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Coup de chaud 
sur les écoles hors-contrat : 
la liberté scolaire en danger
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Old school

Un amendement parlementaire de l'opposition sur la question du financement des écoles hors-contrat n’a pas été retenu lors du récent examen de la loi de finances. De quoi déterrer la hache de guerre entre deux conceptions de l'éducation nationale...

Xavier Petitjean

Xavier Petitjean

Xavier Petitjean est responsable fiscal dans un important groupe mutualiste d'assurance. Auparavant il a été avocat fiscaliste chez Arthur Andersen International puis Ernst & Young.

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Véritable mouvement de société, les écoles dites hors-contrat connaissent depuis plusieurs années un développement massif. Selon le site de la Fondation pour l’école, près de 47 000 élèves y étaient scolarisés en 2010 et ce chiffre augmenterait chaque année. Mais qu’est-ce qui motive les parents à inscrire leur progéniture dans des écoles dont les frais de scolarité oscillent généralement entre 150 et 250 euros par enfant et par mois ?

En tout premier lieu, l’enseignement public, laïc et gratuit a perdu de sa superbe : le collège unique, la carte scolaire ou les méthodes pédagogiques sont très contestées, notamment en ce qui concerne les méthodes d’apprentissage de la lecture.

Sur un plan plus politique, l’influence des organisations syndicales dans un ministère qui semble échapper à l’autorité de son propre ministre, même socialiste comme Lionel Jospin ou Claude Allègre, est souvent suspectée de défendre des intérêts catégoriels au détriment de l’intérêt des enfants.

Enfin, c’est l’efficacité même du modèle public de l’enseignement qui est remise en cause. Livres et rapports prolifèrent sur ce thème : en 2007, le Haut Conseil de l’Éducation dressait un constat sans concession : "quatre écoliers sur dix, soit environ 300 000 élèves, sortent du CM2 avec de graves lacunes : près de 200 000 d’entre eux ont des acquis fragiles et insuffisants en lecture, écriture et calcul ; plus de 100 000 n’ont pas la maîtrise des compétences de base dans ces domaines". En 2006 était publié un best-seller vendu depuis à plus de 160 000 exemplaires : La fabrique du crétin. Son auteur, Jean-Paul Brighelli, un ancien militant d’extrême-gauche, connaît bien l’Éducation Nationale pour y avoir travaillé plus de trente années et avoir œuvré au sein de syndicats enseignants tels le Snes ou le Snacl : le titre de son ouvrage suffit pour expliciter le sens de sa démonstration.

Face à cette situation, il existait un échappatoire : l’enseignement privé sous contrat, la plupart du temps lié à l’enseignement catholique diocésain. Mais, ici aussi, les reproches s’accumulent qu’il s’agisse de l’absence de liberté des directeurs d’établissement dans le choix de leur corps professoral, des méthodes pédagogiques, des contenus des programmes ou de leur positionnement spirituel.

Reste alors l’école hors-contrat qui consiste à créer un établissement scolaire jouissant d’une liberté quasi totale : méthode syllabique pour apprendre à lire, dictée hebdomadaire voire quotidienne pour réhabiliter grammaire et orthographe, retour des traditionnels calcul mental et autres récitations par cœur de fables ou de poésies, classes multi-niveaux de petits effectifs où chaque enfant peut progresser à son rythme, etc.

Si la plupart de ces structures revendiquent une identité catholique clairement affichée, d’autres se fondent, au contraire, sur des méthodes pédagogiques spécifiques (Montessouri) ou bien se spécialisent sur des enfants qui ont du mal à trouver leur place dans les structures traditionnelles de l’enseignement public ou privé : les enfants précoces ou surdoués, par exemple.

Néanmoins, liberté ne signifie pas absence de contrôle : ces écoles sont soumises aux vérifications de l’Inspection académique dont les inspecteurs s’assurent du niveau général des enfants et des capacités de l’encadrement. En outre, ces écoles doivent naturellement respecter à la lettre les normes de sécurité en vigueur.

En contrepartie de cette liberté, l’école hors-contrat ne reçoit aucun subside de la part de l’État ou des collectivités locales, contrairement aux autres établissements scolaires qui fonctionnent grâce à la manne publique. Il résulte de cette situation une importante fragilité financière qui dépend inéluctablement de la générosité de donateurs privés. C’est pourquoi nombre de ces établissements, gérés sous statut associatif non lucratif, se sont organisés de telle façon que ces mécènes puissent bénéficier des réductions d’impôt sur le revenu, conformément aux dispositions prévues par le code général des impôts en la matière.

Rien d’illicite là-dedans. En outre, c’est bien dans l’air du temps : le dispositif du crédit d’impôt pour emploi d’un salarié à domicile a bien été élargi aux frais de soutien scolaire, qui, lui aussi, est sensé compenser les carences de l’enseignement public traditionnel ou privé sous contrat.

C’est pourtant sur la question du financement des écoles hors-contrat qu’est intervenue l’opposition parlementaire le 14 octobre dernier sous la forme d’un amendement au projet de loi de finances 2012 déposé par Madame Delaunay, Monsieur Glavany et les membres du groupe socialiste, radical citoyen et divers gauche.

En effet, faute de pouvoir s’attaquer aux écoles hors contrats protégées par le principe de valeur constitutionnelle qui laisse aux parents la liberté de choisir les modalités d’instruction de leurs enfants (article 26-3 de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme), ces parlementaires de gauche s’en prennent aux modalités de financement de ces écoles en excluant ces structures scolaires du champ d’application des réductions fiscales. Subtil coup de poignard qui aurait eu pour effet de rendre plus difficile encore la survie des écoles hors-contrats déjà fort précaires.

L’amendement n’a pas été retenu lors de l’examen de la loi de finances, mais l’essentiel est là : comme en 1984 lors du projet de loi Savary, pierre tombale que le gouvernement socialiste de l’époque tenta de poser sur l’école libre, les idéologues de gauche supportent mal que la liberté puisse rimer avec diversité.

Pour l’instant, ces députés d’opposition ont perdu une bataille. Car ils étaient dans l’opposition. Il en sera autrement si la gauche remporte les élections de 2012. Plus que jamais, les relents de 1984, l’œuvre d’Orwell cette fois-ci, se font sentir : la vigilance des parents soucieux de rester libres de choisir l’école de leurs enfants s’impose.

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