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Dictature laïque ou démocratie islamique, les chrétiens doivent-ils choisir ?
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Epuration confessionnelle

Les chrétiens du Nigéria ont de nouveau été pris pour cible, le 3 janvier, par le groupe terroriste islamiste Boko Haram.Dans un ouvrage très documenté, Alexandre del Valle dénonce et détaille les persécutions dont sont victimes les chrétiens sur tous les continents (Extraits 2/2).

Alexandre del Valle

Alexandre del Valle

Alexandre del Valle est un géopolitologue et essayiste franco-italien. Ancien éditorialiste (France SoirIl Liberal, etc.), il intervient dans des institutions patronales et européennes, et est chercheur associé au Cpfa (Center of Foreign and Political Affairs). Il a publié plusieurs essais en France et en Italie sur la faiblesse des démocraties, les guerres balkaniques, l'islamisme, la Turquie, la persécution des chrétiens, la Syrie et le terrorisme. 

Son dernier ouvrage, coécrit avec Jacques Soppelsa, Vers un choc global ? La mondialisation dangereuse, est paru en 2023 aux Editions de l'Artilleur. 

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On a beaucoup parlé des révolutions démocratiques arabes et de l’espoir qui est né, entre janvier et février 2011, de l’éviction pacifique par la rue des despotes tunisien, Ben Ali et égyptien, Moubarak. Mais par un étrange paradoxe, la démocratisation des régimes arabo-musulmans, loin d’être pour le moment évidente, puisque l’armée est restée partout aux commandes, risque de renforcer l’intolérance islamique et l’antichristianisme : les chrétiens d’Irak étaient moins menacés jadis sous la dictature de Saddam Hussein qu’ils ne le sont depuis l’intervention américaine (2003).

En Égypte, les chrétiens craignent que leur situation n’empire si les Frères musulmans arrivent démocratiquement au pouvoir. L’approbation du référendum de mars 2011, qui maintient la charià comme source de la constitution égyptienne, a été une mauvaise nouvelle pour les chrétiens. En Tunisie, le mouvement Ennahda, issu des Frères musulmans, n’est pas plus rassurant pour les rares chrétiens arabes tunisiens du pays qui sont déjà en situation illégale mais dont le sort serait aggravé avec l’application même partielle de la charià. Un prêtre polonais catholique, Marek Rybinski, a ainsi été tué fin février 2011, en plein chaos post-révolutionnaire.

En Syrie, pays où les chrétiens arabes sont le plus heureux de leur sort, c’est la dictature militaire du clan alaouïte et de la famille Assad qui les protège, alors qu’une démocratisation porterait probablement les Frères musulmans sunnites au pouvoir. Ces derniers s’en prendraient immédiatement aux « hérétiques » alaouïtes et à leurs protégés chrétiens, chiites et druzes. En Jordanie, l’arrivée des Frères musulmans au pouvoir scellerait la revanche de la majorité palestinienne réislamisée sur une monarchie occidentalisée qui protège plus ou moins ses chrétiens.

« Après samedi, dimanche »

Dans la quasi-totalité de ces pays, l’islam est la religion d’État et le processus de réislamisation des lois et des programmes politiques bat son plein. Dans le contexte « d’occupation » militaire américaine de l’Irak, le jihad contre les « croisés » occidentaux et leurs séides chrétiens autochtones a transformé ces derniers en représentants de l’Occident maudit. D’une manière générale, la nouvelle christianophobie des pays musulmans, justifiée par Oussama Ben Laden comme une volonté de « résistance » à la religion des « impérialistes » et par une soi-disant défense de l’identité « réelle » des pays ex-colonisés, sera l’un des défis majeurs du XXIe siècle. Elle n’est probablement qu’à ses débuts. Si elle n’est pas combattue dans ses racines idéologiques et religieuses, elle risque d’emporter encore plus de victimes.

Comme l’exprime bien le proverbe arabe « aujourd’hui samedi, demain dimanche » (l’yom sabt, boukra ahad), une fois le compte des juifs réglés (« ceux qui prient le samedi »), le moment est venu de régler celui des chrétiens (« ceux qui prient le dimanche »…). Il n’est donc pas étonnant que les pays musulmans où les juifs ont été tués ou expulsés depuis les années 1950, Égypte, Irak, Algérie, et ceux où ils n’ont pas d’implantation traditionnelle, telle l’Arabie saoudite, sont les pays où les chrétiens sont le plus persécutés et haïs.

En effet, si les chrétiens d’Orient ont cru un temps être épargnés lorsque les mouvements radicaux islamistes ou nationalistes s’en prenaient essentiellement aux « juifs sionistes », depuis les années 1980, début des succès des mouvements islamistes, les fidèles du Christ sont de plus en plus pris pour cible en tant que coreligionnaires des « croisés » américains qui occupent l’Irak et ils sont accusés d’être les « amis » des diables « sionistes » juifs qui persécutent les Palestiniens. Dans tous ces pays d’islam, les chrétiens d’Orient sont dans le meilleur des cas brimés, ou « moins citoyens » que les autres, et dans le pire des cas, persécutés et contraints à l’exil, vers cet Occident honni auquel ils sont assimilés malgré eux.

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Extraits dePourquoi on tue des chrétiens dans le monde aujourd'hui ? : La nouvelle christianophobie, Maxima Laurent du Mesnil éditeur (12 mai 2011).

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