Contrôle des loyers : retour au Moyen-Âge économique<!-- --> | Atlantico.fr
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Le contrôle des loyers est une des rares choses sur laquelle les économistes sont presque tous d'accord.
Le contrôle des loyers est une des rares choses sur laquelle les économistes sont presque tous d'accord.
©Reuters

Le nettoyeur

Cette semaine, le "nettoyeur" Pascal Emmanuel Gobry, fait voler en éclat l'idée reçue selon laquelle on pourrait régler la crise du logement par le contrôle des loyers, comme le souhaiterait Cécile Duflot.

Pascal-Emmanuel Gobry

Pascal-Emmanuel Gobry

Pascal-Emmanuel Gobry est journaliste pour Atlantico.

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Cécile Duflot, le nouveau ministre du Logement, a une idée géniale pour mettre fin à la crise du logement : le contrôle des loyers. La réaction de l'observateur impartial ne peut être que le désespoir face à l'inculture économique complète de nos dirigeants politiques et l'urgence de solutions nouvelles.

En effet, le contrôle des loyers est une des rares choses sur laquelle les économistes sont presque tous d'accord. L'économiste Paul Krugman, Prix Nobel et fortement ancré à gauche, reprenait déjà dans une chronique célèbre la citation d'Alan Blinder : “Les économistes ont le moins d'influence sur la politique sur les sujets où ils savent le plus et sont le plus d'accord, et en ont le plus sur les sujets où ils en savent le moins et sont en fort désaccord”, relevant que dans un sondage, 93% des économistes américains sont opposés à tout contrôle des loyers. 93% ! L'économiste suédois et socialiste Assar Lindbeck a eu ce mot mémorable : le contrôle des loyers est le moyen le plus efficace de détruire une ville, avec le bombardement.

Les économistes se disputent sur de nombreuses choses. L'économie est loin d'être une science exacte. Il y a de nombreux sujets très difficiles : la crise de l'euro, la bonne politique fiscale ou monétaire face à une crise financière. Là dessus, les opinions diffèrent, et on peut être en désaccord avec tel ou tel grand économiste tout en restant parfaitement respectable et cohérent avec les bases de l'économie.

Le contrôle des loyers est un sujet différent. Le contrôle des loyers est un peu à l'économie ce que le créationnisme est à la biologie ou ce que le révisionnisme est à l'histoire : un point de vue qui est quasi unanimement rejeté par les scientifiques de la discipline en question.

Mais, il y a bien une crise du logement, en France, non ? Les prix sont trop élevés, non ? Il faut bien faire quelque chose !

Certes. Le marché du logement en France est à l'image de la plupart des marchés : surréglementé pour priviliégier des castes particulières.

Pour comprendre le logement, les bases de l'économie sont encore utiles : le prix est déterminé par l'offre et la demande. La demande augmente au fur et à mesure que la population augmente. Par contre l'offre est maintenue fixe par de nombreuses réglementations - plans locaux d'urbanisme, coefficients d'occupation des sols, limites de taille des bâtiments... - qui font qu'il y a un stock fixe de logements. Donc les prix augmentent. Il est impossible de revenir sur ces réglementations, en partie à cause de l'inculture économique, et surtout parce que les bénéficiaires de ces réglementations sont les propriétaires fonciers, qui verraient leur patrimoine et donc leur rente diminuer.

Rajoutons à cette injustice le fait qu'il est très difficile pour un propriétaire d'expulser un locataire, ce qui naturellement fait que les propriétaires ont très peu envie de louer leurs appartements, ou alors uniquement à des conditions exorbitantes (revenus de plusieurs multiples, garanties diverses, etc.). Le mécanisme est le même que sur notre marché du travail.

Nous avons donc une situation où aucun “camp” idéologique ne peut régler le problème. La droite verrait une levée de bouclier de son électorat bourgeois et rentier si elle déréglementait le marché. La gauche est prisonnière de ses oeuillères idéologiques et de divers groupes de pressions.

C'est donc la faute de personne et la faute de tout le monde, dans un mélange de logique ubuesque et d'intérêt général capté par des intérêts particuliers. Rien ne change. Et ceux qui perdent sont les “petits” : ceux qui veulent se loger convenablement, ceux qui veulent accéder à la propriété. Bref, nous sommes en France.

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