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Une infirmière prépare une dose du vaccin Pfizer / BioNTech Covid-19 dans un centre de vaccination installé dans le hall d'exposition de Nantes, le 9 avril 2021.
Une infirmière prépare une dose du vaccin Pfizer / BioNTech Covid-19 dans un centre de vaccination installé dans le hall d'exposition de Nantes, le 9 avril 2021.
©LOIC VENANCE / AFP

Atlantico Business

Dans un pays suradministré comme la France, il faudra reconnaître que ceux qui auront fait gagner la campagne de vaccination n’appartiennent pas à l’Etat et ont du très souvent se battre contre l’Etat central.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

Il est aussi l'auteur du blog http://www.jeanmarc-sylvestre.com/.

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A partir de demain mardi, la vaccination sera donc ouverte à tout le monde sans priorité, dès plus de 18 ans, même si la campagne de sensibilisation insiste encore beaucoup pour vacciner le plus possible les personnes à risque de plus de 50 ans. Le président de la République, lui-même, a annoncé le nouvel agenda en ouvrant un vaccinodrome à la porte de Versailles dans les locaux du centre des Expositions.

Sauf incident ou bug, l’objectif d’avoir 20 millions de personnes vaccinées au 15 mai sera atteint, on sera sans doute à 30 millions à la fin juin. Ce qui nous conduira vers les 50 millions de vaccinés à la fin du mois d’août. Compte tenu de tous ceux qui ont eu le Covid et qui doivent être équipés d’anticorps, la France devrait approcher de l’immunité collective à partir du mois de septembre et du coup, le pays pourrait retrouver une vie normale à condition de continuer à se protéger des risques de contamination venant de l’extérieur.

Ce qui est extraordinaire dans cette bataille engagée depuis le début, c’est que l’Etat et son administration, y compris l’administration de la santé, n’en sortiront pas grandis. Les véritables artisans de cette bataille n’appartiennent pas à l'Etat central. On a beaucoup rendu hommage au personnel hospitalier qui, dans les moments les plus chauds, ont su assumer les problèmes. On ne pourra pas en dire autant aux administrations de gestion dans le système de santé, y compris au niveau ministériel. La classe politique a fait de la politique, sans jamais proposer de solutions alternatives cohérentes et responsables. Elle s’est épuisée dans des débats sans intérêt, avec des médecins spécialistes, qui ont trop souvent tourné à des batailles d’ego.

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Emmanuel Macron a compris tout cela, puisque depuis quelques mois, il a eu le courage de laisser les initiatives privées se développer et venir compenser les défaillances du service public.

Si la campagne de vaccination se déroule correctement et atteint son objectif, nous le devrons à des hommes de l’ombre plus préoccupés du résultat que des moyens engagés. Des hommes (et des femmes), beaucoup plus habités par l’esprit d’entreprise que par l’esprit de service public à la française. A toutes les étapes de cette campagne, on trouve des hommes issus du privé.

1er point : l’approvisionnement en vaccins a semé son lot d’inquiétudes au départ, quand on s’est aperçu que d’avoir confié à la Commission européenne le soin de négocier les contrats pour l’ensemble des pays membres de l’Union risquait de ne pas permettre d’avoir les doses nécessaires. Aujourd‘hui, la situation est sécurisée depuis que la Commission a confié les négociations au Commissaire français Thierry Breton, qui a donc pris les choses en main en discutant pied à pied avec les dirigeants de Astra Zeneca et surtout de Pfizer. Et aussi en démarrant les contrats de production en Europe, qui vont permettre des livraisons beaucoup plus importantes. A la manœuvre, Thierry Breton, qui a retrouvé tous les réflexes du chef d’entreprise avec le soutien conjoint de la France et de l’Allemagne.  A noter qu’en demandant la levée des brevets, Joe Biden a failli faire tout capoter et retarder. Le dernier sommet européen, ce week-end, a, de façon habile, enterré le projet parce qu‘il ne permettait évidemment pas de sécuriser les produits. Au contraire, il ouvrait la porte à la contrefaçon. La France et l’Allemagne, qui avaient ouvert ce dossier sous la pression politique, se sont empressées de le refermer pour laisser Thierry Breton travailler. 

