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Emmanuel Macron ou l’avènement du libéralisme dévoyé
©Capture d'écran

Pays ingouvernable

La France est un pays difficile à réformer. Cela tiendrait aux paradoxes qui la composent comme sur la demande d'un Etat protecteur et la dénonciation des abus d'un Etat policier. Le pays est difficile de la réformer.

Les Arvernes

Les Arvernes

Les Arvernes sont un groupe de hauts fonctionnaires, de professeurs, d’essayistes et d’entrepreneurs. Ils ont vocation à intervenir régulièrement, désormais, dans le débat public.

Composé de personnalités préférant rester anonymes, ce groupe se veut l'équivalent de droite aux Gracques qui s'étaient lancés lors de la campagne présidentielle de 2007 en signant un appel à une alliance PS-UDF. Les Arvernes, eux, souhaitent agir contre le déni de réalité dans lequel s'enferment trop souvent les élites françaises.

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L’ère Macron consacre l’avènement du libéralisme dévoyé

Aux yeux de nos principaux partenaires, la France reste probablement l’un des pays qui véhicule le plus de clichés politiques et sociaux. C’est au mieux un lieu privilégié de paradoxes politiques amusant nos voisins ; c’est au pire celui d’une schizophrénie générale, où la loi du tout et son contraire règne en maître. De fait, la France peut être vue comme le lieu où l’on exige à la fois de bénéficier d’un Etat surprotecteur, pour faire face à la menace islamiste, et où, dès le lendemain, il est possible de crier sa haine de l’Etat policier. On peut applaudir le fonctionnaire de police qui sauve le Bataclan et l’insulter le jour d’après dans le cadre d’une manifestation ayant pour cadre la Nation, la République ou la Bastille, le célèbre triangle parisien de toutes nos contestations.

La France ne serait pas réformable parce que c’est comme ça !

Conséquence évidente de cette réputation, la France serait un pays par nature irréformable. Plus grave, nos gouvernants, à commencer par le président de la République lui-même, véhiculent ce cliché sur notre incapacité à nous réformer et son déplacement à Bucarest d’août dernier fut l’occasion de déclarer que « la France n’est pas un pays réformable. Beaucoup ont essayé et n’y ont pas réussi, car les Français détestent les réformes. Dès qu’on peut éviter les réformes, on le fait ». Or, ce constat vaut pour nos dirigeants qui viennent en très grande majorité de la technostructure d’Etat et qui n’ont qu’une idée très lointaine de ce que sont la création d’entreprise, les lois du marché les plus élémentaires et les phénomènes d’anticipation qui rendent inopérantes nos politiques publiques, parce que les Français cherchent par tous les moyens à se prémunir de leurs effets les plus néfastes. D’ailleurs, simples rappels sur notre histoire récente, ayant peur de la réforme qui aurait pu menacer leur pouvoir, Jacques Chirac, comme François Hollande, purs produits de l’appareil d’Etat, n’ont pas hésité à endosser le costume des rois fainéants de l’époque mérovingienne présentés par les manuels d’histoire de la IIIe République pour s’éviter tout problème. Ou plutôt le croyaient-ils ! Et l’Histoire continue car, au vu des mesures mises en place depuis son élection en mai 2017, il est probable qu’Emmanuel Macron court le risque de se transformer à son tour en héritier du bon roi Dagobert.

La France n’est pas réformable parce que les Français sont d’indécrottables conservateurs !

Alors que les rues de Paris bruissent régulièrement d’appels à mettre fin à l’ultra-libéralisme, une simple lecture des presses allemandes, néerlandaises ou tchèques suffit à se convaincre que la France n’est pas exactement perçue comme un havre de paix pour libéraux et qu’elle est vue comme une société gangrenée par un étatisme pachydermique. Et il ne s’agit pas là de clichés véhiculés par la chaîne conservatrice américaine Fox News ou les proches de Donald Trump !

