De la "suspicion de la promotion canapé" au "soupçon du quota" : grands effets pervers et petites vertus de la parité imposée en politique <!-- --> | Atlantico.fr
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Inscrire la parité dans la loi est sujet à controverse.
Inscrire la parité dans la loi est sujet à controverse.
©Reuters

Machistador-system

Inscrire la parité dans la loi est sujet à controverse. La parité imposée introduit la différence biologique dans la Constitution, génère de lourdes amendes pour certains partis (Les Républicains notamment) et résonne comme un affront fait aux capacités et au potentiel des femmes. Ce pourrait être un handicap de plus.

Sophie Primas

Sophie Primas

Sophie Primas est sénatrice des Yvelines (Ile-de-France) et maire d'Aubergenville (Les Républicains).

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Atlantico : Que pensez-vous des risques, voire des effets pervers de mesures contraignantes en faveur de la parité en politique, de type "discrimination positive" ?

Sophie Primas : Pour être honnête, en 2000, lors du débat au Parlement du projet de loitendant à favoriser l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives, j’étais dans la vie civile, au comité de direction d’une entreprise. J’étais alors farouchement opposée à cette disposition qui peut s’apparenter à un quota. Je considérais qu’inscrire la parité comme une contrainte était un affront fait aux capacités et au potentiel des femmes. Née dans une commune dont le maire avait été une femme dès 1965, je trouvais qu’il y avait d’autres sujets sur lesquels il fallait mettre l’accent pour améliorer la représentativité du corps politique…et notamment la présence de membres de la société civile. Sujet beaucoup plus délicat à résoudre. Cependant, force est de constater que sans cette loi je n’aurais probablement pas été parlementaire moi-même, non pas par machisme, mais simplement parce que les hommes ont brigué les mandats depuis plusieurs décennies et qu’ils ont acquis les compétences, la reconnaissance des électeurs et la légitimité… là où les femmes ont encore besoin de faire leur chemin.

C’est d’ailleurs la source des effets pervers sur lesquels vous m’interrogez : les femmes ont parfois acquis leurs places grâce à un mode de scrutin paritaire et n’ont donc pas systématiquement traversé ce parcours politique du combattant. Aussi, leurs compétences peuvent faire l’objet de perplexité, d’interrogations plus ou moins bienveillantes, voire de quolibets. Nous sommes ainsi passés de la "suspicion de la  promotion canapé" au "soupçon du quota"… ce n’est guère mieux. 

Y a-t-il des dispositions non-contraignantes susceptibles de favoriser la parité ? Et de la favoriser aussi vite que ne le ferait la "discrimination positive" ?

Je crois toujours à la valeur de l’exemple. Cela me semble infiniment plus puissant que les quotas ou que la féminisation orthographique et grammaticale des fonctions… En ce qui me concerne, dès mon enfance, c’est une femme qui m’a servi de modèle : Madame Nelly Rodi, qui était maire d’Aubergenville et sénatrice des Yvelines… il n’y a pas de hasard ! Aussi, je pense que nous devrions faire la promotion de toutes ces femmes qui, sans les quotas, ont fait honneur à la France dans tous les domaines. Simone Veil n’a pas eu besoin de quotas pour laisser une trace indélébile dans la vie politique française. Michèle Alliot-Marie a notamment été chef de parti et brillante ministre du très masculin ministère de la Défense. A droite comme à gauche, les exemples ne manquent pas. Ce sont elles qui doivent nous inspirer. 

Quel est votre diagnostic sur la parité, aujourd'hui, quelques mois après les élections départementales et les fameux binômes homme-femme des candidats?

Il est un peu tôt pour dresser un bilan de cette bizarrerie électorale. Je reste très dubitative sur le principe du binôme, au-delà du fait qu’il soit paritaire. Toutefois, les échos des administrations qui travaillent avec ces nouvelles assemblées - présidées en grande majorité par des hommes- sont que les modes de travail évoluent significativement. L’implication, l’exigence et la grande détermination de ces élues semblent être quelques lignes de force. Mais il faudra confirmer cela dans le temps…

Pensez-vous que l'exercice des responsabilités politiques par les femmes puisse être source d'une plus grande éthique au pouvoir ? Qu'une plus grande place accordée aux femmes permette de revenir à davantage de morale républicaine en politique?

Voilà bien une question assez machiste finalement ! De façon provocatrice, je vous répondrais bien volontiers que les femmes revendiquent aussi leur droit à l’immoralité ! Plus sérieusement, je crois que les femmes sont plus "neuves" en politique. Elles souhaitent réussir leur mission et être utiles de façon pragmatique, proche du terrain. Peut-être sont-elles moins enclines à la course au pouvoir et donc moins vulnérables aux tentations qui peuvent se présenter. Mais, plus que l’apport de la parité pour les femmes, je pense que c’est l’arrivée d’une nouvelle génération en politique qui coupera avec des pratiques que plus personne ne peut accepter.

Propos recueillis par Catherine Laurent

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