Bridgestone ne ferme pas son usine de Béthune à cause du Covid-19 mais de l’incompétence de ses dirigeants... <!-- --> | Atlantico.fr
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Bridgestone entreprise Béthune site usine pneus salariés emplois
Bridgestone entreprise Béthune site usine pneus salariés emplois
©DENIS CHARLET / AFP

Atlantico Business

La fermeture de l’usine de pneus de Béthune était inéluctable. En France, l’industrie peut difficilement survivre dans un contexte défavorable. Le comble, c’est que personne n’a voulu prévenir les salariés.

Aude Kersulec

Aude Kersulec

Aude Kersulec est diplômée de l' ESSEC, spécialiste de la banque et des questions monétaires. Elle est chroniqueuse économique sur BFMTV Business.

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Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Un coup dur pour le gouvernement. La tendance à la désindustrialisation l’emporte, encore une fois, sur les discours et la volonté gouvernementale. L’usine de Béthune, qui fabrique des pneus pour le fabricant de Bridgestone, ne résistera pas à la crise et va devoir fermer. Prévue pour 2021, la fermeture de cette usine devrait entrainer la perte de 863 emplois.

L’industriel japonais Bridgestone, évoquant une décision inéluctable, justifie sa décision par une surcapacité en Europe, contre une production asiatique à bas coût.

Après Michelin qui a fermé deux usines, l’année dernière, à la Roche sur Yon et Continental, qui, la semaine dernière à ferme son unité d’Aix-la-Chapelle.

On retombe donc dans les travers d’un coût du travail trop cher et d’une industrie impossible à maintenir en l‘état en Europe.

« Des problèmes de marché structurels nous amènent à prendre des mesures structurelles pour préserver la viabilité des opérations de l’entreprise » explique le Directeur Général en France de Bridgestone, Laurent Darboux.

Tout est dit, les problèmes sont structurels ce qui signifie qu’on ne pourra pas les résoudre.  Faute d'avoir été pris très en amont, ils sont désormais ingérables à court terme. Bridgestone était malade avant l’arrivée du Covid 19, les maladies ont été ignorées, cachées et niées. Le Covid 19 a mis l’entreprise par terre.

D’abord, et Bridgestone aurait dû le savoir, le marché européen a perdu son dynamisme il y a déjà deux ou trois ans. La crise n‘a pas redressé les tendances. Au contraire. Le marché automobile européen est définitivement beaucoup moins porteur. Bridgestone fabrique des pneus pour automobile. Et le secteur a été sinistré par la crise sanitaire et la mise en arrêt des économies. En Europe, le marché automobile s’est écroulé au premier semestre, de 40% et pour l’année, la baisse devrait être de 25%. Situation intenable.

Ensuite, et c’est la deuxième mutation qu il faut assumer, l’automobile est obligée de se réinventer, tout comme l’aéronautique. C’est exactement le même phénomène qui touche les constructeurs automobiles, comme Renault, qui faisait la course au volume mais qui a fait marche arrière dans sa nouvelle stratégie. Il y avait trop de capacités de production en France, trop d’usines et un marché difficilement profitable.

Enfin la compétitivité de l’industrie française reste toujours en deçà, même de ses voisins européens. Bridgestone possède d’autres usines en Europe, et notamment en Europe de l’est, dans d’autres pays de l’Union européenne. Des pays où les coûts de la main d’œuvre sont moins chers, mais où l’environnement fiscal est aussi plus attractif.

Toute l’ambition du gouvernement dans son plan de relance était pourtant de baisser les impôts de production de 10 milliards par an. Trop tard pour sauver Bridgestone, et très insuffisant pour beaucoup. Ces impôts de production sont deux fois plus élevés que la moyenne européenne.

Pour le gouvernement comme pour la région des Hauts de France, l’urgence des urgences serait donc d’améliorer l’écosystème fiscal avant même de booster et financer des investissements industriels. Si l’écosystème avait été favorable, l'attractivité permettrait de conserver des usines et épargnerait aux régions la nécessité d’investir.

Pour le président de la région Hauts de France, Xavier Bertrand, il faudra compenser cette perte et l’investissement, devra être significatif pour s’adapter à la réalité du marché du pneu. Un pneu haut de gamme, technologique et connecté et donc beaucoup plus sûr. Celui qui va créer de la valeur et qui va rencontrer de nouveaux besoins.

L’argumentaire tient la route. C’est exactement ce qu’il aurait fallu faire il y a cinq ans. Aujourd’hui, la question est de savoir ce qu‘il faut dire aux 863 salariés qui vont perdre leur emploi. On leur a déjà raconté tellement d’histoires qu’il va quand même falloir leur dire la vérité.

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