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Audiences radio : les raisons du grand déclin
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T.S.F.

Selon l'enquête Médiamétrie pour la période avril-juin 2014, la radio a perdu de son charme auprès de ses fidèles. Avec 42,8 millions d'auditeurs quotidiens, elle enregistre ses plus mauvais résultats depuis trois ans. Les plus touchées : les radios généralistes, notamment RTL.

Jean-Marie Charon

Jean-Marie Charon

Jean-Marie Charon est sociologue, spécialiste des médias et chercheur au CNRS. Il a notamment co-dirigé avec Arnaud Mercier l'ouvrage collectif Armes de communication massives : Informations de guerre en Irak 1991-2003  chez CNRS Éditions

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Atlantico : Selon une enquête Médiamétrie concernant la période d'avril à juin 2014, presque toutes les radios affichent une audience en berne avec un total de 42,8 millions d'auditeurs quotidiens en France, soit le résultat le plus mauvais de ce média depuis trois ans. Comment expliquer un tel déclin ? 

Jean-Marie Charon : Le trimestre du printemps est traitre à analyser car il comporte plus ou moins de ponts et donc jours non travaillés selon les années. Or les journées non travaillées sont plus faibles en écoute de la radio et notamment des matinales qui jouent un rôle important en France.

En même temps un tel résultat joue un rôle d’alerte au regard de tendances plus longues qui voient les pratiques en matière de radio se transformer, comme pour tous les anciens médias, face à la place que prennent désormais les différents supports numériques. Les évolutions sont plus brutales en presse écrite, moins visible en télévision, la radio se trouvant dans une situation un peu intermédiaire.

En tendance longue un mouvement conduit à l’érosion régulière des généralistes face aux radios thématiques (info, communautaires, musicales). Ce que manifeste le niveau très bas de RTL, la leader des généralistes. Ce mouvement est engagé depuis les années 80. Plus récente est l’évolution qui voit le public adolescent abandonner les radios qui s’adressent à lui leur préférant réseaux sociaux et musique en ligne. C’était déjà perceptible dans l’enquête de 2008 sur "les pratiques culturelles des Français" du ministère de la culture. Ces données se retrouvent également dans les études nord-américaines, même si la consommation de la radio y est par ailleurs assez différente.

Quel est le style de radio le plus touché par ce déclin ?

Les généralistes sont les plus touchées depuis maintenant 30 ans. Depuis une décennie les radios jeunes (adolescents) souffrent à leur tour et ce mouvement ne risque pas de s’inverser.

N'y a-t-il pas une possibilité pour ces radios de s'adapter aux attentes des auditeurs ?

Chaque radio recherche son optimum dans son segment de marché. NRJ continuant à se distinguer par un marketing très poussé en direction du public des jeunes adultes. Les développements et marges de progression se trouvent désormais ailleurs, sur le numérique. Et là les avancées des uns et des autres sont assez différentes, sachant que les publics concernés jouent également un rôle important ce qui peut expliquer la place d’Europe ou de France Culture sur les podcast ou écoutes décalées.

La seule radio à afficher une hausse d'audience cumulée est NRJ, qui est passée 12,5 % en janvier-mars 2014. Pourquoi est-elle la seule à s'en sortir ? Quelles sont les raisons de son succès ?

Il est difficile à chaud d’interpréter la performance de NRJ qui se bagarre pour le leadership depuis près d’une décennie. Deux pistes sont à privilégier : d’un côté son marketing très rigoureux notamment en matière de musique, de l’autre son public de jeunes adultes qui s’élargit en âge par ailleurs, moins concerné par les retournements de comportement que la génération actuelle des adolescents.

Les radios à contenu du type France Culture pâtissent-elles de la concurrence d'Internet, et notamment des radios en ligne du type Canal Academy ? A quel avenir peut-on s'attendre pour les radios en ligne en général ?

France Culture semble plutôt favorisée de par son public qui n’a pas beaucoup d’alternatives dans son genre de programme, en même temps qu’il est disponible aux extensions vers le numérique. Pour moi la radio va devoir comme c’est déjà le cas pour la presse écrite trouver la bonne complémentarité entre le support d’origine et les différents supports numériques, face au Smartphone notamment en matière d’information.

Les nouvelles générations ont-elles aujourd'hui plus besoin de visuel ? Comment expliquer qu'à une époque, la télévision et la radio coexistaient et qu'aujourd'hui seule la radio décline ? Plus généralement, quel avenir pour la radio ? Allons-nous vers la fin de ce média ?

Les publics actuels expérimentent des formes de pratiques d’information et de divertissement qui combinent de plus en plus les différentes formes d’écriture, de narration. Cela ne veut pas dire la disparition de médias comme la radio, mais des combinaisons nouvelles entre ce média historique et des expressions de celui-ci sur davantage de supports. Reconnaissons que l’ampleur des évolutions actuelles oblige à une très grande modestie dans les pronostics, tant l’incertitude est grande, tant du point de vue de l’évolution des techniques (combien de nouveaux supports et applications viendront encore ?) et quant aux usages. A court terme il reste que le média radio est exceptionnellement fort en France au regard de nos voisins européens par exemple, tout comme il est le média qui bénéficie de la plus grande confiance des Français, comme le rappelle depuis près de 30 ans la Baromètre La Croix TNS-Sofres.

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