Crise des pays émergents, chute du pétrole, dévaluation chinoise et pourquoi la guerre des changes serait une excellente nouvelle pour l’économie mondiale<!-- --> | Atlantico.fr
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Une guerre des changes va peut-être se déclarer.
Une guerre des changes va peut-être se déclarer.
©Reuters

Eau dans le gaz

Baisse du cours du pétrole, dévaluation chinoise, PIB russe en berne... Si une guerre des changes se déclenche, elle pourrait constituer une dynamique salutaire pour l'Europe.

Philippe Waechter

Philippe Waechter

Philippe Waechter est directeur des études économiques chez Natixis Asset Management.

Ses thèmes de prédilection sont l'analyse du cycle économique, le comportement des banques centrales, l'emploi, et le marché des changes et des flux internationaux de capitaux.

Il est l'auteur de "Subprime, la faillite mondiale ? Cette crise financière qui va changer votre vie(Editions Alphée, 2008).

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Scott Sumner

Scott Sumner

Scott Sumner a enseigné pendant plus de 30 ans l'économie à l'université de Bentley dans le Massachussets aux Etats-Unis. Détenteur de la Chair en politique monétaire du Mercatus Center, ses recherches se sont principalement orientées vers l'économie monétaire, et particulièrement sur le rôle de l'étalon-or pendant la Grande Dépression. Scott Sumner est auteur pour le blog TheMoneyIllusion.com et plus récemment de Econlog.econlib.org .

 

 

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Mathieu  Mucherie

Mathieu Mucherie

Mathieu Mucherie est économiste de marché à Paris, et s'exprime ici à titre personnel.

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Atlantico : Au cours des derniers jours, plusieurs événements ont perturbé les marchés financiers : dévaluation du Yuan, nouvelle chute du prix du pétrole, chute du PIB russe et globalement une santé économique des pays émergents inquiétante. Quelles sont les conséquences attendues de ces événements, faut-il craindre l'apparition d'une nouvelle "guerre des changes" ? Quelles conséquences pour l'Europe ?

Scott Sumner : Au cours des dernières années, la forte croissance chinoise a favorisé la hausse de nombreuses matières premières. Indirectement, cela a eu pour effet de soutenir la croissance dans de nombreux pays émergents, mais également au sein de pays développés exportateurs de matières premières, comme l’Australie. Désormais, ce processus est en train de s'inverser, en raison du ralentissement de la croissance chinoise, mais aussi parce que la croissance se déplace vers les services, moins consommateurs de matières premières.

Bien que la baisse du prix des matières premières bénéficie aux consommateurs européens, l’effet net de ces transformations sera négatif pour la croissance européenne. Une plus faible croissance va déprimer les exportations européennes et ralentir la reprise dans la zone euro. Dès lors, une guerre des changes serait en réalité désirable, car elle permettrait d’apporter plus de soutien monétaire de la part des grandes banques centrales à travers le monde. A ce jour, les politiques monétaires ont été trop restrictives au sein de la zone euro, aux Etats-Unis, au Japon, et en Chine. Le soutien monétaire n’est pas un jeu à somme nulle, puisque si la croissance progresse dans un pays, elle aura des répercussions sur le reste du monde.

Mathieu Mucherie : Il s'agit plus de suites que des événements à proprement parler. La chute du PIB russe est un processus entamé depuis un moment déjà, le PIB russe, c'est 3% du PIB mondial, cela n'entraîne pas énormément de conséquences sauf si on est exportateurs de grosses voitures allemandes, et encore. Le prix du baril de pétrole en revanche peut affecter davantage et être une des causes de ce processus.

Ce qui est nouveau, c'est la dévaluation chinoise, et même là, ce n'est pas vraiment nouveau. Sans inflation en Chine, on misait sur une détente monétaire, qui n'est pas arrivée sous une forme de quantitative easing, mais qui est arrivée sous une forme de baisse de taux. Quand ça n'a pas suffit, ils sont passés à la dévaluation. C'est un peu logique car cela ne coûte pas grand-chose de dévaluer un peu, et là aussi c'est une bonne surprise. Les conséquences de toutes ces mesures vont toujours dans le même sens. C'est l'idée d'un cycle qui se renforce et des liens entre la hausse du dollar et la baisse des matières premières. La crise de certains émergents, et puis l'obligation pour les Européens de faire du quantitaive easing et de lâcher un peu de lest, avec au final, le dollar qui se renforce à nouveau, etc. C'est un cycle qui peut durer encore un moment car le dollar est encore très loin d'être au plus haut, il se renforce nettement depuis 2 ans. En 2008-2009 on était à 35 dollars le baril, à une époque où on tablait sur un futur de 10% par an de croissance chinoise. Aujourd'hui plus personne ne table là-dessus.

