Bertrand, Fillon, Juppé, Le Maire, Mariton : petits conseils à chacun pour survivre au tsunami Sarkozy ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Pour les cadors de l'UMP, il va être difficile de s'imposer face à Nicolas Sarkozy.
Pour les cadors de l'UMP, il va être difficile de s'imposer face à Nicolas Sarkozy.
©REUTERS/Christophe Ena/Pool

Attention à la vague

Alors que Nicolas Sarkozy est entré en campagne pour la présidence de l'UMP, ses adversaires vont devoir lutter pour empêcher un raz-de-marée. Une tâche compliquée aussi bien pour Bruno Le Maire et Hervé Mariton que pour les autres ténors de l'UMP qui visent la primaire de 2016 : Xavier Bertrand, Alain Juppé et François Fillon.

Philippe Goulliaud

Philippe Goulliaud

Rédacteur en chef du service politique du Figaro, il a co-écrit avec Marie-Benedicte Allaire "L'incroyable septennat" en 2002 (Fayard). 

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Atlantico : Juste avant l’officialisation de la candidature de Nicolas Sarkozy à la présidence de l’UMP, l’entourage d’Alain Juppé et François Fillon évoquaient à son propos "un tsunami". Les deux candidats à présidence de l’UMP, Bruno Le Maire et Hervé Mariton, ont-ils les moyens de lutter face au "tsunami" Nicolas Sarkozy ?

Philippe Goulliaud : Ils ne luttent pas à armes égales mais ils peuvent encore espérer marquer des points avant la fin de la campagne. C’est vrai que Nicolas Sarkozy est très populaire dans le mouvement et a un statut particulier, celui d’ancien président de la République. Il a accès plus largement et plus facilement aux médias que les autres candidats. Le lancement de sa campagne s’est fait à grand renfort de publicité avec 40 minutes de France 2 et la retransmission de son premier meeting.Nicolas Sarkozy va vouloir remporter l’élection avec le succès le plus éclatant possible. C’est pour ça qu’il a intérêt que ses adversaires ne puissent pas présenter les parrainages nécessaires. Hervé Mariton ne les a pas encore et ça sera difficile pour lui de les obtenir tandis que Bruno Le Maire semble les avoir. François Fillon s’exprime donc assez justement quand il dit que face à un tsunami il vaut mieux laisser passer. François Fillon a le temps d’attendre que le tsunami Nicolas Sarkozy passe mais pas Hervé Mariton et Bruno Le Maire. Il faut donc qu’ils trouvent très vite le moyen d’exister.

Comment les deux candidats à la présidence de l’UMP peuvent-ils se défendre ?

Bruno Le Maire doit imposer l’idée que le renouveau c’est lui et personne d’autre. Il peut faire valoir que Nicolas Sarkozy s’inscrit dans le droit fil de sa campagne de 2012 et de 2007. Cela peut être un angle d’attaque pour Bruno Le Maire. Hervé Mariton, lui, doit jouer sur la cohérence de ses convictions et draguer les électeurs proches de la manif pour tous, ceux qui pourraient être inquiets des positions pas encore tranchées de Nicolas Sarkozy sur le mariage pour tous.

Alors que les deux députés UMP candidats à la présidence de l’UMP ont proposé à Nicolas Sarkozy un débat avant le vote, leur stratégie passe-t-elle forcément par les médias ? Et si oui, comment peuvent-ils exister médiatiquement face à Nicolas Sarkozy ?

Ils peuvent essayer de passer par les médias mais peuvent aussi voir les militants UMP. Bruno Le Maire le fait d’ailleurs avec son tour de France entamé depuis longtemps tout comme Hervé Mariton aussi avec des moyens plus limités. Ce n’est pas tellement par les médias qu’ils réussiront à passer car Nicolas Sarkozy a un talent pour ça. La seule possibilité pour Bruno Le maire et Hervé Mariton d’exister dans les médias c’est d’essayer de renverser la table avec des propositions innovantes mais ce n’est pas facile dans ce genre d’élection.

Sur quels atouts doit miser chacun d’entre eux ? 

Bruno Le Maire incarne la jeunesse et le renouveau tandis que pour Hervé Mariton ce sont des convictions ancrées sur des valeurs traditionnelles. Pour Bruno Le Maire c’est aussi sa détermination : dans une élection qui paraît jouée d’avance il y a toujours de la place pour une opposition donc celui qui réussira à capter ce créneau de l’opposant au favori pourra marquer des points presque mécaniquement. En revanche pour Hervé Mariton c’est plus compliqué et sa candidature de témoignage risque d’être emportée par le tsunami Nicolas Sarkozy. On voit qu’Hervé Mariton n’a pas pu tenir son meeting à Tours et a dû annuler car Nicolas Sarkozy en tient un la veille.

