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Ces pays dont la France pourrait s’inspirer pour se désendetter
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Marche à suivre

La Cour des comptes et la Commission européenne se montrent très critiques à l'égard des déficits français (public et souverain). Certains pays étrangers ont réussi à assainir leurs finances publiques. La France est-elle en mesure de suivre leur exemple ?

Norbert Gaillard

Norbert Gaillard

Norbert Gaillard est économiste et consultant indépendant.

Sa thèse, rédigée à Sciences Po Paris et à l’université de Princeton, portait sur les méthodologies de notation souveraine. Il a été consultant pour l’International Finance Corporation (IFC), l’État de Sonora (Mexique), l’OCDE et la Banque mondiale.

Il est l'auteur de Les agences de notation (La Découverte, 2010) et de A Century of Sovereign Ratings (Springer, 2011).

 

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  1. Atlantico : La Cour des comptes et la Commission européenne ont dressé un constat très critique à l'égard des déficits français (public et souverain). Pourtant, certains pays étrangers ont réussi à assainir leurs finances publiques (le Canada est un exemple frappant dans les années 90, il y a eu aussi l'Australie ou les pays du Nord de l'Europe.... et aussi l'Allemagne plus récemment). Quelles ont été les méthodes employées ?

Norbert Gaillard : Depuis les années 1980, plusieurs types de mesures ont été mises en œuvre dans les Etats industrialisés en vue de rétablir les comptes publics.

Entre 1993 et 2000, la Suède et la Finlande ont réduit leurs dépenses publiques de près de 15% de leur PIB. Cela est passé par une réduction du nombre de fonctionnaires, une diminution des transferts de l’Etat central vers les collectivités locales, une réduction, voire une suppression de certaines subventions. Des plafonds de dépenses ont été également instaurés. Enfin, une grande réforme du marché du travail a eu lieu dans ces deux pays. Les résultats ont été spectaculaires. La Finlande passe en sept ans d’un ratio déficit budgétaire/PIB de 7% à un excédent budgétaire/PIB de 7% ! La Suède, qui était confrontée à un déficit budgétaire de 13% en 1993, revient à l’équilibre dès 1997 ! Le Canada a pris des mesures similaires dans les années 1990.

En Allemagne, les lois Hartz de 2003-2005 ont contribué à une profonde réforme du marché du travail : on a assisté à une simplification des procédures d’embauche, à un développement des formations professionnelles et à une réduction de la période d’indemnisation chômage.

  1. Certaines réformes ont-elles été mises en place dans l'ensemble de ces pays ? Ont-elles systématiquement fait mouche ?

Les réformes du marché du travail sont une constante. Elles ont permis de réduire le taux de chômage dans ces quatre pays mais le succès est loin d’être éclatant. La Finlande, La Suède et le Canada ont un taux de chômage encore assez élevé (près de 7,5%). Le taux de chômage allemand est lui nettement plus bas à 5,6%, mais de nombreux travailleurs pauvres sont apparus, un peu comme aux Etats-Unis. Malgré tout, ces pays font mieux que la France (10%).

Il faut également souligner que les plans de retour à l’équilibre budgétaire qui ont réussi durant ces dernières décennies étaient essentiellement fondés sur des réductions des dépenses publiques et non sur des augmentations des recettes fiscales.

  1. Outre la réduction du déficit, quel a été l'impact sur les populations (on parle beaucoup de l'Allemagne, mais la situation sociale n'est pas optimale, avec un nombre de travailleurs précaires très élevé) ? Sur la qualité des services publics ?

C’est une très bonne question. Globalement, la qualité des services publics a été améliorée. N’oublions pas que les quatre pays en question ont eu un Etat-providence relativement développé depuis l’après-guerre (surtout dans les cas suédois et finlandais).

Au Canada, les mesures de compression des dépenses publiques ont permis de réduire les gaspillages et de rationaliser le fonctionnement des services publics. En Suède, les résultats sont contrastés : les temps d’attente dans le secteur de la santé se sont accrus. En revanche, les divers services publics ont dû collaborer les uns avec les autres, ce qui a amélioré la qualité des prestations. En Finlande, la productivité a augmenté mais une partie des services offerts aux patients a basculé dans le privé.

Dernier point. En Allemagne, comme dans les trois autres pays, les agences pour l’emploi sont devenues plus efficaces et plus productives, ce qui explique partiellement que les taux de chômage soient inférieurs à la moyenne de l’OCDE (8,2%).

  1. La France peut-elle prendre ces pays comme exemple ?

La France devrait effectivement s’inspirer des mesures qui ont été prises dans ces pays. Je crois que les réformes entreprises en Suède méritent d’être étudiées de près. Il y a vingt ans, le modèle suédois était à l’agonie. De nombreux économistes considéraient alors que l’Etat-providence qui avait été « surdéveloppé » dans ce pays était condamné. Pourtant, en moins d’une décennie, les comptes publics ont été assainis et les services publics modernisés. Avec la Norvège, la Suède est le seul Etat noté AAA par les grandes agences de notation à avoir réussi à se désendetter depuis que la crise économique et financière a éclaté en 2007 ! C’est remarquable.

La France doit également améliorer sa compétitivité. Un récent rapport de la Commission européenne montre en effet que notre pays a perdu 20% de sa part de marché mondiale entre 2005 et 2010. C’est très préoccupant. La fiscalité française doit beaucoup plus soutenir la création d’entreprise et la recherche et développement (R&D).

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