Droguée au boulot même en vacances ? Comment aider votre moitié à décrocher<!-- --> | Atlantico.fr
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La période estivale a débuté et les Français prennent en moyenne entre deux et trois semaines de congés.
La période estivale a débuté et les Français prennent en moyenne entre deux et trois semaines de congés.
©Flickr/Victor1558

On débranche !

Votre partenaire est un "work addict", il n'arrive pas à se débrancher de son travail, quelques conseils pour l'aider à se déconnecter : oublier le chargeur, proposer des siestes, favoriser les plaisirs simples...

Céline Butin-Canis

Céline Butin-Canis

Céline Butin-Canis est consultante au sein de l'IME Conseil dans les domaines du management, de la santé et du développement durables. Formatrice certifiée à l’Approche Neurocognitive et Comportementale (ANC) développée par l’IME, elle intervient également sur des thématiques plus spécifiques comme la « psychonutrition » (accompagnement au changement durable de comportement alimentaire) et l’amélioration de la Qualité de Vie tant personnelle que professionnelle (prévention du stress et des risques psycho-sociaux…).

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Atlantico : La période estivale a débuté, les Français prennent en moyenne entre deux et trois semaines de congés. Cependant, même en vacances, certaines personnes n'arrivent pas à décrocher complètement de leur travail. Quels sont les conseils pour les aider à profiter de leurs vacances pleinement ?

Céline Butin-Canis : En effet, certaines personnes n’arrivent pas à décrocher, notamment à cause du stress généré par leur travail. Pour tenter de débrancher ce stress, il existe plusieurs moyens, plusieurs axes de travail.

Tout d’abord le rôle du conjoint. Il/elle doit :

  •  être attentif aux désirs profonds et aux plaisirs de son partenaire accro au travail afin de l’aider à prendre du temps pour cela : siestes à l’ombre d’un arbre, moments d’intimité, besoin de calme ou de fête, chercher à lui faire plaisir, être présent et disponible au dialogue…
  • éviter de tout programmer : le conjoint peut veiller à conserver des temps non planifiés pendant les vacances, pour se détacher des habitudes professionnelles où tout est régi par le sacro-saint agenda.
  • être force de proposition : en général le conjoint nous connaît très bien et a une vision plus globale du problème. Qu’il n’hésite pas à proposer de revivre ces petits plaisirs, parfois oubliés, de nos jeunes années ou d’accomplir ensemble une activité, un projet qu’on a souvent évoqué mais jamais osé réaliser. Quitte à ce que ce soit du saut en parachute ! Ces propositions renouvellent l’ordinaire de la vie du couple et contribuent à renforcer la relation des deux conjoints.


Mais il faut également travailler sur soi, et essayer par des moyens simples de déconnecter au mieux de sa vie professionnelle :

  • prendre le temps d’observer : retrouver la sérénité, notamment grâce à de petits exercices, comme se recentrer sur ses sensations : contempler les paysages, être attentif aux bruits, redécouvrir les saveurs et les odeurs… Juste les accueillir, sans vouloir les maîtriser ou lutter contre. Reprendre conscience de la « vraie » vie, faire le marché, jouer au foot avec ses enfants, être aux côtés de ceux qu’on aime. Se demander ce qui est vraiment important dans notre vie. Pour débrancher, il est bon aussi de chercher les avantages et inconvénients non seulement du travail mais aussi des vacances, réfléchir à ce que veut dire « être en vacances », notamment en multipliant les points de vue (celui du conjoint, d’un enfant, de l’hôtelier, de notre boulanger..), afin d’avoir une vision nuancée des choses.
  • mettre un frein à l’hyperinvestissement au travail : 40% des personnes souffrent d’hyperinvestissement émotionnel au travail, autrement dit, ils s’investissent au-delà du raisonnable et attendent une reconnaissance qui, même lorsqu’elle vient, ne les satisfaits pas. Ce comportement à tendance obsessionnelle et addictive génère des états de stress voire d’épuisement psychologique, et ne peut conduire, à terme, que vers la frustration, la démotivation, la déception et l’amertume. Lorsqu’on est hyperinvesti au travail, on est souvent sous-investi ailleurs (dans sa vie amoureuse, sociale…). Cela renvoie à des complexes, des tabous et des choses que l’on n’ose pas faire. Par exemple, je n’assume pas de (me faire) draguer, donc je suis toujours célibataire, donc je m’hyperinvestis au travail, donc je n’ai même plus le temps de penser à ma vie amoureuse… Pour s’en sortir, il faut commencer par reconnaître son comportement de « work addict » et prendre conscience de ce dont il nous prive. Puis, pour affronter nos complexes, profitons d’être dans lieux différents de notre quotidien, fréquentés par des personnes qu’on ne reverra sûrement jamais : en forêt, sur la plage ou dans le bar d’une ville où l’on n’est que de passage…
  •  faire ce qui nous plaît vraiment et s’écouter soi-même : nous reconnecter à nos motivations profondes et durables, celles qui sont inconditionnelles et ne dépendent pas du résultat ou du regard des autres. Osons nous plonger dans nos passions ! Les vacances, c’est le temps pour retrouver un équilibre entre vie personnelle et vie professionnelle.