Philippe Waechter : L'économie mondiale est dans une phase de croissance médiocre. La question majeure est là et chaque pays essaie d'améliorer ses perspectives de revenus. Ainsi, les producteurs de pétrole continuent-ils de produire au maximum alors que la dynamique de la demande est réduite, en raison de la croissance globale limitée. Cela se traduit par une baisse rapide du prix de l'énergie. Il ne faut pas chercher ailleurs l'origine du repli de -4.6% de l'activité sur un an en Russie. Ce pays est resté très dépendant de ses recettes liées au pétrole. La chute durable du prix de l'or noir provoque une récession faute d'activité de substitution capable de compenser la moindre activité pétrolière.

Quant à la Chine, son principal souci est de gérer le changement de trajectoire de la croissance de son PIB. Les 10% connus en moyenne sur les 20 dernières années ne sont plus tenables, ni atteignables car, avec la croissance, la forme de l'économie a changé. L'émergence d'une classe moyenne a modifié en profondeur le modèle chinois. Pour amortir dans le temps ces changements profonds, les autorités ont pris des mesures pour favoriser l'endettement ou pour doper les marchés. Mais cela n'a pas fonctionné dans la durée. La baisse de la monnaie chinoise est un peu l'arme dégainée comme une dernière chance.

Deux remarques : la première est que la brutalité du changement reflète la fragilité de l'activité en Chine, c'est ce constat validé par les autorités qui a fait vaciller les marchés boursiers. Le poumon de la croissance mondiale des 15 dernières années n'a plus la capacité à jouer ce rôle de locomotive. La seconde remarque est que l'on ne connait pas l'ambition des Chinois sur l'ampleur de la dévaluation et sur un éventuel interventionnisme de la banque centrale.

Quelles sont les causes réelles de cette situation ? Ainsi, le rôle des Etats Unis est ici régulièrement pointé du doigt, par quel biais ?

Scott Sumner : Les racines de cette situation sont très complexes. D’abord, en prenant la perspective la plus large, le monde a eu du mal à générer une croissance suffisante au cours de ces 8 dernières années. Le ralentissement mondial a poussé les taux d’intérêt à des niveaux proches de zéro dans de nombreux pays, et les banques centrales ont eu du mal à comprendre et à s’adapter à ce contexte. Une politique monétaire qui a l’air d’être expansionniste pour des observateurs naïfs, qui ne se concentrent que sur les taux d’intérêt, est en réalité trop contraignante, comparativement aux objectifs des grandes banques centrales. Parce que la FED a été plus agressive que la Banque centrale européenne lors de ces dernières années, la reprise américaine a été plus soutenue. Le résultat est que le dollar est en train de se renforcer relativement aux autres devises, ce qui provoque une pression à la baisse sur le prix des matières premières, car ceux-ci sont exprimés en dollars.

Parce que les chinois ont lié leur devise au dollar américain, la croissance chinoise tend à ralentir lorsque le dollar se renforce, comme cela a été le cas à la fin des années 90 et au cours de cette année. Les chinois ont réalisé tardivement qu’un Yuan excessivement fort conduisait à un ralentissement sévère de leur croissance, et qu’un soutien était alors nécessaire, qu’il soit monétaire ou fiscal. Or, les chinois sont réticents à utiliser l’outil fiscal parce qu’ils sont en train d’essayer de réformer une économie qui dépend trop de programmes gouvernementaux dispendieux.

