Angela Merkel prépare une baisse générale de l’impôt en Allemagne. Elle peut le faire. Manuel Valls promet la même chose mais rêve. Il n’en a pas les moyens, lui <!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Economie
Angela Merkel prépare une baisse générale de l’impôt en Allemagne. Elle peut le faire. Manuel Valls promet la même chose mais rêve. Il n’en a pas les moyens, lui
©Reuters

Enfin une bonne nouvelle

Encore un chassé-croisé de promesses intenables. Quand Manuel Valls se voit refuser par Bercy un projet de baisse de l’impôt sur le revenu, Angela Merkel se décide à distribuer ses excédents budgétaires. Enfin !

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

Il est aussi l'auteur du blog http://www.jeanmarc-sylvestre.com/.

Voir la bio »

Ça promet dans tous les sens et pour tout le monde. La campagne pour les présidentielles s’annonce vraiment mal. Alors que les uns font de la surenchère pour garantir la sécurité et lutter contre l'islamisme radical ou tout ce qui lui ressemble de près ou de loin, d’autres prétendants annoncent des baisses d’impôts sur le revenu. Manuel Valls doit avoir une envie urgente d’effacer l’image d’un Premier ministre de gauche associé au matraquage fiscal pour proposer une baisse de l’impôt sur le revenu vers la fin de l’année.

Pourquoi ? Parce que ça parait très compliqué à faire dans une France où le déficit budgétaire se creuse chaque jour. Mais aussi parce qu’une baisse de l’impôt sur le revenu ne servirait à rien pour la masse des contribuables. Plus de la moitié des contribuables sont exonérés ou dispensés d’impôts sur le revenu. Alors promettre de baisser un impôt qu’on ne paie pas n’engage à rien. 80% de la recette fiscale est apportée par 20% des contribuables. Ce qui est confiscatoire et décourageant. Tout le monde le sait.

Ceci dit, on ne voit pas ce qu’un candidat de gauche aurait à gagner à faire un cadeau aux très riches.

Alors on peut imaginer d’autres baisses, sur la CSG par exemple, sur la TVA. On peut imaginer un accroissement des revenus de redistribution, sur le RSA, ou sur la vieillesse. Mais tout cela coûterait tellement cher que Bercy a immédiatement opposé une fin de non-recevoir et espère tenir jusqu’au bouclage de la loi de finances.

De telles propositions à gauche annoncent une campagne plutôt sportive et débordante d’irresponsabilités. Bonjour les dégâts, bonjour la démagogie, y compris chez Valls qui se réfère à l’école de Mendès France et qui a travaillé avec Michel Rocard. La politique doit rendre fous les gens les plus sérieux.

De telles propositions sont d’autant plus surréalistes qu’au même moment, le Premier ministre d’Allemagne ne dément pas la presse spécialisée quand elle annonçait cette semaine que se préparait une série de mesures pour alléger la pression fiscale qui pèse sur les entreprises et les contribuables allemands.

Angela Merkel en a parfaitement les moyens financiers.

Pour la troisième année consécutive, l’entreprise qu‘elle dirige, l‘Allemagne, va sortir un excèdent budgétaire. Pour la troisième année, l’état allemand et les "Lander" ont dépensé moins que ce qu’ils ont reçu comme contributions.

Pourquoi ? Tout simplement parce que l’économie marche bien, la croissance est forte, et le chômage quasi nul. La balance commerciale est positive. Le monde entier utilise les machines-outils, les camions et les voitures de marques allemandes. La compétitivité prix et hors prix n’a jamais été aussi forte. L’Allemagne, (mais c’est un lieu commun) touche les dividendes des réformes concoctées par l'économiste Hartz, et lancées par Gerhard Schröder il y a plus de dix ans. Réforme du droit du travail, de la retraite et de l’administration.

Ce qui explique l’excédent budgétaire, c’est aussi la rigueur de la gestion des affaires publiques. L’Allemagne dépense 100 milliards de moins que la France dans son administration, alors que la population est équivalente et qu’on ne peut pas dire que les services de l’éducation, de la santé, ou des grands équipements, marchent moins bien en Allemagne qu’en France. C’est même le contraire. On est aussi bien soigné de l’autre côté du Rhin, et l’école y est très certainement plus efficace.

Cet excèdent structurel est d’ailleurs montré du doigt par beaucoup d’économistes européens qui reprochent au gouvernement allemand de comprimer la consommation intérieure et ainsi de freiner l‘activité en Europe.

Il faut dire que jusqu'à maintenant, le gouvernement allemand a mis ses excédents au service de la compétitivité de ses entreprises allemandes.

La pression est donc forte désormais pour que le gouvernement assouplisse un peu la politique de rigueur. La demande émane des cadres de la coalition au pouvoir autour de la CDU/CSU, et Angela Merkel s’y prépare, même si son ministre de l’Economie Wolfgang Schäublefait encore un peu de résistance et voudrait attendre la fin de l’exercice. "Pas question de boire le vin avant d’être sûr de la qualité de la dernière vendange", dit cet amateur de Bordeaux. Mais sur le fond, personne n’est vraiment contre ce changement de braquet. La société allemande a gagné le droit de respirer un peu d’oxygène.

Les moyens sont multiples et tout dépendra des arbitrages politiques mais ça peut passer par une baisse de l’impôt sur le revenu, baisse des impôts du capital ou de la TVA.

Les résultats seront immédiats et évidents. La consommation intérieure bénéficiera de ce coup de pouce. Indirectement, les entreprises européennes en profiteront également, puisque les importations allemandes vont augmenter et les exportations vont se tasser.

Politiquement, cette baisse arrive au bon moment pour Angela Merkel qui a perdu une partie de ses soutiens à cause de ses positions peu lisibles sur l’immigration.

Mais pour le gouvernement français, c’est une très mauvaise nouvelle. L’Allemagne apporte la preuve, une fois de plus, des bénéfices économiques d’une gestion plutôt orthodoxe et stable.

Un fait, un seul, devrait obséder les responsables politiques français :

Si l’Allemagne baisse ses impôts, c’est parce qu’elle en a les moyens. 

Le sujet vous intéresse ?

À Lire Aussi

L’Allemagne, seule bénéficiaire du libre-échange avec la ChineAnatomie de la croissance allemande : pourquoi Berlin continue de n’en faire qu’à sa tête dans une Europe convalescenteAgriculture : la France va perdre sa place de premier exportateur européen de blé au profit de l'Allemagne

Mots-Clés

Thématiques

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !