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Dormez braves gens… qu’on puisse vous dépouiller tranquillement cet été : le point sur les nouvelles méthodes des cambrioleurs
©Reuters

A poings fermés

Le Daily Mail rapporte qu'un couple de touristes britanniques aurait été dérobé dans le sud de la France grâce à l'usage d'un gaz soporifique diffusé dans leur camping-car. Un fait divers qui s'inscrit dans une tendance toujours plus importante des cambrioleurs à profiter de votre inattention plutôt que de votre absence.

Jean-Paul Mégret

Jean-Paul Mégret

Jean-Paul Megret est secrétaire national du Syndicat indépendant des commissaires de police (SICP).

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  • Face au développement des dispositifs de sécurité privés, les vols et cambriolages liés aux départs des vacanciers se font au moyen de nouvelles méthodes... ou par le recyclage de procédés déjà bien connus. 

  • Campings, aéroports, trains, parkings et distributeurs de billets sont des lieux récurrents de vols typiquement constatés pendant la période juillet-août. A titre d'exemple, un couple britannique a ainsi récemment été dérobé en Provence, probablement via l'emploi d'un gaz soporifique d'après la police locale.

  • Dans le même temps les cambriolages de résidences ne s'arrêtent plus devant les vitres renforcées et les portes blindées. Afin de minimiser le risque certains cambrioleurs font participer des mineurs qui ne finissent pratiquement jamais en détention.

  • Autre fait notable, la présence des propriétaires dissuade de moins en moins les cambrioleurs qui se contentent d'attendre que leurs victimes soient assoupies.

Des techniques de vols qui vont des transports à la plage en passant par les campings

Bien que les résidences de particuliers comptent parmi les cibles favorites durant les grands départs de l'été, on rencontre toujours des cas de vols simples et de vols qualifiés se répartissant dans la plupart des espaces fréquentés par les vacanciers durant leurs séjours. On a pu, entre autres, évoquer sur les dernières années des affaires de bagagistes-receleurs dérobant les valises de certains voyageurs (des cas de vols en bande organisé ayant même été traduits devant la justice en 2006 et en 2012 pour des sommes montants jusqu'à 2 millions d'euros, NDLR) bien que l'on reste ici sur des phénomènes dont l'importance reste plutôt relative. 

On recense aussi logiquement durant la période juillet-août une augmentation des plaintes liées à ce que l'on appelle "les pick-pockets des plages" qui attendent que vous partiez à l'eau ou que vous vous endormissiez pour vous dérober vos effets personnels. Des pick-pockets plus "traditionnels" opèrent aussi directement dans les rues des stations balnéaires en profitant de l'affluence et du manque de vigilance des touristes. 

On trouve aussi des équipes plus spécialisées, notamment dans les vols aux distributeurs de billets qui se sont beaucoup manifesté sur des villes comme Paris. Ici ce sont souvent des 9-15 ans qui s'approchent d'un touriste s'apprêtant à retirer du liquide tout en tentant de le distraire. Une fois le code tapé, il n'y a plus qu'a se saisir de l'argent extrait de la machine et de s'enfuir le plus rapidement possible. C'est un fait particulièrement constaté dans les quartiers des grands magasins. 

Un phénomène plus connu est celui des vols à la roulotte qui consiste à dérober un objet présent dans un véhicule garé pendant l'absence du propriétaire. Il s'agit à la base d'un terme générique, qui porte généralement sur des butins de très faible valeur mais qui ont tendance à être récurrents autour des parkings et des campings. 

Quant aux vols qui ont lieu dans les transports, en particulier les trains, ont parle généralement plutôt de vols avec violences que d'opérations reposant sur l'absence de vigilance des victimes. S'il peut exister des plaintes de certains usagers pour des bagages dérobés, notamment dans les trains de nuit, l'absence de statistiques complètes empêche de donner un ordre de grandeur. 

