Exposition universelle - Jean-Christophe Fromantin : "ExpoFrance 2025 générera près de 24 milliards d'euros, un demi point de croissance et environ 160 000 emplois"<!-- --> | Atlantico.fr
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Jean-Christophe Fromantin.
Jean-Christophe Fromantin.
©Reuters

Rayonnement

La France est candidate pour organiser l'exposition universelle en 2025, qui doit durer 6 mois, pour mettre au cœur des préoccupations des Français l'innovation et l'investissement public. Jean-Christophe Fromantin promet de rétablir le rayonnement international de la France dans le monde.

Jean-Christophe Fromantin

Jean-Christophe Fromantin

Jean-Christophe Fromantin est Maire de Neuilly-sur-Seine depuis 2008 et député des Hauts-de-Seine depuis 2012. Entrepreneur dans le secteur du commerce international, il a créé plusieurs sociétés et il est l’un des rares chef d'entreprise à siéger à l’Assemblée nationale. Il crée le groupe UDI à l’Assemblée nationale avec Jean-Louis Borloo en 2012 puis participe à la création de l’UDI dont il fut candidat à la présidence et vice-président jusqu'en novembre 2014.

Convaincu que la France a besoin d'un grand projet qui confirme sa vocation dans la mondialisation, fixe ses axes de croissance et stimule son attractivité, Jean-Christophe Fromantin est à l'origine du projet d’Exposition Universelle pour la France en 2025.

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Atlantico : L'organisation d'un tel événement demande des moyens considérables. Il a été annoncé 2,7 milliards uniquement par fonds privés avec un emprunt assuré par l'Etat de 300 millions. Quelles retombées économiques pouvons-nous prévoir ? Le financement est intégralement privé et les prévisions très positives, or jamais une exposition n'a rapporté de l'argent.

Jean-Christophe Fromantin : Il y a trois types de bénéfices. Tout d'abord un bénéfice direct sur les hypothèses d'au moins 45 millions de visiteurs qui génèrent des retombées directes et factuelles d'à peu près 24 milliards d'euros, un demi-point de croissance et environ 160 000 emplois créés. Ce sont des retombées factuelles directes et mesurables. Le deuxième effet est l'accélération des investissements publics et privés qu'ils soient directs ou indirects, c’est-à-dire directement liée à l'exposition ou accompagnant celle-ci avec le développement des transports pour accompagner les potentiels visiteurs. Enfin, il y a un effet de levier sur l'innovation. Historiquement, les expositions universelles étaient un endroit où convergeaient beaucoup d'inventions qu'elles soient technologiques, industrielles ou artisanales. Lorsque l'on combine les trois, l'effet de levier est extrêmement important. Il y a donc un bénéfice factuel, un effet d'entraînement sur l'innovation et sur l'investissement.

Nous avons calculé les bénéfices factuels en utilisant un modèle utilisé sur ce type d'opération traditionnellement utilisé pour calculer l'impact économique de ce type d'événement. On part d'abord d'une estimation du nombre de visiteurs. Ensuite nous attribuons à chaque visiteur des typologies de coefficient multiplicateur, c’est-à-dire en fonction des dépenses. Enfin nous dispersons ce bénéfice sur différents secteurs d'activité de l'économie française. Il y a environ 36 secteurs d'activité dans la norme INSEE. Chaque secteur d'activité a lui-même un effet sur l'économie qui est différent qu'il s'agisse de la distribution, des transports, etc. A partir de là nous arrivons à calculer un impact économique. C'est donc à la fois une estimation sur la base du nombre de visiteurs et un coefficient multiplicateur en fonction des visiteurs. Un visiteur qui vient de région parisienne et un visiteur qui vient de l'autre bout du monde pour l'exposition n'ont pas le même coefficient multiplicateur en terme de dépenses. Nous observons par la suite comment ces dépenses sont incrémentées dans l'économie, certaines ayant un impact plus fort et un effet d'entrainement que d'autres dépenses n'ont pas. Cette méthode permet d'avoir un calcul assez précis. Il est souvent dit "Nous gagnerons de l'argent à l'avenir. Il y a un effet d'image.". Tout cela est bien souvent au doigt mouillé. Là au moins les chiffres ne sont pas imaginaires, ce ne sont pas des présupposés spéculatifs. Ce sont des effets factuels sur une base conservatrice.

Quelles peuvent être les retombées touristiques ? Les prévisions sont à nouveaux très optimistes avec 10 millions de touristes supplémentaires attirés par cet événement...

Oui, dans les 45 millions de visiteurs à l'exposition universelle. Nous découpons ceux qui ne sont pas loin en France ou en Europe, ceux qui viennent habituellement d'Europe et du monde, et enfin les visiteurs qui viendront spécialement pour l'exposition. Le total fait 45 millions. Dans notre calcul économique nous comptons donc 10 millions de visiteurs supplémentaires par rapport à un flux habituel.

Très concrètement, en quoi l'organisation d'un tel événement pourrait-il également favoriser les investissements étrangers ?