Mathieu Mucherie :  Les Américains ont pendant longtemps été accusés d'avoir fait trop de dépenses monétaires. S'il y avait eu trop de dépenses monétaires, le dollar serait faible et n'arrêterait pas de s'affaiblir. Hors depuis 7 ans, le dollar ne fait que se renforcer. Manifestement, ils n'ont pas fait assez de dépenses monétaires. Il n'y a pas assez de dollars en circulation dans le monde. Quand on crée un dollar, 50 centimes vont aux Etats-Unis et 50 centimes vont un peu partout sur la planète. Quand un saoudien facture son pétrole, c'est en dollars, quand un mafieux russe fait ses transactions, c'est en dollars. Par conséquent, c'est 50% de l'économie dollarisée qui est américaine. Les 50% restants souffrent de problèmes de liquidités, il n'y a pas assez de dollars dans le monde. Il y a de plus en plus de problèmes d'accès au dollar, notamment pour les pays de type Brésil et Russie. Là c'est un vrai problème, les Chinois essaient donc d'internationaliser le Yuan, bien que cela soit un processus qui prenne beaucoup de temps et ne soit pas compatible avec cette stratégie de dévaluation.

Du coup, comme chacun a sa petite stratégie pour trouver du dollar, il devient de plus en plus cher.  Au cœur du système, il y a une FED pas si généreuse que ça. Si elle était vraiment généreuse, le monde serait alimenté massivement en dollar, et ce n'est pas ce que l'on constate. Si on veut trouver une responsabilité américaine, c'est celle-là. Ce n'est pas si mal que la Chine dévalue finalement, car si la Chine dévalue, elle envoie un message anti-hausse de taux aux Etats-Unis. Cela peut-être un mal pour un bien. La vérité, c'est que la grosse responsabilité dans l'affaire est européenne. En amont, on a une crise larvée de déflation existant en Europe depuis des années et des années. De nombreux pays n'ont pas de débouchés, notamment les Chinois, c'est le cœur du problème. Les pays du Maghreb ou la Russie n'auraient pas la moitié des problèmes qu'ils ont s'il existait une Europe plus ouverte, moins mercantiliste, moins allemande. Le cœur du réacteur déflationniste mondial depuis 7 ans c'est quand même l'Europe et ses problèmes bancaires. C'est à partir du moment où l'Europe a décroché que le commerce international a décroché lui aussi.

Philippe Waechter : La question globale est qu'il n'existe pas aujourd'hui de moteur fort et durable pour la croissance mondiale. Les Etats-Unis ont une expansion réduite (2.1% en moyenne depuis le point bas du cycle au 2ème trimestre 2009, c'est faible), l'Europe retrouve un profil de croissance mais d'ampleur limitée et la Chine peine. Cela se traduit par une progression très réduite du commerce mondial à moins de 1% sur un an au mois de mai et avec une contraction depuis le début de l'année. Le commerce mondial n'a plus l'effet d'entrainement et d'impulsion qu'il a pu avoir par le passé. En conséquence, si un pays veut trouver une impulsion sur son activité, il doit gagner en compétitivité et dévaluer sa monnaie.

Les Etats-Unis sont aussi coincés dans ce paradigme et n'arrivent pas à retrouver une allure de croissance plus robuste.

Dans ce cadre, chaque pays doit d'abord essayer de trouver dans sa dynamique interne les sources de sa croissance. Cela veut dire que les politiques économiques vont rester accommodantes un peu partout et il n'y aura pas de différentiation majeure. Le changement de la parité peut être une réponse à cette situation. Cela permet d'adopter une politique monétaire plus accommodante et les Chinois en ont bien besoin.

Le risque est qu'effectivement tous les pays souhaitent adopter une même stratégie au même moment, c'est l'idée de la fameuse guerre des changes. Cependant, ce cadre n'est pas tout à fait le bon car la monnaie américaine est très forte dans l'attente notamment d'un resserrement des taux de la Fed dans les prochaines semaines. Une telle mesure aurait pu entrainer le dollar à la hausse, tirant vers le haut toutes les monnaies, dont le yuan, accrochées au billet vert. Cette situation aurait précipité le changement de ton de la Chine; peut-être mais celle-ci avait surtout besoin des bouffées d'oxygène d'une dévaluation. La Fed a eu un rôle mais elle peut aussi être un prétexte.