En réalité, la France n’est pas anti-libérale, pas plus qu’elle n’a dans ses gènes une aversion pathologique pour les réformes. Toutefois, le libéralisme, le vrai, celui qui crée des richesses et non celui qui est fantasmé et que vomissent les indignés des quartiers de l’Est parisien, n’a qu’une existence fantomatique dans nos contrées et il ne peut pas se déployer pour permettre à notre pays et à nos concitoyens de retrouver le chemin de la liberté et de l’innovation.

De fait, pour comprendre la France de 2017, il faut revenir à Platon. Les Français sont aujourd’hui dans la situation des hommes enchaînés et immobilisés présentés dans l’allégorie de la caverne exposée par Platon dans le livre VII de la République. Nous tournons le dos à l’entrée de notre caverne et nous ne voyons plus que nos ombres et celles projetées d’objets au loin derrière nous. Nous n’avons plus connaissance de la réalité de nos capacités, parce que l’Etat, ou plutôt ses serviteurs au sommet de la pyramide administrative, ne veulent pas qu’il en soit différemment. Sortir de la caverne, s’émanciper, même très partiellement, du poids de nos politiques publiques serait pourtant le plus grand service à nous rendre collectivement.

Il convient en effet de rappeler que la France est un pays où 57% de la richesse produite part dans la dépense publique, où l’endettement public approche les 100% du produit intérieur brut, où les Français ne commencent à travailler pour eux-mêmes que le 24 juillet de l’année et où nos responsables politiques ne sont jamais en panne d’idées pour produire des lois ineptes, de nouveaux impôts comme s’il en pleuvait et des textes réglementaires en abondance qui n’ont pour seules qualités que de générer du travail pour ceux qui les produisent.

Le gouvernement d’Edouard Philippe n’est d’ailleurs pas en peine d’idées sur tous ces sujets, même si les ardeurs ultra-fiscalistes de France stratégie ont été tempérées, au vu du programme quasi totalitaire que nous propose cet organisme de conseil placé auprès du Premier ministre et dirigé jusqu’à récemment par Jean Pisani-Ferry, actuel coordinateur du dernier plan étatique d’investissement lancé par Emmanuel Macron. France stratégie ne propose rien moins que de sacrifier la propriété privée pour faire payer le prix de presque quarante ans de dérives budgétaires de l’Etat. Il faut donc rappeler à ces apprentis sorciers que dans ce pays, le droit de propriété est, selon l’article 2 de la déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen du 26 août 1789, un droit naturel et imprescriptible ! Ils l’ont certainement oublié.

Le discours de la non-réforme d’Emmanuel Macron est le cache sexe du refus de libérer les Français

Le discours du refus de la réforme masque l’essentiel. La France a effectivement du mal à faire des réformes non pas parce que sa population y est hostile, mais parce que ses élites politico-administratives n’y ont en réalité aucun intérêt véritable ! Il est évident que des réformes qui peuvent réussir sont certes celles qui offrent aux Français de ne pas redescendre dans l’échelle sociale à long terme, mais elles sont aussi et surtout celles qui leur donnent la possibilité de s’émanciper de leur dépendance malsaine à la dépense publique et à l’endettement qui conduit notre pays au chaos, à la pauvreté et à l’immobilisme de type brejnévien à plus long terme.

Revenir aux fondamentaux du libéralisme en allégeant le poids de l’impôt et de la dépense publique, tout en limitant les interventions stériles tous azimuts de l’action publique est une question de survie pour notre pays. En ce sens, la politique suivie par Emmanuel Macron n’est pas du libéralisme, n’en déplaise à Jean-Luc Mélenchon et ses thuriféraires. La politique aujourd’hui mise en œuvre n’est que du libéralisme dévoyé parce qu’elle en présente certaines apparences, mais elle n’en a ni le fond ni la doctrine. A terme, ce refus d’offrir à la France ce dont elle a le plus besoin, soit une véritable relance de l’offre économique, finira par nous conduire à ce qui est aujourd’hui notre plus grande peur collective, l’inéluctabilité du déclin économique et social de notre nation.

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