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Il ne s'agit pas d'une crise de la dette mais d'une crise de l'euro.
Il ne s'agit pas d'une crise de la dette mais d'une crise de l'euro.
©Reuters

Le nettoyeur

Rendez-vous Atlantico. Cette semaine, Pascal Emmanuel Gobry, le "nettoyeur", fait voler en éclat l'idée reçue selon laquelle la crise qui secoue l'Union européenne et tous ses pays membres est une crise de la dette.

Pascal-Emmanuel Gobry

Pascal-Emmanuel Gobry

Pascal-Emmanuel Gobry est journaliste pour Atlantico.

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Depuis plus d'un an, une crise secoue l'Union européenne et tous ses pays membres, notamment la Grèce, le Portugal, l'Espage et l'Italie. Mais la manière dont cette crise est décrite montre que presque personne — décideurs politiques, banquiers, commentateurs et autres — n'a compris la vraie nature de cette crise.

En effet, cette crise est appelée “crise de la dette”.

Parler de “crise de la dette” c'est dire ceci : les pays européens ont trop dépensé (ou pas assez imposé), ont eu des déficits depuis trop longtemps, ont accumulé trop de dette, et maintenant il faut rembourser. C'est pour cela que les marchés financiers demandent des taux exorbitants pour racheter la dette de certains pays.

Ce diagnostic a l'avantage d'être moralisateur : c'est parce qu'on s'est “mal comportés”, qu'on a été trop dispendieux, trop cigale et pas assez fourmi, que maintenant, comme à la fin d'un conte pour enfants, ce deus ex machina que sont “les marchés” vont nous punir pour nous être mal comportés.

Ce diagnostic a cependant un inconvénient : il est complètement faux.

Comment l'affirmer ? Il suffit de constater que des pays beaucoup plus endettés que les pays en question — des pays comme la Grande-Bretagne, le Japon ou les États-Unis — n'ont aucun mal à financer leur dette et que leurs taux d'intérêts sont au plus bas. Si nous étions dans une “crise de la dette” où le problème vient de la dette et où les marchés refuseraient de prêter aux pays endettés, ces pays-là seraient dans la même situation précaire.

Comme l'a signalé mon collègue de Business Insider Joe Weisenthal, pour comprendre la crise il suffit de comparer les taux d'intérêts de deux pays : la Finlande et la Suède. Ces deux pays sont à peu près similaires : même région, même type et taille d'économie, etc. Pourtant les taux finlandais grimpent depuis quelques mois, alors que les taux suédois sont au plus bas. Pourquoi ? Tout simplement parce que la Finlande a l'euro, et pas la Suède.

Il ne s'agit donc pas d'une crise de la dette mais d'une crise de l'euro. A quoi est due cette crise ? Au fait que, seule parmi les grandes banques centrales, la Banque centrale européenne a indiqué qu'elle refusait d'aider directement les pays de la zone euro à rembourser leurs dettes.

Pourquoi est-ce important? Parce que dans une économie monétaire moderne, la dette d'un État est assimilable à de la monnaie, et que ce sont les banques centrales qui créent la monnaie. La raison pour laquelle personne ne doute que les États-Unis pourront un jour rembourser leurs dettes est parce qu'ils savent que la Fed, la banque centrale américaine, peut créer une quantité infinie de dollars pour racheter la dette. Et tout le monde sait que le dollar ne deviendra pas une monnaie de singe, parce qu'elle est la monnaie de réserve internationale, et accessoirement la monnaie de la plus grande économie mondiale. (Une création infinie de dollars pourrait faire baisser la valeur du dollar, mais un dollar ne vaudra jamais rien.) Idem pour les Gilts anglais et les bons japonais, que les investisseurs s'arrachent alors que ces pays sont très endettés.

Pourquoi ce refus de la BCE, alors ? D'abord parce que les économistes allemands, se souvenant mal de leur histoire, ont peur qu'une création monétaire importante crée de l'inflation. Ensuite parce que comme indiqué plus haut, l'histoire de la “crise de la dette” a l'avantage d'être une leçon de morale. Elle permet de désigner des gentils et des méchants, les méchants étant ces méditerranéens dispendieux et les gentils étant les allemands disciplinés.

Que faire alors ? Il y a beaucoup de solutions à envisager pour sortir de la crise : d'abord que la BCE indique qu'elle ne laissera plus monter les taux d'intérêts des pays de la zone euro. Sur le long terme, essayer de rendre de la cohérence à la zone monétaire européenne.

Mais nous n'aborderons jamais le début du commencement d'une solution tant que nos commentateurs et nos décideurs politiques n'arrêteront pas de parler de “crise de la dette”. 

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