Code du travail, la réforme qui fait pschitt…<!-- --> | Atlantico.fr
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La ministre du Travail Myriam El Khomri a présenté à Manuel Valls ses propositions dans le cadre d'une réforme du code du travail.
La ministre du Travail Myriam El Khomri a présenté à Manuel Valls ses propositions dans le cadre d'une réforme du code du travail.
©Reuters

Révisions

Mercredi 4 novembre, la ministre du Travail Myriam El Khomri a présenté à Manuel Valls ses propositions dans le cadre d'une réforme du code du travail, que le Premier ministre a annoncée pour 2018. Mais au vu et au su des limites d'ores et déjà posées par le président de la République, il est peu probable que cette réforme soit particulièrement ambitieuse.

Jean-Yves Archer

Jean-Yves Archer

Jean-Yves ARCHER est économiste, membre de la SEP (Société d’Économie Politique), profession libérale depuis 34 ans et ancien de l’ENA

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Depuis plusieurs mois, l'actualité économique et sociale est traversée par la question de la réforme du Code du Travail. Emissions télévisées, colloques divers, prises de position des parlementaires se succèdent.

Depuis trois mois, le rythme avait semblé s'accélérer et gagner en intensité : notamment du fait des apports de Robert Badinter et du Professeur Lyon-Caen puis du rapport Combrexelle.

A la lumière de tout ce bruit et de toutes ces contributions, les opérationnels en poste au sein d'une DRH ou les petits entrepreneurs se disaient que des réponses simples et cohérentes allaient être, dans un délai raisonnable, apportées à une série de questions assez simples à énoncer mais délicates à résoudre.

1 ) En cas d'effondrement de mon carnet de commandes, serais-je en capacité de licencier plus aisément ?

2 ) La refonte du Code le rendra-t-elle plus digeste et plus lisible ?

3 ) La question de la durée du travail va-t-elle être clarifiée donc simplifiée ?

4 ) Y aura-t-il une cohérence entre la politique de l'offre (meilleure maîtrise des coûts du travail) issue du Pacte de responsabilité et les questions de rémunération légalement encadrées ?

5 ) La lutte contre les discriminations va-t-elle mieux se définir juridiquement ?

6 ) Le SMIC sera-t-il régionalisé pour tenir compte des disparités de pouvoir d'achat ?

Mais la France n'est pas une démocratie au maniement simple : la sphère politique n'est pas forcément au service des problématiques des acteurs de terrain.

Ainsi, le Président Hollande a énoncé trois sortes de lignes rouges par définition infranchissables : contrat de travail, SMIC et 35 heures.

Évidemment cela limite considérablement l'ampleur de la réforme que bien des observateurs qualifient désormais de "mesures a minima".

A l'inverse, la loi Macron ou les avatars récemment subis par les textes fiscaux rapportent sans aucun doute notre capacité collective à rendre les situations de droit bien plus complexes que requis.

Il y a donc fort à parier que ce que Manuel Valls a appelé la réécriture du Code du Travail ne se scinde en deux grands ateliers. D'une part, un toilettage et une simplification à droit constant ou quasi-constant ce qui revient à une réforme qui en a le nom mais guère l'ambition. Une réforme Canada Dry.

D'autre part, l'insertion d'une sorte de préambule au Code qui décrirait les "principes généraux du Droit du travail" pour ainsi s'adosser aux vœux de Robert Badinter qui rêve de s'ériger au rang de feu René Cassin en matière de droits de l'homme (déclaration de 1948).

Concrètement, cela donnera un texte global d'inspiration bicéphale où l'instabilité de la construction textuelle sera, bien souvent, soumise à l'appréciation contrastée et variable des magistrats.

Le Doyen Jean-Jacques Dupeyroux a toujours milité pour un droit du travail équilibré et respectueux du salarié. Dans le projet de grande réforme qui fait "Pschitt" et dont Manuel Valls en personne a fixé le terme en 2018 (oui, dans près de 3 ans...), on sera davantage sous l'emprise intellectuelle des jurisprudences de la chambre sociale de la Cour de Cassation alors présidée par le Doyen Philippe Wacquet.

Autant dire que pour l'heure, nous n'avons aucune garantie quant à la pertinence des réponses apportées aux questions que se posent salariés et employeurs.

De surcroît, l'avenir ne paraît pas devoir s'inscrire sous le signe de la stabilité législative ni de la lucidité économique qui commande de réfléchir, dès à présent, aux forts coups de canif que l'ubérisation de la vie sociétale implique pour la forme dominante qu'est le salariat.

La France n'a pas besoin d'une statue (Le penseur de Rodin ? Par exemple non fortuit...) en guise de nouvelle codification des rapports sociaux. Son monde du travail a besoin d'action et de solutions : deux mots que l'on voit – hélas - mal dans le contour que l'Exécutif vient de fixer.

Et dire que des millions de personnes seraient favorables à ce que les accords se définissent au niveau de l'entreprise sous réserve d'une conformité avec les branches ramenées de près de 700 à 50 comme en Allemagne.

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