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Brexit : et Jeremy Corbyn profita du trouble des conservateurs pour lancer la campagne des législatives britanniques
©Niklas HALLEN / AFP

Disraeli Scanner

Lettre de Londres mise en forme par Edouard Husson. Nous recevons régulièrement des textes rédigés par un certain Benjamin Disraeli, homonyme du grand homme politique britannique du XIXe siècle.

Disraeli Scanner

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Benjamin Disraeli (1804-1881), fondateur du parti conservateur britannique moderne, a été Premier Ministre de Sa Majesté en 1868 puis entre 1874 et 1880.  Aussi avons-nous été quelque peu surpris de recevoir, depuis quelques semaines, des "lettres de Londres" signées par un homonyme du grand homme d'Etat.  L'intérêt des informations et des analyses a néanmoins convaincus  l'historien Edouard Husson de publier les textes reçus au moment où se dessine, en France et dans le monde, un nouveau clivage politique, entre "conservateurs" et "libéraux". Peut être suivi aussi sur @Disraeli1874

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Hughenden, 
Le 25 juillet 2018

Mon cher ami, 

Je suis au regret de constater que le leader de l’opposition, Jeremy Corbyn, comprend mieux les enjeux du Brexit que notre actuel gouvernement. Il a prononcé hier un discours fondamental à Birmingham, sous le titre programmatique “Build it in Britain”.. Evidemment, il y a eu quelques esprits fumeux pour accuser le chef travailliste de faire du Trump. Mais une fois la poussière de ces vaines polémiques retombée, il reste un constat: Jeremy Corbyn s’apprête à lancer la deuxième manche de son combat politique avec Theresa May. Et il s’y est soigneusement préparé. Il annonce clairement qu’il prendra le Brexit là où il en sera. Et qu’il lui donnera une suite: un plan ambitieux de réindustrialisation de la Grande-Bretagne. 
Nous en avons déjà parlé: il est frappant de voir combien le gouvernement de mon parti s’est enfermé dans un débat sur le libre-échange. Les Remainers  ou les Brexiteers craintifs parmi les conservateurs ne veulent pas saccager ce qu’ils croient être un acquis, le marché de l’UE. Les Brexiteers qui s’assument, parmi les Tories, sont au contraire prêts à une rupture rapide et coimplète avec l’Union Européenne, pourvu qu’il soit possible de signer de nouveaux accords de libre-échange avec les Etats-Unis, l’Inde, la Chine etc....
Cela fait deux ans que je tente d”expliquer à mes amis Brexiteers  parmi les Tories que le Brexit n’est pas seulement une question commerciale mais aussi une question de réindustrialisation. D’autres que moi ont eu du succès, au Labour, et Jeremy Corbyn a compris l’enjeu puisqu’il propose un plan en trois points: 
- redéfinir les règles de la commande publique afin que l’Etat dépense l’essentiel des 200 milliards de livres qu’il verse actuellement au secteur privé en Grande-Bretagne plutôt qu’à l’étranger. Le leader  travailliste se demande par exemple pourquoi les nouveaux passeports britanniques sont fabriqués en France et non pas en Grande-Bretagne. Il s’étonne que l’on passe des commandes à l’étranger quand les chantiers navals britanniques gardent un vrai savoir-faire et manquent simplement de main d’oeuvre qualifiée pour assumer toutes les commandes actuellement passées. 
- investir dans la modernisation de toutes les infrastructures. 
- investir dans l’éducation et la formation continue pour que les Britanniques acquièrent les compétences de la Quatrième Révolution industrielle. 
Mes amis conservateurs se sont lâchés hier et ce matin: quand Corbyn n’a pas été soupçonné de trumpisme, on l’a qualifié de protectionniste, un mot qui est une insulte, visiblement pour tous ceux qui ont oublié que Benjamin Disraëli l’Ancien avait forgé le parti onservateur moderne en menant un combat protectionniste dans les années 1840. 
Vous tomberez certainement d’accord avec moi, mon cher ami, que Corbyn est plus rusé que précis dans son discours d’hier. Il donne peu de chiffres, évitant de s’exposer à la critique. Il est au fond content de laisser le Premier ministre actuel cafouiller tandis que l’Union Européenne négocie de manière très raide. Mais ce qu’il perd en précision, il le gagne en efficacité politique. Un parti travailliste qui parle investissements, industries nouvelles, éducation et réhabilitation de la production en Grande-Bretagne, est sûr de reconquérir l’électorat populaire, y compris une partie de celui qui est tenté par UKIP. La bataille pour remplacer Theresa May à Downing Street a commencé et je crains bien pour mon parti que le prochain Premier ministre, dans six mois comme dans dix-huit, s’appelle Jeremy Corbyn. 
Bien fidèlement à vous
Benjamin Disraëli

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