Comment et pourquoi Mélenchon a piqué le mot "patriote" à Marine le Pen<!-- --> | Atlantico.fr
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Jean-Luc Mélenchon s'est déclaré candidat à l'élection présidentielle de 2017.
Jean-Luc Mélenchon s'est déclaré candidat à l'élection présidentielle de 2017.
©Reuters

Au voleur !

C’est un mot qui vaut de l’or. En effet, on peut le loger facilement dans tous les râteliers.

Benoît Rayski

Benoît Rayski

Benoît Rayski est historien, écrivain et journaliste. Il vient de publier Le gauchisme, maladie sénile du communisme avec Atlantico Editions et Eyrolles E-books.

Il est également l'auteur de Là où vont les cigognes (Ramsay), L'affiche rouge (Denoël), ou encore de L'homme que vous aimez haïr (Grasset) qui dénonce l' "anti-sarkozysme primaire" ambiant.

Il a travaillé comme journaliste pour France Soir, L'Événement du jeudi, Le Matin de Paris ou Globe.

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Je suis allé une fois, une seule, sur le site du Parti de Gauche. Une seule fois car l’ennui qui s’en dégageait était rédhibitoire. De ce fait, je l’avoue, je ne suis pas très bien informé de toutes les évolutions politiques et sémantiques de Jean-Luc Mélenchon. Mais je vais régulièrement, et pour les meilleures raisons du monde, sur Causeur un site voisin et ami d’Atlantico. Et c’est de là qu’enfin la lumière est venue.

J’y ai trouvé une passionnante et révélatrice interview de Jacques Sapir. Cet économiste a le mérite de n’avoir jamais trompé son monde : il est en guerre contre Bruxelles, contre l’euro et contre les "européistes". Un engagement qu’il revendique haut et fort dans l’entretien. Mais en y apportant une touche supplémentaire et intéressante.

Jacques Sapir se dit partisan de "l’union de tous les fronts" contre l’euro maudit et l’Europe sous tutelle germanique. "Tous les fronts" ? Front de Gauche et Front National côte à côte ? La réponse est oui. Jacques Sapir envisage sérieusement, en pesant ses mots, un rapprochement avec le parti de Marine Le Pen. En bon marxiste qu’il fût (qu’il est toujours ?) l’économiste reprend à son compte la théorie de "l’ennemi principal" forgée par Karl Liebknecht en 1915. Contre "l’ennemi principal" les autres ennemis (secondaires) peuvent devenir des amis.

De tous les arguments de Sapir, le plus frappant est celui-ci : "même Jean-Luc Mélenchon appelle à l’union de tous les patriotes". "Patriotes", le mot est lâché. Nul ne peut ignorer qu’il a été préempté depuis de longues années par Marine Le Pen. Elle n’a pas envie – et on la comprend – d'être d extrême droite. Et "patriote" c’est tellement mieux…La preuve c'est que Mélenchon l’a compris et a fait sien le répertoire langagier du Front national.

Ce mot, béni des dieux, a toujours servi en France de cri de ralliement contre l’étranger, envahisseur réel ou supposé. Pendant la Révolution française il est à son apogée lors de la bataille victorieuse de Valmy remportée sur les Prussiens et les Autrichiens. Puis, après une relative éclipse, il retrouvera une nouvelle jeunesse au tournant du XIXème et XXème siècle.

La Ligue des Patriotes de Déroulède monte au front contre l’Allemagne et surtout contre l’occupant juif incarné par la figure du capitaine Dreyfus. Lui succédera le Parti des Patriotes de Taittinger qui a également pour ennemi principal les Juifs. Pendant l’Occupation, le partage est plus équitable. Les résistants sont patriotes contre l’occupant allemand. Vichy est patriote contre l’envahisseur "judéo-communiste".

Il faudra attendre Marine Le Pen, Jacques Sapir et Jean-Luc Mélenchon pour que ce mot devienne enfin le symbole d’une touchante union nationale. Tous ensemble contre Angela Merkel, l’affreuse Prussienne ! Tout ensemble, extrême droite et extrême gauche réunis ! Et puis non ! Le mot extrême droite est à bannir puisqu’il a été banni par Marine Le Pen. Patriote, c’est tellement, tellement plus chic…

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