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De nuit ou le dimanche : pourquoi travailler en horaires décalés peut rendre plus heureux
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Bonnes feuilles

De l'orientation professionnelle jusqu'à l'âge de la retraite, les différentes étapes d'un parcours de vie au travail sont, en plus d'être un facteur important d'épanouissement personnel, l'occasion pour les spécialistes en sciences humaines et sociales de faire partager leurs réflexions sur le monde du travail et son devenir. Extrait de "Le bonheur au travail ?" (2/2).

Béatrice Barthe

Béatrice Barthe

Béatrice Barthe est maître de conférences en ergonomie, Laboratoire CLLE, LTC « Laboratoire Travail et Cognition », UMR 5263 CNRS, université Toulouse 2 - le Mirail.

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Travailler en horaires postés, la nuit, c’était travailler en quart, le matin, le soir, travailler en horaires coupés, le samedi, le dimanche, les jours fériés… Travailler à l’envers finalement, à l’envers d’une journée, d’une semaine ou d’une année normale. A l’envers de tout et de tous, est-ce le bonheur ?

Oui, pour certain(e)s, à certains temps de la vie, cela peut participer au temps du bonheur, ou du moins, à une certaine définition du bonheur. Pour illustrer une partie de la complexité des liens bonheur-temps de travail, extraits de ce qu’en disent les principaux concernés :

Le bonheur : un état de complète satisfaction ?

« Je travaille dans une usine. Cela me va bien de travailler en décalés, comme ça, quand j’ai des moments de libres, je peux faire du sport, bricoler et, pendant que tout le monde travaille, moi, je suis en week-end. C’est comme si je gagnais du temps sur ma vie. »

« Travailler en nuits fixes me permet de voir mes enfants. Je les amène à l’école le matin en rentrant, je les récupère pour le déjeuner, je peux aller faire les courses. Je ne dors pas beaucoup, j’attends les repos, mais cela me convient. »

« Je préfère la nuit le week-end, je peux travailler tranquillement à l’hôpital. Il n’y a pas de hiérarchie, j’ai l’impression de pouvoir bien m’occuper des patients, sans trop de pression, sans les familles. »

Le bonheur : l’aboutissement d’une construction durable ?

« Il faut que je tienne encore quelques années en horaires postés. J’ai une prime qui nous permet d’avoir un bon niveau de vie avec ma femme et nos deux enfants. Mais lorsque le crédit de la maison sera remboursé, je ne suis pas sûr de continuer. Il me faudra faire d’autres choix. »

« Je ne me vois pas toute ma carrière comme ça. Je ne dors pas bien, surtout avant un poste de matin. Là, ça peut aller, je suis seule, j’arrive à récupérer, mais quand j’aurai des enfants, un mari, je pense que ce ne sera plus possible. »

Le bonheur : un idéal de l’imagination ?

« Je suis fatiguée, énervée, j’ai des problèmes de santé, mes jours de repos, je me réveille toujours à la même heure, à 3 h15, je n’en peux plus… »

« Je travaille la nuit, dans l’industrie, je gère une équipe. Je me rends compte que c’est ce travail qui me tue. Je suis toujours fatigué, je déprime par moments et je suis peu disponible pour ma famille. Je pense que mes difficultés d’érection viennent de ça aussi. »

« Lorsque l’encadrement n’est plus là, le soir, on a beaucoup trop de responsabilités, c’est angoissant. Moi, j’ai toujours peur qu’il arrive quelque chose. »

Travailler en horaires « a- » : a-sociaux, a-typiques, a-normaux… est une réalité pour de plus en plus de personnes, aujourd’hui en France comme ailleurs. Ces temps de travail à l’envers de tout et de tous interrogent notre vision du travail mais surtout notre vision de la vie, de la société en général et finalement… notre vision du bonheur.

Quelques chiffres

En France en 2010, seulement 37 % des salariés travaillent en horaires « normaux », c’est-à-dire proches d’une journée sociale (8 h-18 h). 15 % des salariés travaillent la nuit, et 16 % pratiquent le travail en équipes (2 x 8, 3 x 8, 2 x 12 ou autres). Source : Dares, Analyses, n°10, février 2013.

En 2010, 3,5 millions de personnes travaillent la nuit de manière habituelle ou occasionnelle, soit 1 million de plus que dix ans plus tôt. Source : Dares, Analyses, n°10, février 2013.

Extrait de "Le bonheur au travail ?", Sophie Prunier-Poulmaire  (Cherche midi éditions), 2013. Pour acheter ce livre, cliquez ici.

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