Comment appréhender le comportement des autorités chinoises vis à vis de ses partenaires, comme l'Europe ou les Etats-Unis ?

Scott Sumner : De nombreux observateurs font l’erreur de se concentrer sur le modèle du "mendiant de son voisin" de la dévaluation monétaire. Dans ce modèle, une dépréciation de la monnaie vole les emplois des autres nations. Mais en oubliant le fait que l’effet de retour est bien plus important que l’effet sur les taux de change. Lorsqu’un pays adopte une politique monétaire expansionniste pour déprécier sa devise, il a aussi tendance à soutenir sa croissance, qui bénéficie aussi à son voisin. Voilà pourquoi les marchés financiers étrangers ont tendance à répondre favorablement aux assouplissements monétaires américains, même si une telle action produit un effet négatif sur le dollar.

Le monde entier, en incluant l’Europe, va bénéficier d’une plus forte croissance en Chine. Afin d’obtenir une plus forte croissance économique, les Chinois ont besoins d’ajuster leur taux de change pour refléter la nouvelle réalité globale où le Yen japonais et l’Euro et de nombreuses autres devises ont chuté sévèrement face au Dollar. Une dévaluation de 4% du Yuan le laisse encore à un niveau dramatiquement plus élevé que la plupart des monnaies mondiales, en le comparant à son niveau d’il y a un ou deux ans. Leurs problèmes ne sont pas causés par les politiques de change des autres pays, mais plutôt par un soutien monétaire insuffisant chez eux.

Mathieu Mucherie : Pour répondre à la question, c'est un raisonnement qui n'est pas très international, contrairement à ce que l'on pense. Nous parlons-là d'indicateurs domestiques, la Chine n'est pas un pays si ouvert que ça. Ils sont plusieurs milliards, c'est un pays assez fermé. Lorsque l'on regarde les sources de croissance, les exportations n'y comptent pour pas beaucoup, c'est essentiellement l'investissement et l'épargne domestique qui viennent la nourrir. La part des échanges n'est pas si importante que cela. D'ailleurs, ils n'ont pas de vraie stratégie internationale.

L'immobilier est à 100% domestique par exemple. Quand les Chinois se posent des questions internationales, ils pensent à l'internationalisation du Yuan, ou encore à l'interaction avec Hong-Kong, Taiwan. La concurrence que peut poser le Japon aussi évidemment, car cela fait 3 ans que les Japonais ont dévalué de 50%. Au-delà du commerce extérieur, la question que la Chine se pose est surtout de savoir comment faire repartir l'économie, sachant qu'il n'y a pas d'inflation et qu'ils disposent par conséquent d'une marge de manœuvre monétaire qu'ils utilisent peut être pas encore assez.

Comment ils peuvent essayer de s'organiser pour que le PIB nominal ne chute pas trop ? Il y a 10 millions de personnes qui vont arriver sur le marché du travail, il faut les caser. En Chine, la dette privée est de 185% du PIB, cela serait très embêtant d'avoir une inflation négative. Quand ils dévaluent ils ralentissent le processus de transition, le fameux big-bang financier, à savoir l'internationalisation du Yuan.

Philippe Waechter : Lorsque le dollar a commencé à grimper en juin 2014, chacun a du s'y habituer ; lorsque l'euro s'est déprécié à partir de l'automne 2014, la BCE n'a pas justifié sa stratégie au-delà de la nécessité de donner une impulsion dans la durée à l'économie de la zone Euro. Les Chinois feront la même chose. Ils n'auront pas à se justifier au-delà des nécessités liés à leur marché interne.

Les Chinois ont, en outre, modifié le mode de cotation de leur monnaie, donnant aux mécanismes de marché un rôle plus important. Cela ils peuvent le justifier via le souhait qu'ils ont d'ouvrir leur marché des capitaux et le besoin d'un yuan convertible.

D'autres effets, réactions ou événements sont ils à craindre au cours des prochaines semaines ou des prochains mois ? Comment se prémunir d'une aggravation de la situation ?