Depuis quelques années, les forces de l’ordre constatent en parallèle de ces vols la récurrence et l’amplification de certaines méthodes de cambriolage auxquelles s'ajoutent des innovations parfois déroutantes. La multiplication de "sas", à savoir le nombre d’entrées nécessitant un code ou un pass jusqu’au domicile des gens, tend à rassurer les particuliers... au profit des cambrioleurs bien aidés par une baisse de vigilance. Bien qu’elle ne soit pas encore la plus répandue, une technique notamment inquiète de plus en plus les forces de l’ordre : le cambriolage en la présence des propriétaires. L’idée est simple : les surprendre dans leur sommeil et les séquestrer…

Cambriolages : Des méthodes pré-opératoires qui continuent de fonctionner

Dans la plupart des cambriolages, on a affaire à des équipes qui s’organisent en fonction de la réponse des victimes potentielles et de celle des forces de l’ordre. Un cambriolage est réfléchi, organisé et commence toujours par une phase de repérage. Cette étape consiste à étudier la texture des portes et les possibilités d’ouverture, ainsi qu’à démarcher les victimes. L’idée est d’envoyer des profils dont on ne se méfie pas, comme des personnes âgées ou des enfants.

Une des particularités des cambriolages d’aujourd’hui est la présence d’un minimum de deux véhicules, comme pour les trafics de stupéfiants. Un véhicule porteur va servir à transporter le matériel volé, tandis qu’un véhicule ouvreur signalera par téléphone ou talkie walkie la présence de policiers et/ou de personnes susceptibles de repérer le délit.

...mais des techniques d’effraction toujours plus innovantes

Initialement, les cambrioleurs passaient principalement par les portes d’entrée. Depuis l’apparition et la multiplication des portes blindées, ils ont dû s’adapter. Une des techniques les plus répandues consiste à profiter du fait que 10 % des gens environ laissent la clé de leur domicile dans leur boîte aux lettres afin qu’un proche, une femme de ménage, une nounou puisse l’utiliser. Or certaines équipes sont spécialisées dans l’ouverture de boîtes aux lettres au moyen notamment de clé PPT, soit des clés passe-partout.  Deux options s’offrent ensuite aux cambrioleurs : soit ils cherchent la porte correspondante directement après, étage par étage, soit ils l’emportent et en font un double très rapidement. Une fois sur deux, un cambriolage a lieu à cause d’une clé laissée dans une boîte aux lettres.

Il existe également des équipes très particulières spécialisées dans l’ouverture de serrure de portes, qu'elles soient blindées ou non. Elles sont équipées de dispositifs dignes des plus grands serruriers, et notamment de parapluies – un outil qui permet de recréer toutes les aspérités d’une clé à partir de la serrure. Ce type d’équipes ne travaillent généralement que sur des domiciles où elles vont être sûres de pouvoir prendre des centaines de milliers, voire des millions d’euros.

Concernant le commun des mortels, les cambrioleurs passent aujourd’hui majoritairement par les fenêtres et les porte-fenêtres, même si certaines sont fabriquées en PVC, ont des serrures et des vitres renforcées. Pour ce faire, les cambrioleurs n’hésitent pas à utiliser des perceuses électriques ou des petites fiches circulaires pour les démonter celles disposant de serrures où de vitres renforcées. 

Aujourd’hui, l’enjeu principal au niveau de la sécurité passive, c’est-à-dire des fabricants, est d’arriver à protéger ces entrées potentielles en déployant des dispositifs de sécurité qui fonctionnent notamment à base d’alarmes volumétriques. La technique des fenêtres et porte-fenêtres est due aux nouvelles techniques de blindage de portes. Il y a eu de gros efforts à ce niveau-là étant donné que les portes blindées actuelles coûtent certes très cher mais sont quasiment inviolable, à moins de s’y mettre avec les moyens des sapeurs pompiers pendant une demi-heure.

Une technique pour s’introduire par le biais des fenêtres et porte-fenêtres et qui tend à se développer très fortement est l’exploitation de très jeunes mineurs, d’en moyenne 13 ans. Le mineur va escalader jusqu’à l’étage voulu, peu importe la hauteur ou l’absence d’une gouttière. Les mineurs élargissent ensuite les passages principalement à l’aide de mini-perceuses électriques fonctionnant sur batterie, puis font entrer les majeurs qui les accompagnent. Cette technique est majoritairement issue des gangs d’Europe centrale et orientale.