Xavier Bertrand vise quant à lui la prochaine présidentielle via la primaire. Comment l’ancien ministre de Nicolas Sarkozy pourrait-il se faire entendre d’ici cette échéance, et ce alors même que certains de ses soutiens sont fortement courtisés, comme Gérald Darmanin ?

Cela passe par des propositions innovantes mais ça sera aussi difficile pour lui. Le calendrier n’est pas le même que celui de Bruno Le Maire et d'Hervé Mariton et il a plus de temps. Il faut qu’il colle à ce que la droite espère et attende. Xavier Bertrand va devoir tenir jusqu’à la primaire de 2016. Il faut noter que quand un élu UMP s'est engagé derrière un candidat par le passé il vaut beaucoup plus cher. On l’a vu avec les soutiens de François Fillon comme François Baroin et Eric Woerth qui ont intégré le cercle rapproché des soutiens de Nicolas Sarkozy car ils étaient très engagés dans le combat pour la présidence de l’UMP en 2012 au côté de François Fillon. On le voit aussi pour Xavier Bertrand : le porte-parole de Nicolas Sarkozy est Gérald Darmanin, un proche de Xavier Bertrand. L’invité de marque à la tribune du meeting de Lambersart jeudi soir était David Douillet qui est lui aussi un soutien marqué de Xavier Bertrand. Parmi les élus qui entourent désormais Nicolas Sarkozy il y a aussi le député et maire de Belfort Damien Meslot qui était lui aussi engagé avec Xavier Bertrand. Nicolas Sarkozy a donc une force d’attraction considérable et une force de conviction au moins égale.

Alors qu’il ne soutient personne pour la présidence de l’UMP, Alain Juppé passe à l’offensive contre Nicolas Sarkozy. En tirant contre son camp, le maire de Bordeaux ne risque-t-il pas à terme de donner une image de diviseur ?

Est-ce qu’Alain Juppé soutient vraiment personne ? Il ne le dira pas officiellement mais à mon avis s’il peut aider Bruno Le Maire en sous-main il le fera. Sa stratégie c’est de surfer sur sa bonne image et sa côte de popularité, de valoriser son côté homme d’Etat et de sage et de dire qu’il ne fera qu’un mandat s’il est élu président. Pour Alain Juppé la difficulté c’est que les militants UMP veulent Nicolas Sarkozy à la présidence et il risque donc de trouver ensuite le terrain occupé. Alain Juppé n’a pas voulu être président de l’UMP et il a peut-être fait une erreur. Il doit très vite persuader les électeurs qu’il est totalement déterminé à y aller face à Nicolas Sarkozy.

Pour le moment, il répond à Nicolas Sarkozy qui a été obligé de donner des gages et de dire que la primaire aura bien lieu. Il a obligé Nicolas Sarkozy à prendre des engagements et il se trouve qu’il a plutôt montré sa détermination ce qu’il n’avait pas toujours fait avant. Alain Juppé prend peut-être un risque de critiquer Nicolas Sarkozy mais c’est un risque à prendre. Alain Juppé ne s’adresse pas aux mêmes électeurs que Nicolas Sarkozy qui vise les militants UMP tandis que le maire de Bordeaux s’adresse à un électorat plus élargit de droite, du centre voire au-delà. Alain Juppé espère élargir son assise électorale pour 2016 et ce qu’il peut perdre dans l’immédiat il peut aussi le gagner pour 2016.

Comment François Fillon peut-il quant à lui exister d’ici 2016 ?

Dans un premier temps il va faire le gros dos. Je trouve qu’il est assez habile depuis quelques jours. Il applique la stratégie de Jacques Chirac en 1995 face à Edouard Balladur lorsque Jacques Chirac continuait à dérouler son petit bonhomme de chemin sans s’adresser et répondre à Edouard Balladur. François Fillon n’a pas répondu à la candidature de Nicolas Sarkozy : il continue de parler aux Français et il était orateur de l’UMP lors du débat sur l’engagement militaire en Irak. Il a aussi parlé de l’Etat islamique lors de l’assassinat d’Hervé Gourdel.

François Fillon va faire prochainement des propositions dans une série de domaines comme si Nicolas Sarkozy n’était pas entré en campagne. Sa grosse difficulté c’est qu’il est lâché par certains de ses soutiens et on peut penser qu’il le sera encore si Nicolas Sarkozy continue de faire la course en tête. Nicolas Sarkozy va essayer de l’affaiblir avec ses moyens. Là encore, François Fillon va devoir montrer qu’il est déterminé. Celle de Nicolas Sarkozy est évidente mais celle de ses rivaux l’est moins. 

Propos recueillis par Julien Chabrout

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