Ces millions que tant d’entreprises flambent pour des solutions softwares que leurs salariés n’utilisent pas<!-- --> | Atlantico.fr
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Un homme utilisant un outil de visioconférence.
Un homme utilisant un outil de visioconférence.
©SAM WASSONGETTY IMAGES NORTH AMERICA Getty Images via AFP

Transformation

Selon une enquête menée auprès de millions d'entreprises dans neuf secteurs d'activité, sur plus de 30 outils logiciels populaires, 50 % de toutes les licences n'étaient pas utilisées. Cela représente un gaspillage de centaines de millions de dollars par an.

Caroline Diard

Caroline Diard

Caroline Diard est professeur associé au département Droit des Affaires et Ressources Humaines à la Toulouse Business School.

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Atlantico : Selon une enquête de Nexthink réalisée auprès de six millions de clients dans neuf secteurs d'activité, les entreprises gaspillent des millions en licences logicielles inutilisées. Sur plus de 30 outils logiciels populaires, 50 % de toutes les licences n'étaient pas utilisées. Le coût des licences inutilisées aurait coûté 45 millions de dollars aux entreprises chaque mois, ce qui représente chaque année près de 537 millions de dollars de logiciels gaspillés. Comment expliquer cette situation ? Quelle est l’ampleur des dépenses engagées ? Cette réalité est-elle la même pour les entreprises françaises ?

Caroline Diard : Cette problématique est en réalité assez ancienne et récurrente dans les entreprises. Cette situation s’explique par un défaut majeur. Ce problème n’a pas été analysé d’un point de vue global afin d’auditer les besoins des différents départements de l’ensemble des services de l’entreprise. Le fonctionnement va alors être en « silo », chaque service travaillant sur ses spécialités sans se soucier des autres. Cela sera la même chose pour les logiciels.

Par exemple un CRM (Customer Relationship Management) peut être utilisé par le service commercial alors même qu'un système de SIRH a été élaboré pour le département RH. Si les deux systèmes ne sont pas connectés, cela va conduire les entreprises à multiplier les dépenses. Il aurait été possible d’imaginer un système plus gobal avec une licence logicielle pour l'ensemble et des accès en fonction des besoins des utilisateurs.

Les dépenses engagées par les entreprises sur les licences logicielles qui ne sont pas utilisées sont aussi liées à un problème de communication. Il est primordial d'informer et de former les collaborateurs de l’entreprise sur les logiciels qu’ils peuvent utiliser et qui sont à leur disposition, comme Microsoft Teams ou autres. Cela va les inciter à les utiliser. Par exemple certaines entreprises utilisent Cisco Webex Meetings. qui nécessite une intervention pour connecter les salles. Les salariés ne sont alors pas du tout autonomes pour l’organisation des visioconférences peut faire perdre du temps. Les salariés découvrent parfois que d'autres possiblités existent comme Teams bien qu'ils n’aient pas été informés de cette possibilité. Une note est alors nécessaire pour indiquer qu’il n’est plus nécessaire de mobiliser le service informatique pour l’organisation des visioconférences mais qu’il est possible de recourir à tel ou tel outil de préférence. Une formation générale peut alors être organisée. Il s'agit d'un défaut de communication et du manque d’information sur les softwares accessibles au sein de l’entreprise.

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Pour certaines personnes au sein de l’entreprise, l’utilisation de logiciels peut aussi représenter une difficulté. Cela est généralement lié à un problème de formation. Ce défaut ne va pas inciter à utiliser les logiciels. La licence aura été payée par l’entreprise mais au final personne ne s’en servira.

Cela représente un important gaspillage pour les entreprises qui doivent débourser de fortes sommes.

Une autre explication concerne également les services informatiques qui ont parfois les yeux plus gros que le ventre. Leurs demandes sont parfois décorrelées du terrain. Dans beaucoup d’entreprises, plusieurs plateformes et systèmes cohabitent bien souvent. En ayant une seule plateforme ou en utilisant un logiciel unique, cela coûterait moins cher et permettrait ainsi de réaliser d’importantes économies.

Comment les entreprises pourraient-elles améliorer cette situation ? Est-il possible de réduire les dépenses sur les licences logicielles ou de mieux utiliser les ressources disponibles et ces softwares via le recours à la formation ?

La clé est de réaliser un audit sur ces questions. Cela va permettre d’effectuer un état des lieux et de cartographier la situation au sein de l’entreprise sur les licences logicielles qui sont à disposition des salariés.

Les systèmes informatiques des entreprises sont généralement construits par des successions d’équipes et alors que les besoins évoluent eux-mêmes. Ces demandes sont généralement adaptées aux clients, aux collaborateurs ou bien encore à la conjoncture. Cela contribue à empiler les systèmes alors que certains auraient pu être résiliés.

Pour réaliser des économies, il est vital de faire un état des lieux afin de se rendre compte réellement quelles sont les licences qui sont encore valables, quels sont les coûts et les utilisateurs de ces logiciels. Cela va permettre de découvrir que des frais sont engagés pour des licences logicielles dont personne ne se sert. Il sera alors possible de repenser et de changer les habitudes d’utilisation.

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Les entreprises engagent des frais et finissent en réalité par ne plus savoir quels sont les logiciels utilisés. Faire un état des lieux permet de voir ce qui est redondant ou obsolète et de procéder à une rationalisation des coûts.

Cette situation n’est-elle pas paradoxale lorsque l’on sait que certains outils comme Slack, Teams, Zoom ont tous été plébiscités par les entreprises, notamment lors de la pandémie de Covid-19 et suite au recours au télétravail ?

Avec le télétravail, le recours à l’informatique a été obligatoire. Cette étape a pu représenter un choc pour certains salariés qui ont dû s’adapter sur le plan informatique et pour les logiciels. Cela peut être déstabilisant. Certaines personnes ont même dû jongler entre différents logiciels (FaceTime, Teams ou Webex par exemple) en fonction de leurs entreprises ou des sites dont ils dépendaient. Dans une même structure, il peut y avoir des personnes qui vont utiliser des systèmes de visioconférences différents.

Les entreprises essayent maintenant d’uniformiser leurs pratiques et de choisir de n’utiliser qu’un seul logiciel. Cela va permettre de réaliser des économies. Les licences logicielles ont un coût important pour les entreprises et les services informatiques. Maximiser l’utilisation des logiciels est donc un atout qui peut s’avérer bénéfique.

Une autre méthode d’utilisation et un recours accru aux softwares pourraient-ils être bénéfiques pour les entreprises, notamment pour la productivité ?

Cela serait idéal. Il faut néanmoins que le fournisseur du logiciel accepte de faire évoluer le système sans un surcoût énorme. Les géants du secteur comme Apple ou Microsoft incitent à procéder à des mises à jour mais elles ont parfois tendance à dérégler l’utilisation de certaines tâches ou opérations. Les utilisateurs seront bloqués dans certains cas (impression de documents, partage de documents en visio). Leurs fournisseurs et les grandes marques incitent alors à effectuer une mise à jour alternative ou à télécharger un correctif, mais cette option est parfois payante. 

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