Scott Sumner : Le plus grand danger est le ralentissement de l’économie mondiale. Ce ralentissement a plusieurs causes, aussi bien structurelles que monétaires. Mais à court terme, c’est la politique monétaire qui pose le plus grand risque. Les banques centrales mondiales ne se sont pas adaptées à un environnement de taux bas. Elles se sont constamment trompées sur la situation, en pensant que la politique monétaire était expansionniste alors qu’elle était bien trop restrictive pour les besoins de l’économie. Bizarrement, ceci est presque la situation opposée des années 70, quand les taux élevés étaient faussement perçus comme restrictifs, alors même que l’inflation progressait pour atteindre un niveau à deux chiffres.

Le second problème est une confiance excessive sur le contrôle des cours de change, aussi bien pour les taux fixes, comme pour le Yuan chinois (jusqu’à récemment) ou pour la structure unique de l’euro, qui s’est révélée si dommageable pour nombre de pays qui n’auraient jamais dû rejoindre l’union monétaire. Pensez au terme de "guerre des changes", qui a une connotation négative. Car en fait, comme cela a été le cas au cours des années 30, une guerre des changes internationale serait le signal qu’une reprise économique mondiale est en train de commencer.

Mathieu Mucherie : Ici, on parle la responsabilité des européens, et surtout de la BCE. La BCE ne doit pas trop se préoccuper de ce que font les uns et les autres, elle doit se dire qu'il n'y a pas d'inflation en zone euro. Cette année nous allons réaliser 0,3, l'objectif étant d'être à 2% par an. Donc elle a une marge de manœuvre considérable sur les dépenses monétaires. Renforcement de la forward guidance, par exemple. Cela faisait partie de la communication de Draghi. Ensuite on peut laisser entendre qu'il y aura un deuxième quantitative easing après le premier, au-delà de septembre 2016, ce qui est déjà un petit peu sous-entendu par Draghi. On peut aller beaucoup plus loin dans la baisse des taux d'intérêts par exemple. On a une facilité de dépôt qui est à -0,2. Pourquoi ne pas la mettre à -0,7 ou -0,9 comme les Suisses ou les Suédois ?

Sans aller jusque-là, on peut faire beaucoup pour retrouver une sorte de neutralité monétaire. C'est important car il ne s'agit pas de faire baisser l'euro pour faire baisser l'euro. L'idée n'est pas de gagner des parts de marchés ou autres. Même à indice, l'euro est vraiment cher. Il y a moyenné à 1,40 pendant des années, et si on voulait retrouver une forme d'équilibre, il faudrait être à 1,80 € contre le dollar pendant 3-4 ans. Tant qu'on n'y est pas, on est trop cher, et cela ne veut pas uniquement dire que nos produits sont trop chers, mais que notre main-d'œuvre est aussi trop chère, tout comme nos actifs financiers. Ce qui me stupéfie, c'est qu'on a eu recours au quantitative easing le 22 janvier. Depuis, les actifs européens ont suivi un cheminement pas vraiment grandiose. On a gagné 15%... Quand on a recours à du quantitative easing attendu depuis 6 ans, on s'attend au triple. On s'attendait à une réaction plus japonaise, plus américaine. Le fait qu'on ne constate pas d'importants mouvements boursiers cette année, alors qu'on a balancé des milliards d'euro dans la machine, montre qu'il va falloir aller plus loin. 

Philippe Waechter : La situation immédiate n'est pas dramatique mais reflète l'incapacité des grands pays à retrouver une allure de croissance robuste. La vraie question est là et elle doit être au cœur des réflexions. Chaque pays essaie de trouver une réponse: les Chinois comme les autres. La dévaluation est cette réponse.

Le point auquel il faudra être attentif est la réaction des hommes politiques américains. Il y a quelques années, la trop faible valeur de la monnaie chinoise avait provoqué des tensions fortes entre les deux pays car la désindustrialisation des Etats-Unis au bénéfice de la Chine était mise en avant. Il ne faudrait pas revenir sur ce type de tensions. Cela ne serait bénéfique pour personne, pourtant on a déjà observé des sénateurs influents et des candidats à la prochaine élection présidentielle américaine pointer du doigt vers la Chine en expliquant que toutes les difficultés venaient de Chine. C'est un peu facile mais cela pourrait envenimer les relations entre les deux pays. L'enjeu est au-delà de cela; il est dans la capacité à trouver une trajectoire de croissance plus élevée.

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