9 patrons sur 10 seront obligés d’augmenter les salaires pour trouver des candidats à l’emploi<!-- --> | Atlantico.fr
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Des serveurs travaillent à la terrasse d'un café à Paris, le 15 juin 2020.
Des serveurs travaillent à la terrasse d'un café à Paris, le 15 juin 2020.
©Philippe LOPEZ / AFP

Atlantico Business

Face à la pénurie de main d’œuvre, les métiers de la restauration et de l’hôtellerie essaient de revaloriser les salaires. C’est une proposition qui inquiète beaucoup de petits indépendants, mais qui est pourtant inéluctable dans beaucoup d’autres secteurs.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Cette dernière enquête sur l’emploi tombe à pic pour apporter des arguments aux syndicats de la restauration-hôtellerie. Selon cette enquête réalisée par Hellowork, le leader français de l’emploi, du recrutement et de la formation sur Internet révèle que le salaire est redevenu le sujet central du recrutement. Et l’actualité nous en apporte l’illustration, avec la proposition du syndicat majoritaire de la restauration-hôtellerie d’augmenter de 6 à 10 % les salaires pour trouver des salariés et les fidéliser.

Il faut dire que la situation dans le secteur n’est pas brillante, mais elle est très simple à comprendre : les hôteliers-restaurateurs ont supporté la crise grâce aux aides gouvernementales, mais quand les confinements ont été levés (avant l'été), la plupart des hôteliers-restaurateurs n’ont pas récupéré leurs clients tout de suite, mais surtout, beaucoup n’ont pas récupéré leurs salariés. Vous avez plus de 300 000 salariés qui ont disparu purement et simplement et abandonné le secteur. Certains sont restés au chômage, mais beaucoup d’autres ont changé d’orientation et de métiers.

C’est un secteur où il y avait plus de 1.300 000 salariés. Ils sont moins de 1 million aujourd’hui. Plus grave, depuis 7 ou 8 mois, les hôteliers-restaurateurs ne trouvent pas de personnels à embaucher pour remplacer ceux qui ont disparu. Donc 1/3 des restaurants aujourd’hui n’ont pas pu ouvrir. Ou alors partiellement.

Les professionnels sérieux du secteur ont essayé de savoir les vraies raisons de cette pénurie. Ils n’ont pas eu de mal à les découvrir.

Les difficultés du métier sont évidentes. Il n’y a pas de week-end, pas d’horaires et les salaires sont maigres. Entre 1000 et 2000 euros. Ça n’est pas épais.

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D‘où l’idée de booster les pourboires par carte bancaire en les défiscalisant, mais ça ne marchera pas parce que c’est trop marginal et les clients n’y sont pas habitués. 

D’où l’idée de modifier les horaires et les contrats et là, c’est déjà mieux.

D‘où l’idée, enfin, de majorer les salaires entre 6 et 10 % avec un 13e mois. Tout cela serait à négocier. Ça permettrait de hisser les salaires entre 2500 et 3000 euros. Ce qui représenterait un réel effort d’attractivité.

D’après les études du syndicat des hôteliers et restaurateurs, c’est réalisable dans beaucoup d’entreprises. Dans les restaurants parisiens bien sûr, ou dans les restos de la côte Atlantique et méditerranéenne, c’est évidemment possible. Les restaurateurs peuvent jouer sur les prix, certains l’ont déjà fait.

Dans les brasseries et les cafés plus modestes qui sont ouverts le midi et qu’on paie avec des tickets restaurants, ça va être plus difficile. Pour une raison simple, ces restaurant n’ont pas retrouvé leur clientèle qui est désormais en télétravail. Beaucoup d’établissements dans les grandes métropoles ont perdu plus du tiers de leur clientèle, qui n’est pas revenu au bureau ou qui a conservé l’habitude de se faire livrer. Ces clients-là ne reviendront pas au restaurant, pas sur ces horaires-là.

Donc beaucoup de restaurants modestes ou d‘hôtels de province ont déjà craqué ou vont craquer. Ils étaient malades avant. Ils restent malades après. Ils dissimulaient leurs difficultés avec un peu de travail familial ou non déclaré. Ça va être plus difficile.

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L’augmentation des salaires est généralisable à beaucoup d’autres secteurs. Dans tous les pans de l’économie qui sont en tension et qui ne trouvent pas à embaucher. Il y a beaucoup d’inadéquation et des métiers où il y a plus de travail que de demandeurs d’emplois, donc il va falloir monter les prix.

C’est le cas du digital, les développeurs sont devenus les rois du pétrole dans cette révolution digitale. Dans le bâtiment, le second œuvre, électricien, chauffagiste… tous les métiers qui concernent la construction et la rénovation.

Dans le commerce digital, mais aussi le commerce de détail.

Dans la réparation automobile, la carrosserie par exemple où personne ne veut plus travailler.

Mais d’une façon générale, la dernière enquête de Hellowork indique que 9 recruteurs sur 10 sont prêts à augmenter le salaire pour convaincre un candidat d’accepter le job. Les principaux résultats de cette enquête sont très éclairants :

- 55% des candidats sont moins susceptibles de postuler à une offre s’il n’y a aucune précision du salaire ;

- