Dîner des centristes au Sénat : les leçons de Valéry Giscard d'Estaing au monde politique français<!-- --> | Atlantico.fr
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Ceux qui imprudemment doutaient des facultés intactes du cerveau giscardien auront apprécié entre autres phrases ciselées : « La France a besoin d’un homme d’Etat et non d’un président de la République »
Ceux qui imprudemment doutaient des facultés intactes du cerveau giscardien auront apprécié entre autres phrases ciselées : « La France a besoin d’un homme d’Etat et non d’un président de la République »
©Reuters

Instructif

A 90 ans, Valery Giscard d’Estaing impressionne toujours ses héritiers, jeunes et bien moins jeunes réunis mardi soir dans une salle comble du Sénat. Bien peu manquaient à l’appel chez les survivants de "Démocratie Française", de feu l’UDF.

Xavier Chinaud

Xavier Chinaud

Xavier Chinaud est ancien Délégué Général de démocratie Libérale et ex-conseiller pour les études politiques à Matignon de Jean-Pierre Raffarin.

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Atlantico : Ce mardi soir, s'est tenu au Sénat un dîner des centristes, réunis autour de Valéry Giscard d'Estaing, sur le thème de l'Europe. Qu'en avez-vous pensé ? Que retenir des déclaration de l'ancien président de la République ? 

Xavier Chinaud : De François Léotard qui succéda à VGE à sa présidence après avoir dirigé le Parti républicain composante majeure de la confédération giscardienne, à François Bayrou qui en fut aussi président après en avoir été Secrétaire général, de Jean-Claude Gaudin qui en présida le groupe à l’Assemblée, à Jean-Pierre Raffarin fidèle parmi les fidèles et fondateur de "Giscardisme et Modernité " ; de Pierre Méhaignerie qui présida le CDS, la composante démocrate-chrétienne de l’UDF, à André Santini qui présidait la composante sociale démocrate (PSD) ; de Laurent Hénard patron du Parti radical, autrefois 3e composante de l’UDF, à Jean-Christophe Lagarde patron de l’UDI et bien d’autres encore.

Si le corps porte les marques du temps, ce regard si perçant et ce chuintement si caractéristique subsistent, marques de fabrique de l’ancien président de la République. Dans un propos émaillé de traits politiques, avec la pédagogie rare dont sait faire montre VGE, l’Europe et le Brexit ont été au menu de cette soirée spéciale organisée par l’Institut Lecanuet.

Ceux qui imprudemment doutaient des facultés intactes du cerveau giscardien auront apprécié entre autres phrases ciselées : "La France a besoin d’un homme d’Etat et non d’un président de la République" tout comme "le fondateur de la 5eme République avait imaginé pour elle l’efficacité, l’honnêteté et la préparation de l’avenir. Il faudrait que la Ve République, qui s’est écartée de sa voie, retrouve son chemin pour la grande satisfaction des Français et le rayonnement de la France en Europe et dans le monde" qui pouvaient aussi bien concerner F. Hollande que N. Sarkozy… du "Jean Lecanuet m’a appris que l’on ne pouvait pas gagner une présidentielle tout seul " dont on ne savait exactement s'il s’adressait à E. Macron ou à tel autre candidat de la droite ou du centre ; ou encore "Comme les grands penseurs l'expliquent depuis toujours, les pays doivent être gouvernés au centre" dont il ne faisait aucun doute qu’il parlait de lui…

Depuis la disparition de l’UDF "canal historique" en 1998, jamais ceux qui en étaient issus ne s’étaient retrouvés si nombreux ensemble, si comme l’a joliment dit F. Bayrou : "Nous avons été séparés, mais nos liens ne se sont jamais défaits. Nous ne nous sommes jamais regardés comme des étrangers", certains participants méditaient rêveusement dans la nuit ce rappel de VGE : "L’UDF n’est pas née d’un calcul politicien ni de considérations électorales mais de la conviction de gens qui se rejoignaient… au centre".

Si, comme l'affirme François Bayrou, les liens qui unissent les centristes ne se sont jamais défaits, quel est l'état de ce courant politique aujourd'hui ?

Le centre aujourd'hui est une galaxie, sans soleil. L'UDI a une majorité de ses élus mais il en est aussi au sein de LR et quelques autres au Modem. L'incarnation du Centre est d'avantage en F. Bayrou qu'en un autre dirigeant mais sa formation est bien modeste.

Le diner autour de Giscard a illustré le fait que depuis la séparation de 1998 entre l'UDF de Bayrou et Démocratie Libérale de Madelin, puis la création de l'UMP en 2002, le centre a gâché son héritage. Les héritiers de VGE n'ont depuis sa défaite en 1981 eu de cesse que de se disjoindre, le plus souvent par calcul et par ambition. Leotard portait une vision mais a renoncé devant Chirac en 1987, Bayrou a osé la candidature présidentielle mais a divisé les siens. Ceux issus de l'UDF qui ont rejoint l'UMP ont fait vivre, un temps, l'illusion du parti unique. LR aujourd'hui est fracturé en son sein. L'absence d'un leader à même de rassembler tous ceux qui dans le fond pensent pareil sur l'Europe, la décentralisation et la gouvernance dans une même formation et l'individualisme politique en sont la cause évidente. Cela peut-il évoluer ? Sans doute.

Le quinquennat de N.Sarkozy a marqué l'apogée des fractures du centre, le prochain président pourrait favoriser sa reconstruction et en faire un pilier de son action plutôt que de n'apprécier les  centristes que comme supplétifs achetés par morceaux et oublieux de leurs convictions. 

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