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2e point. Les livraisons sous haute précaution et haute protection ont été, à la demande conjointe des laboratoires et de Thierry Breton, confiées à des sociétés privées spécialisées dans le transport à très basse température, parce qu’il y avait assez peu d’équipement de super congélation.

3e point. L’initiative d’un certain nombre de maires, de présidents de région, a permis de faire éclater le bunker du ministère de la Santé qui s’opposait à la décentralisation des lieux de vaccination. On pense à Philippe Gougeon, dans le 15e arrondissement, à Rachida Dati dans le 7ème, à David Lisnard à Cannes ou à Christian Estrosi. Ceux-là et d’autres ont fait un bras d’honneur au ministère de la Santé pour démarrer la vaccination. Les maires ont donc ouvert les premiers centres, puis les pharmaciens et les médecins.  

4e point, très important, l’arrivée de Doctolib et d’autres plateformes dans le jeu a tout changé. Doctolib, un site qui propose un secrétariat aux médecins libéraux et qui a été créé par Stanislas Niox-Château, est devenu le champion en Europe de la prise de rendez-vous médical. Énorme succès dans le monde digital, énorme succès dans le monde médical qui a modernisé la gestion des cabinets. Doctolib a donc pris l’initiative de proposer de gérer les  rendez-vous pour les centres de vaccination. Tous les centres de vaccination, privés et publics, ont accepté. La fréquentation est considérable. Au 17 mai, Doctolib aura géré 20 millions de rendez-vous en deux mois et ça va évidemment continuer.

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Mais ce n’est pas tout, le site « Vite ma dose » propose de recenser les centres de vaccination où il reste des doses de vaccins et renvoie automatiquement sur Doctolib pour prendre le rendez-vous. Cela en temps réel et sur tout le territoire.

Ce site « vite ma dose », on le doit à Guillaume Rosier, étudiant de 24 ans sans compétences particulières en épidémiologie et devenu une star du digital.

C’est lui qui avait déjà conçu le Covid Tracker, dont les résultats ont permis de visualiser la progression de l’épidémie.

En bref, il fait, avec sa toute petite équipe de développeurs, ce que les troupes nombreuses de l’administration ont été incapables de mettre en place. Parce qu’on ne peut pas dire que la stratégie de départ, qui était pourtant logique et qui consistait à tester, puis tracer, puis isoler, ait été une réussite. La France, avec tout son génie, a été incapable d’organiser le traçage et donc la circulation du virus. L’application Stop Covid a plutôt été un échec.

Les initiatives privées réussiront peut-être à la réveiller, en attendant Doctolib et « Vite ma dose » ont fait le job de rendre réalisable une campagne de vaccination de masse, en France.

5e point : pour être complet et parce que la vaccination ne suffira pas pour se protéger complètement du virus, il faut noter qu’après les masques, qui avaient eu déjà du mal à arriver en France, la question du testing sera en partie réglée grâce aux tests antigéniques réalisables par les patients eux-mêmes. Les auto tests, qui donnent des résultats quasi- immédiats et qui sont utilisés depuis presque un an dans de nombreux pays, ont pu être distribués et autorisés en France il y a à peine un mois, à l’issue d’un bras de fer entre  l’administration centrale et une startup, Just à temps, qui les avaient « sourcés » et qui ne parvenait pas à les faire appliquer. Avec le soutien du mouvement Ethic, un groupement patronal et l’énergie de sa présidente Sophie de Menthon, le patron de Just à temps, Didier Riahi, a réussi à convaincre Rachida Dati, qui a été la première maire à en comprendre l’intérêt et à l’imposer dans sa mairie, puis ensuite à le rendre accessible aux entreprises qui veulent offrir à leurs salariés des tests rapides et efficaces. 

Didier Riahi n’est pas le seul à devoir croiser le fer avec l’administration pour avancer. Il existe bien d’autres industriels, fabriquant des masques, des tests, des gels hydro-alcooliques, des vêtements spéciaux, des revêtements, des purificateurs d’air, des respirateurs etc… et qui attendent leur agrément.

L’agrément d’une autorité de santé est incontournable, certes, pour garantir la sécurité de la population, mais quand cette autorité devient trop lourde et lente, quand les responsables politiques ont de mal à prendre des décisions, parce qu‘elles sont respectueuses du principe de précaution, le système devient toxique. 

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