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Obama ou pas, l'Amérique 
toujours plus conservatrice
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Trans-Amérique Express

Le conservatisme progresse aux États-Unis. Mais cela n’empêche pas les tensions en son sein, comme l'illustre les débats entre candidats aux primaires républicaines.

Gérald Olivier

Gérald Olivier

Gérald Olivier est journaliste et  partage sa vie entre la France et les États-Unis. Titulaire d’un Master of Arts en Histoire américaine de l’Université de Californie, il a été le correspondant du groupe Valmonde sur la côte ouest dans les années 1990, avant de rentrer en France pour occuper le poste de rédacteur en chef au mensuel Le Spectacle du Monde. Il est aujourd'hui consultant en communications et médias et se consacre à son blog « France-Amérique »

Il est aussi chercheur associé à  l'IPSE, Institut Prospective et Sécurité en Europe.

Il est l'auteur de "Mitt Romney ou le renouveau du mythe américain", paru chez Picollec on Octobre 2012 et "Cover Up, l'Amérique, le Clan Biden et l'Etat profond" aux éditions Konfident.

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Selon les résultats d’un sondage Gallup, publié ce mois, les Américains sont de plus en plus nombreux à se dire « conservateurs ». 40% exactement ! Tandis que 36% se disent « modérés » et seulement 21% « liberal » (en anglais être « liberal » ne signifie pas que l’on défend l’économie de marché, mais au contraire que l’on est plutôt « de gauche » sur les questions économiques et sociales).

Ce sentiment conservateur progresse dans tous les États de l’Union, sauf l’Alaska. Il est dominant dans 37 États sur 50. Ainsi, mis à part les États de la côte ouest et ceux du nord-est, où les idées « de gauche » sont plus largement partagées, le pays intérieur - soit le Mid-West, le sud et la région des Rocheuses - se décrit comme « conservateur » voire « très conservateur ».

Dans quatre États, les conservateurs rassemblent plus de la moitié de la population : le Mississippi, l’Utah, le Wyoming et l’Alabama. L’État où les sympathisants de gauche sont les plus nombreux est le Massachussetts, avec un taux d’identification de 30%, contre 29% pour les conservateurs.

En termes politiques, cette identification donne un avantage aux républicains. Le « GOP » (Grand Old Party, surnom du parti républicain) est le porte-drapeau du conservatisme. Tandis que le parti démocrate est celui des « liberals ».

Cela comptera doublement en novembre, dans la course à la Maison Blanche, puisque l’élection américaine se fait par un scrutin indirect où les votes sont comptabilisés au sein de chaque État, et convertis en voix au Collège électoral. Mais surtout, cela comptera dans la course au Congrès puisque l’ensemble des sièges de la chambre des Représentants (435) et le tiers de ceux du Sénat (33 sièges, dont 22 démocrates et 11 républicains) seront à renouveler.

Ce sondage tombe alors que vient de se tenir à Washington la « CPAC », « Conservative Political Action Conference », grand-messe annuelle du mouvement conservateur.

Année électorale oblige, trois des quatre candidats républicains à la Maison Blanche ont honoré ce rendez-vous : Rick Santorum, Newt Gingrich et Mitt Romney. Et les médias ont abondamment couvert l’évènement. Soulignant au passage que le conservatisme a plusieurs visages.

Rick Santorum a mis sa foi religieuse en avant, pour se présenter comme le garant de l’orthodoxie conservatrice. Newt Gingrich a insisté sur son indépendance de vue, se positionnant « en marge du système », en écho au sentiment qu’ont les conservateurs d’être en marge d’un monde dont les valeurs morales sont dictées par des médias ancrés à gauche. Mitt Romney s’en est tenu au registre fiscal, évoquant la cure d’amaigrissement qu’il imposerait à Washington, comme il a su l’imposer au Massachussetts entre 2003 et 2007.

Seul Ron Paul était absent. Officiellement retenu ailleurs par sa campagne… En fait, brouillé avec les organisateurs. « Libertarien » et non purement « conservateur », il s’identifie aux idéaux du mouvement sur les questions économiques, mais s’en écarte sur les questions religieuses, internationales, ou de société. D’où sa mise à l’écart. Alors même qu’en 2010 et 2011 il avait participé au CPAC et même remporté le vote blanc (« straw poll ») qui clôt la Conférence et détermine la personnalité préférée des participants.

C’est l’illustration de tensions nouvelles au sein du mouvement.

Les conservateurs ont toujours su inclure différentes tendances et rassembler au plus large. Notamment lors d’élections. Aujourd’hui certaines tendances radicales refusent de rentrer dans le rang. Comme le manifeste l’opposition persistante d’une partie du camp républicain à Mitt Romney, jugé trop modéré.

Idéal ancré dans la vie américaine, le conservatisme est devenu une force politique à partir de 1950 avec l’avènement de la Guerre Froide et de l’Etat providence.

Ses principes se rattachent aux deux textes fondateurs des États-Unis : la Déclaration d’Indépendance de 1776 et la Constitution de 1787. Le premier est un principe de liberté : des hommes, des entreprises et des marchés. Le second est la loi, qui doit être forte pour garantir cette liberté mais aussi protéger les droits individuels qui l’accompagnent (dont le droit de port d’arme). Le troisième est un gouvernement restreint, tenu à la rigueur fiscale et garant de l’indépendance nationale. Le quatrième est le respect des valeurs religieuses dans les comportements sociaux …

Au XXe siècle la montée des totalitarismes dans le monde, et la mise en place de mesures de protection sociale par un gouvernement dont les responsabilités n’ont cessé de s’étendre, ont donné à ces principes une nouvelle réalité. Le mouvement conservateur a rassemblé à la fois les partisans de « l’American Way of life » face au communisme, les adversaires des règlementations, tentatives d’ingénierie sociale et autres intrusions du gouvernement dans la vie de tous les jours et les défenseurs de la civilisation judéo-chrétienne face aux assauts du relativisme, du nihilisme et du multiculturalisme.

La Guerre Froide gagnée et finie depuis vingt ans, les conservateurs s’interrogent désormais sur le rôle de l’Amérique dans le monde. Le principe de la paix garantie par la force (« peace through strength») énoncé par Ronald Reagan, n’est plus unanimement partagé.

Face à une dette de quinze mille milliards de dollars, l’idée de « rigueur fiscale » a pris une dimension inédite. Elle fédère les Tea Parties devenues une force motrice au sein du mouvement. Une force radicale refusant tout compromis. A la tribune du CPAC, Rick Santorum n’hésitait pas à affirmer : « Nous conservateurs et membres des Tea Parties, nous ne sommes pas simplement une aile du parti républicain, nous sommes le parti républicain. »

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