Les personnes que l’on interpelle dans ce type de cas connaissent parfaitement la législation : ils savent que le déferrement pour les jeunes mineurs est légal mais que la mise en détention est impossible. Les mineurs finissent généralement dans un foyer, puis s’évadent – à l’aide de complices ou non – dans les 24 heures.

Une fois l'effraction réussie

Les voleurs vont surprendre les victimes dans leur sommeil et les séquestrer avec plus ou moins de violence. Ils en profitent alors pour prendre les cartes bleues tout en extorquant aux victimes leur code. Ils repartent parfois même à bord du véhicule de leurs victimes chargé de leur butin. Cette technique s’est d’ailleurs popularisée sous le terme de home-jacking.

Mais ce que la plupart des équipes recherchent aujourd’hui sont les œuvres d’art et les coffres, mais surtout les pierres précieuses, les bijoux… Aujourd’hui les principaux recéleurs se rendent en Belgique et en Hollande, étant donné que la législation y est extrêmement facilitatrice. Avant de fondre l’or ou de dessertir les pierres précieuses, il faut prouver que les bijoux leur appartiennent. Mais dès lors qu’ils viennent de l’étranger, les recherches sont vaines et sont ainsi abandonnées.

L’absence de réponse pénale face à une baisse en trompe-l'oeil du phénomène

Les forces de l’ordre interpellent beaucoup ce type d’équipes. Policièrement parlant, il est très facile de leur attribuer un certain nombre d’infractions. Judiciairement parlant, elles ne sont presque pas, voire jamais condamnées. Elles font bien l’objet de convocation ultérieure au tribunal, mais ces équipes étant extrêmement mobiles n’y répondent jamais.

La seule solution serait d’appliquer la méthode que l’on trouve notamment en Allemagne et en Espagne qui consiste tout simplement à ne pas les laisser partir et à leur appliquer la peine qui est prévu, à savoir sept ans de prison. Trouver un cambrioleur qui a déjà effectué une peine de sept ans est actuellement quasi-impossible. Quand bien même, il faut appliquer des peines dissuasives. Aujourd’hui, presque tout le monde a un système de sécurité chez soi. Cela peut dissuader pendant un temps mais les cambrioleurs s’adaptent très vite et très bien.

De plus, le phénomène ne risque pas de diminuer à cause de la mansuétude de la justice et d’une certaine manière, des autorités ministérielles et préfectorales qui annoncent une  baisse de 5,9 %. Ce qui n’est pas précisé, c’est que les chiffres de l’année dernière annonçait une hausse de 20 %. Il aurait donc fallu faire une moyenne cumulée sur plusieurs années. On constaterait alors une très forte hausse. Les chiffres annoncés ne représentent ici qu’une consolidation à un très haut niveau en valeur absolue.

Quelques conseils

La première chose qui est essentielle est de ne jamais laisser ses clés dans sa boîte aux lettres. Une fois de plus, un cambriolage sur deux est dû à cette raison.

De plus, toute manifestation de richesses quelconques au détour d’une conversation ou autre est à prohiber. On ne sait jamais, les cambrioleurs sont intelligents, opportunistes, chevronnés et on peut être sûr que s’ils apprennent la présence d’un minimum de richesses dans une maison, ils tenteront leur chance.

Par ailleurs, il est important de disposer de disposer de systèmes de sécurité qui permettent de retarder les cambrioleurs au maximum et de les démotiver. Cela peut aussi bien passer par l’installation d’alarmes que par la fermeture de ses volets. Les caméras de vidéo-surveillance sont notamment des outils très efficaces qui constituent l’ennemi numéro un des cambrioleurs.

Il ne faut pas non plus hésiter à bénéficier des systèmes de protection qui sont mis en place par les officiers de police et de gendarmerie, notamment les plans tranquillité vacances, etc. Les forces de l’ordre s’engagent ainsi à faire des rondes régulières dans votre quartier. Les cambrioleurs le remarqueront et sauront que leur temps sera plus compté que d’habitude, ce qui les découragera.

Si l’on arrive à coupler tous ces conseils, le risque de se faire cambrioler diminue fortement – ce qui ne veut malheureusement pas dire pour autant qu’il n’y aura pas de tentative, et donc de dégradation, ni de cambriolage.

Propos recueillis par Clémence de Ligny

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