Pas forcément les investissements étrangers mais plutôt les investissements publics et privés. Il y aura un effet fort sur les investissements publics en raison notamment des besoins en infrastructure. Il y aura aussi un effet sur les investissements privés puisqu'il y a de nombreux domaines où l'on est à la limite du seuil de déclenchement et où un coup de pouce est nécessaire pour déclencher. L'exposition permettrait donc de déclencher des investissements. Il y a aussi un effet d'image bénéfique pour la France mais nous n'avons pas intégré cela dans nos calculs. Il est clair qu'un pays qui a accueilli une expo universelle, rappelons l'ambition qui a été la notre au XIXème, permettrait de retrouver une part de son rayonnement mondial. Il est clair que le projet que l'on propose aujourd'hui, très innovant sur le plan digital et technologique, fatalement reconstituera l'image innovante, moderne, culturelle de la France sur ces nouvelles technologies. De fait cela aura un impact sur les investissements internationaux. Nous ne l'avons même pas intégré dans notre calcul, nous avons seulement intégré les investissements directs nécessaires à l'exposition.

Au cœur du projet ExpoFrance2025 se trouve la création d'un "village numérique" qui sera la "Tour Eiffel de cette expo universelle". La France accuse-t-elle du retard dans le domaine de l'économie numérique ? Le projet s'apparente-t-il à une Silicon Valley à la française ?

La France n'est pas en retard. Il suffit de se rendre compte du succès d'un certain nombre d'entreprises comme Blablacar, Deezer, etc. Il y a des recherches fondamentales dans les technologies d'immersion et de réalité virtuelle. Nous disposons de compétences mathématiques qui sont le sous-jacent des progrès technologiques de demain. Mais la particularité de la France est de ne pas mettre tout cela en réseau, de ne pas le faire converger. Nous sommes reconnus comme de bons mathématiciens, nous avons des start up à succès, des pionniers français sont présent dans la Silicone Valley, le cluster de saclay est l'un des plus grands clusters scientifiques au monde. Mais avec tout ça nous n'avons pas d'acteur, de personnalité ou de site qui incarne ou fasse converger tous ces avantages. L'exposition universelle serait le lieu où tout pourrait converger pour combiner c'est savoirs et les faire rayonner.

Le financement prévu est totalement privé à l'origine. Mais l'objectif qui se cache derrière l'organisation d'une telle exposition serait-il de faire prendre conscience à l'Etat de s'investir plus ?

L'objectif est que chacun soit dans son rôle et n'empiète pas sur le rôle de l'autre. Les entreprises ont un devoir d'innovation, de prospection, d'invention nouvelle etc. Les universités ont le devoir de progresser quant à elles dans les sciences fondamentales et appliquées. L'Etat a lui comme objectif de favoriser cet écosystème, de créer des moyens de transports, des hubs, des aéroports, des routes et des sites où les entreprises peuvent s'installer. L'exposition universelle encourage à ce que chacun soit dans son rôle au maximum du possible. Ce n'est pas à l'Etat de créer de nouveaux produits lui-même et de les exporter bien entendu, c'est aux entreprises. L'un ne doit pas prendre la place de l'autre, les investissements peuvent être publics ou privés avec des acteurs tous plus impliqués. L'Etat a sa part dans la construction du Roissy Express, de zones d'activités à Marne la Vallée ou ailleurs. Tous les acteurs doivent faire en sorte que tout converge et soit mis en réseau autour d'une ambition commune.

Cet événement aurait également pour ambition de faire en sorte que la France "s'ouvre au monde en l'accueillant chez elle" selon les termes de Pascal Lamy, ancien directeur de l'OMC et délégué interministériel chargé de la coordination des acteurs publics pour l'exposition universelle France 2025. La France accuse-t-elle un retard économique parce qu'elle n'a "pas réussi à entrer dans la mondialisation" ? Cette exposition universelle peut-elle changer le regard des Français sur le monde ?

Je crois en effet que la France a besoin de se réconcilier avec la mondialisation. L'actualité nous le montre tous les jours aujourd'hui. La mondialisation n'est pas sans problème mais pour autant il ne faut pas ignorer qu'il y a des classes moyennes dans des pays émergents qui citent la France parmi les pays qu'ils préfèrent grâce à notre culture, nos produits et nos marques. Ces classes moyennes des pays émergents constituent des milliards d'individus qui ont le pouvoir d'achat le plus puissant du monde. On ne peut donc pas présenter une mondialisation qui créée des problèmes géopolitiques comme il y en a en ce moment. On a le devoir de réconcilier les Français avec la mondialisation et de montrer le côté positif et le pouvoir d'entraînement sur notre économie grâce à notre culture, tout l'héritage et les savoirs faire que l'on a acquis. L'aspect politique, au sens épistémologique du mot, de cette exposition universelle c'est de réconcilier les Français avec la mondialisation. C'est aussi de réconcilier les générations au lieu d'en opposer deux. Là aussi l'actualité nous rattrape tous les jours. Si l'on ne met pas la génération de nos enfants sur les rails d'un projet d'ambition nationale à l'échelle mondiale, elle aura toutes les raisons de s'en aller, de déprimer et de dire qu'il n'y a pas d'avenir. C'est une réconciliation avec la mondialisation, une réconciliation entre les générations, et puis probablement une réconciliation avec le progrès. Les expositions universelles ont pour tradition d'éviter au progrès de faire peur. Si l'on regarde un peu l'histoire, encore une fois le XIXème, c'étaient vraiment les machines le problème. Tout le monde en avait peur. Elles allaient tuer l'agriculture, l'artisanat, la France elle-même. En fin de compte, les expositions universelles avec leur esprit de grande fête ont réconcilié les Français avec le progrès industriel. Nous avons besoin aujourd'hui de réconcilier les Français avec les technologies qui n'ont de sens que si l'on les met au service de notre culture, de nos paysages, de nos territoires et de nos savoirs faire.

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