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Sabordage : comment la France détruit sa propre puissance économique
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Bonnes feuilles

Il attaque preuves à l’appui. Christian Harbulot documente sur ce qui ronge peu à peu la position économique et politique de la France. Extrait de "Sabordage - Comment la France détruit sa puissance", publié chez François Bourin Editeur (1/2).

Christian Harbulot

Christian Harbulot

Christian Harbulot est directeur de l’Ecole de Guerre Economique et directeur associé du cabinet Spin Partners. Son dernier ouvrage :Les fabricants d’intox, la guerre mondialisée des propagandes, est paru en mars 2016 chez Lemieux éditeur.

Il est l'auteur de "Sabordages : comment la puissance française se détruit" (Editions François Bourrin, 2014)

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Les élites françaises font profil bas devant la mondialisation. Elles n’ont pas envie de se battre et reproduisent à leur manière l’inertie stratégique du politique. Il est donc vain de leur demander d’intégrer la conflictualité de l’économie dans leur grille de lecture. L’expert américain Edward Luttwak, connu pour ses travaux au Centre d’études stratégiques et internationales de Washington, a bien mis en avant ce concept pour souligner les défaillances de la puissance américaine dans les affrontements géo-économiques de l’après-guerre froide. Mais les écrits de Luttwak ont une portée très marginale dès que l’on franchit l’Atlantique. Peu d’auteurs français ont relayé son propos. La prédominance d’une lecture économiste en phase avec les dogmes des textes académiques anglo-saxons bloque toute possibilité de relire l’Histoire en prenant en compte la manière dont certaines puissances se sont construites sur la base d’une économie de combat. L’École de Guerre Économique (EGE), positionnée à Paris, est la seule structure au monde à avoir entrepris depuis 1997 une recherche appliquée à la guerre économique.

Contrairement à des pays comme les États-Unis, le Japon, la Corée du Sud ou la Chine, la France n’a pas su créer un minimum d’unité nationale sur ce sujet. La distance culturelle que l’administration a toujours adoptée à l’égard du secteur privé a pesé sur cette absence de connivence nationale pour sortir victorieux d’une compétition avec des puissances étrangères. Paradoxalement, il existe une culture française de la défense économique du territoire qui remonte à Colbert. Elle s’est forgée dans la continuité du rapport paysan à la terre et que l’on peut exprimer par la formule : ne pas se faire grignoter ou voler son champ par le voisin. La valeur symbolique de la propriété foncière a déteint sur les autres formes de propriétés (immobilière, industrielle) pour aboutir à la notion de patrimoine qui est désormais une base de référence consensuelle pour l’ensemble de la population. Elle est devenue la préoccupation prioritaire de l’appareil d’État qui la décline au sein du ministère de l’Intérieur dans les missions de protection du patrimoine assurées par les services spécialisés de la police et de la gendarmerie.

Le réflexe du repli sur soi

L’accent mis sur la protection du patrimoine a favorisé une approche très individualiste des rapports de force économiques. Pour la majorité des corps de métiers et des créateurs de manufactures, la préoccupation première a toujours été la défense de leurs biens. Les révolutions industrielles ont imposé la nécessité de se projeter vers l’extérieur pour conquérir de nouveaux marchés sans pour autant révolutionner les relations entre l’État et le secteur privé. La question de la puissance a toujours été associée à la notion originelle du pré carré. La garantie de l’intégrité du territoire l’a toujours emporté sur la nécessité d’enrichir la France.

Le regard autocentré de l’administration

Au cours des siècles, l’administration a pris l’habitude de traiter les menaces économiques à travers les risques d’invasion puis de dysfonctionnement des fonctions vitales de l’État. En revanche, le positionnement de l’économie nationale sur l’échiquier mondial n’a jamais été clairement défini en termes de problématique de puissance.

L’économie relève du secteur privé, la gestion de l’intérêt général est l’affaire de l’État. Cette séparation des rôles interdit tout lien dialectique entre le développement d’un pays et les besoins d’un État pour remplir ses missions. Cette réalité bien française entretient la philosophie du repli sur soi qui est caricaturée par cette formule : les patrons d’un côté, les fonctionnaires de l’autre. Cet immobilisme culturel n’est pas sans conséquences. Les acteurs économiques des territoires n’attendent plus de réponse stratégique du pouvoir politique et de l’État. Jean Michel Treille fait le constat que les plus créatifs d’entre eux essaient de dépasser le stade de survie économique en créant de nouvelles dynamiques de développement. Ils pensent global pour se projeter sur les marchés extérieurs tout agissant en local pour s’ancrer durablement au territoire de leur choix. Ces acteurs économiques cherchent à construire des réseaux de confiance très resserrés sur leur cadre de vie afin de préserver leur activité économique.

Extrait de "Sabordage - Comment la France détruit sa puissance", de Christian Harbulo, chez François Bourin Editeur, 2014.

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