʼhistoire de sa famille. Heinrich Himmler était son grand-oncle. Elle vit à Berlin où elle poursuit son métier dʼécrivain

 

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Le 30 janvier 1933, Hindenburg donna son accord pour la nomination de Hitler comme chancelier du Reich. À Berlin, les bataillons SA franchirent la porte de Brandebourg dans un défilé aux flambeaux. Le peintre Max Liebermann, dont l’appartement donnait sur la Pariser Platz avoisinante, regarda le défilé de sa fenêtre et commenta : « Si seulement je pouvais bouffer autant que j’ai envie de dégueuler ! » Une foule considérable, cependant, se massa le long du cortège et l’acclama avec enthousiasme – il devait probablement y avoir mon grand-père Ernst.

Le lendemain de la nomination de Hitler, Gebhard Himmler senior écrivit à son fils cadet :

« Cher Heinrich ! À toi aussi aujourd’hui – nous venons d’écrire au chancelier – nos félicitations les plus cordiales et les plus sincères pour le succès et la victoire remportés par le mouvement pour lequel tu t’es tant investi. Enfin la forteresse est prise ! Puissiez-vous réussir, entourés que vous êtes par des ennemis sans nombre et maints faux amis, à tenir la position et à la renforcer, et puisse le ciel, mon cher fils, t’accorder la santé nécessaire et la récompense que mérite ton travail ! »

Comprenant bien qu’avec tout le travail qui attendait Heinrich, il n’allait pas le voir de sitôt, le père lui envoya un affectueux Gruß und Kuß (salutation et baiser), selon la formule consacrée. La mère prit sa plume, le même jour :

« Mon cher Heinrich ! Joyeuse et émue, je voudrais te féliciter, moi aussi, d’avoir exaucé notre vœu, le tien comme le nôtre : voir la victoire de ton Führer, remportée après une longue lutte. Que la chance et la grâce de Dieu continuent à l’accompagner ! […] La carte que tu nous as envoyée de Lippe, avec la signature de Hitler que nous désirions tant, nous a fait énormément plaisir. J’espère que tu as pu vivre pleinement la journée de victoire à Berlin. Ça a dû être magnifique, cet hommage ! À tout moment, mon amour et mon attention t’accompagnent en pensée. »

Ces deux lettres montrent, tout comme d’autres adressées à Heinrich par ses parents à partir de 1933, qu’ils étaient extrêmement fiers de leur fils, qui, nonobstant leurs doutes et en ayant apparemment misé, dès le départ, sur le bon cheval, avait fini par devenir quelqu’un. La foi inébranlable, si idéaliste et exempte d’opportunisme, avec laquelle Heinrich avait poursuivi ses objectifs, des années durant, pour les atteindre grâce à sa ténacité, avait dû les impressionner après coup. « À quel point nous nous réjouissons, mon cher Heinrich, de chaque photo de toi, des reportages à la radio et dans les journaux ! » lui écrit sa mère, deux mois après. Et, recevant, un an plus tard, une photo du Führer avec sa dédicace, elle ressentit « une véritable extase ».

Mes arrière-grands-parents étaient devenus des partisans enthousiastes de Hitler. En octobre 1933, ils firent une demande d’adhésion au parti qui, en dépit de la décision de bloquer les nouvelles adhésions, aboutit finalement avec l’aide de Heinrich. Ils savouraient pleinement l’influence de leur fils, qui leur permettait de se sentir de nouveau proches des puissants, voire du nouvel homme à la tête de l’État. Ils félicitèrent Hitler personnellement et se réjouirent de la carte postale comportant sa signature comme de la relique d’un saint.

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Extrait Les frères Himmler, DAVID REINHARC (13 janvier 2012)

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