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Tout va très bien,
Madame la marquise
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EDITORIAL

A en croire Christian Noyer, gouverneur de la Banque de France, la crise économique est terminée dans la zone euro. Ah bon ?

Qui connaît Christian Noyer ? Ce n'est pas tant l'envie de faire un bon mot facile que le constat d'une triste réalité. En 2011, 10 ans après l'avènement de l'euro, le gouverneur de la Banque de France n'est plus rien, ou en tout cas plus grand chose. Tout se joue et se décide désormais à Francfort, siège de la Banque centrale européenne, (BCE), dont le gouverneur se trouve être... un ancien gouverneur de la Banque de France, Jean Claude Trichet.

Mais n'est pas Trichet qui veut. Aussi, quand Christian Noyer affirme lundi matin lors d'une conférence de presse que "l'Europe est en phase de sortie de crise", selon l'agence Reuters, ou que "la crise économique est terminée en zone euro" selon l'agence Dow Jones - ce qui dans le texte original donne "Nous avons de bonnes raisons de croire que nous sommes sortis de la crise économique" - fort curieusement, cela ne fait pas la "Une" des radios ou des télés à la mi-journée, ni non plus des sites d'information économique. 

Nous ne sommes pas sortis de la crise, mais entrons dans une autre, tout simplement

Deux raisons à cela :

D'abord, effectivement, la parole d'un gouverneur de la banque centrale d'un pays européen, aujourd'hui, ne pèse pas lourd dans le concert donné quotidiennement par les maîtres du monde. Si Jean-Claude Trichet, au nom, donc, de la BCE, avait dit la même chose, il en aurait été tout autrement. Rien à attendre évidemment du côté du FMI, en attente d'un nouveau Directeur général, affaire DSK oblige. La parole d'un intérimaire n'aurait évidemment pas non plus beaucoup de poids.

Ensuite, parce que l'on peut raisonnablement douter de l'analyse de Christian Noyer. Pour soutenir son propos, celui-ci affirme que de plus en plus de signes montrent que l'économie se redresse. Mais dans le même temps, et la même conférence de presse, Christian Noyer a aussi reconnu que le poids des dettes souveraines allait probablement peser sur la croissance de la zone euro. De même, certains indicateurs économiques avancés semblent avoir atteint un sommet confesse-t-il encore. Le 24 mai dernier, le même Christian Noyer parlait aussi de "scénario de l'horreur" en cas de restructuration de la dette grecque, alors même que la plupart des économistes s'accordent pour dire qu'elle est désormais inéluctable, pour ne pas dire qu'un défaut total sur la dette est désormais probable. Les 65 milliards d'euros de prêts supplémentaires consentis à la Grèce ce week-end ne sont qu'un sursis.

Les incantations ne font de l'effet qu'en fonction du poids politique de ceux qui les font

Autant dire que la déclaration de Christian Noyer a tout de l'incantation d'un évêque d'une province jusqu'ici épargnée par la montée des eaux, qui voudrait rassurer ses fidèles. Le bateau Grèce, par deux fois naufragé, renfloué in extremis par ses voisins, et dont le calfat ne tient que par miracle ? L'Irlande et le Portugal, dont les galériens ne font que commencer à découvrir le régime sec auquel les Grecs sont plus ou moins efficacement soumis depuis deux ans ? Pécadilles, manifestement.

Les économistes de comptoir vous le diront : les crises ne se déclenchent que rarement à la veille de l'été. Tout ceux disposant d'une once d'influence sur la marche du monde et les décisions à prendre étant aussi ceux qui n'ont pas à faire le sacrifice de leurs vacances, pour des raisons économiques, dès juin, le mot d'ordre est à la procrastination : "on verra à la rentrée !". En cela, le nouveau prêt consenti à la Grèce est évidemment destiné à gagner du temps, et non pas une solution en soi. C'est de la procrastination à l'état pur. Mais cela, curieusement, Christian Noyer ne l'a pas dit ce matin.

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