Dans quelle mesure les nouvelles technologies et notamment les Smartphones sont un poids en vacances ? Faut-il nécessairement tout couper pendant les congés ?

Couper tous nos moyens de communication modernes n’est pas forcément une solution. Certaines personnes vont être frustrées, et du coup ne penser qu’à leur travail car elles n’ont pas accès à leurs mails par exemple. Il est préférable d’établir une sorte de contrat moral avec soi-même et avec ses proches.

Se mettre d’accord ensemble sur le temps consacré à son travail. Par exemple, ne consulter ses mails qu’une fois par jour, ou deux fois dans la semaine, à un moment qui ne dérange pas la famille. Se fixer un objectif raisonnable : le plus important est de tenir la promesse faite.

On peut également désactiver la fonction web de son téléphone pour ne plus recevoir ses mails et ne la réactiver qu’au moment de la semaine choisi ensemble. Et puis, comme pour les enfants lorsqu’ils disent des gros mots, organiser une sorte de cagnotte dès que l’on déroge au règlement mis en place.

Comment réagir quand son conjoint n'arrive pas à se reposer et à sortir de son cadre professionnel pendant les vacances ? Faut-il forcément entrer en conflit ?

Il est plus efficace de prendre le temps de la communication et même de la "métacommunication". "Métacommuniquer", c’est communiquer sur son propre état d’esprit, sur ses émotions, expliquer comment on vit les choses.

Cela renforce la communication dans le couple et les relations familiales. Il est important, pendant les vacances, de prendre le temps de parler de soi et de prêter à ses proches une oreille attentive pour (re)découvrir qui ils sont et non pas ce qu’ils font, car il est difficile de trouver ce temps dans la vie quotidienne du métro-boulot-dodo.

Les congés sont un moment privilégié pour laisser la place aux émotions dans un contexte sécurisé, pour discuter de nos problèmes, de nos comportements addictifs, pour extérioriser ce qui nous contrarie et exprimer ce qui nous ferait véritablement et durablement plaisir.

Dans Les cinq langages de l’amour de Gary Chapman, on peut identifier les différentes preuves d’amour : les services, les paroles valorisantes, les moments de qualités, les cadeaux, le toucher physique. Les vacances sont un temps pour se redécouvrir en couple ou en famille, et apprendre à parler le langage de l’amour qui parle vraiment à notre conjoint ou à notre enfant.

Les personnes accrochées à leur travail, souffrent-elles de troubles psychologiques ? Si oui lesquels ?

Il y a plusieurs étapes dans l'hyperinvestissement émotionnel au travail. Les vacances sont le bon moment pour oser se poser les vraies questions : "Suis-je en phase avec ce que j'ai envie de faire?". Si on ne peut pas quitter son travail actuel, il faut se demander comment on peut se repositionner dans une manière de faire les choses qui nous correspond davantage.

La première phase de l'hyperinvestissement se caractérise par un intense désir de réussir et une peur excessive d'échouer, sans qu'il y ait forcément de grands enjeux. C'est aussi valable dans les relations amoureuses.

La deuxième phase ne se traduit plus simplement par le désir et l'appréhension mais par un sentiment de frustration et de déception, même si les résultats sont bons et reconnus comme tels. On souffre d’une éternelle insatisfaction. Ces deux phases favorisent les états de stress et d’anxiété mais restent gérables.

Les deux dernières étapes relèvent davantage de la pathologie : ce sont vraiment des comportements de "work addict", où la personne vit les choses comme traumatisantes, un peu comme un drogué privé de sa substance. Si elle n'a plus de connexion internet, elle est capable d'aller dans toutes les pièces de la maison ou sur son toit pour capter le réseau. A ce stade, le travail est pour elle une vraie drogue et peut l’amener au "burnout" : si on se sent comme ça même en vacances, il est temps de réagir ! Certains livres d'auto-coaching sont plutôt efficaces. Mais le risque que ce comportement dégénère et conduise à une réelle dépression est très important.

La dernière phase est celle de la dépression réactionnelle : on vit la chose comme un traumatisme, on ressasse les choses avec amertume. Rien que d’y penser, ça nous fait souffrir. Si, durant les temps de repos, on a des pensées envahissantes, même la nuit, cela est vraiment problématique et il faut le prendre au sérieux. Parfois ces comportements semblent s'estomper à la rentrée avec la reprise du travail (comme pour le drogué qui prend enfin sa dose), mais le cycle infernal n’est pas brisé pour autant : la première phase laissera vite la place à la seconde puis à la suivante… parfois jusqu’au « burnout ». Il ne faut pas attendre de goûter cette phase d’amertume et de dépression pour réagir. Au-delà des livres d'auto-coaching, l’aide d’un professionnel (un coach par exemple) est souvent nécessaire.

Conseils de livres d’auto-coaching pour cet été :

- Gary Chapman, Les 5 langages de l'amour (Leduc.s éditions, 2008)

- Patrick Collignon et Jean-Louis Prata, Votre profil face au stress. Comment les neurosciences font du stress votre allié (Eyrolles, 2012)

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