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Des médecins psychiatres parlent à un patient à l'hôpital Saint-Jean de Dieu à Lyon.
Des médecins psychiatres parlent à un patient à l'hôpital Saint-Jean de Dieu à Lyon.
©JEAN-PHILIPPE KSIAZEK / AFP

Santé mentale

Confronté au manque de personnel dans les hôpitaux suite à l’épuisement et au découragement provoqués par la crise Covid, le gouvernement est allé chercher des soignants dans des services tels que la psychiatrie. Au risque de devoir y fermer des lits et de laisser sortir des patients dangereux pour eux-mêmes comme pour la société ?

Maurice Bensoussan

Maurice Bensoussan

Le docteur Maurice Bensoussan est psychiatre.  

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Atlantico : Le Covid-19 a-il fragilisé les services de psychiatrie ? 

Maurice Bensoussan : Les tensions matérielles et économiques sur les effectifs pèsent lourdement. L’exercice de ce métier est pénible et difficile, en plus d’être émotionnellement mobilisateur et présenter des risques. Il faut donc peser avec attention les moyens affectés. Ces équilibres sont compliqués à gérer, surtout en période épidémique et que le malaise est évident.

Les tensions sont déjà très fortes et la psychiatrie est bien évidemment en difficulté. La demande de soin est très importante et il est difficile de suivre. On peut dire que le système est dérégulé. 

De plus, la psychiatrie reste le parent pauvre de la médecine. L’importance de cette discipline est pourtant essentielle et cardinale. Les besoins sont forts dans les services et les équipes sont épuisées. 

De nombreux soignants ont été transférés vers des services Covid lors des précédentes vagues, même si je ne peux pas vous fournir des chiffres précis. Les hôpitaux déplacent le personnel, font appel à des intérimaires à cause des difficultés d’embauche pour avoir des effectifs suffisants. Ils sont donc obligés de jongler entre les différents professionnels de santé, ce qui peut être mal vécu. Je pense qu’il faudrait prendre des mesures exceptionnelles pour éviter ces situations. 

Nous avons vu à Niort des fermetures de lits faute de personnel. Cela arrive-t-il souvent ? Y a-t-il un risque particulier à fermer des places dans un service de psychiatrie ?

Ce phénomène se répète malheureusement trop souvent, pas qu’en service de psychiatrie. Il faudrait mettre en place des mesures pour éviter que cela ne se reproduise. Il faudrait également repenser le management des hôpitaux et la place du corps médical pour que tous les professionnels puissent trouver leur place. Les enjeux du monde de la santé devraient devenir une priorité nationale.

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Il y a évidemment des risques à fermer des lits dans un service de psychiatrie. Ces services ont connu de nombreuses fermetures à l’époque où il avait des fonctions asilaires, d’hébergement. Les moyens d’actions sont différents aujourd’hui, des alternatives existent et l’hospitalisation n’est plus la seule solution. Les contours de l’hospitalisation en psychiatrie doivent donc être redéfinis, même si nous avons toujours besoin de lits. 

Le gouvernement ne doit-il pas aider les services psychiatriques à tenir ? Des efforts ont-ils été faits ? 

Il est difficile de dire que rien n’est fait, par contre je ne suis pas sûr que les efforts aient été suffisants. La psychiatrie doit faire l’objet d’une vraie analyse de ses ressources et de ses besoins, qui sont humains. La machine n’a pas remplacé l’homme. En tant que branche de la médecine, elle doit pouvoir traiter les patients correctement. La qualité du travail est forcément liée à la qualité humaine. Des actions sont menées, les choses bougent mais bien trop lentement. Les décisions doivent être prises en amont avant qu’il ne soit trop tard. 

Quelles pourraient être les mesures mises en place afin de soulager les services de psychiatrie ? Est-il souhaitable de mener des réformes profondes ? 

Le travail engagé pour travailler sur les collaborations professionnelles à l’échelle d’un territoire est une bonne piste. Il convient de s’engager plus clairement dans la gradation des soins pour bien repérer les efforts financiers à faire de manière à inscrire l’échelon hospitalier dans des partenariats d’amont et d’aval, sans faire porter à l’hôpital des missions qui ne relèveraient pas de sa compétence exclusive. La réflexion doit porter également sur les collaborations et délégations.

Des patients sont-ils déjà sortis sans aller au bout de leur traitement ? Ne sont-ils pas les premières victimes ? 

In fine, les patients sont toujours les premières victimes des dysfonctionnements.

Est-il dangereux de laisser sortir ce type de patients ? Avez-vous des exemples concrets ? 

Il n’y a pas de types de patients. Tout patient qui ne bénéficie pas d’un traitement adapté court une perte de chances.

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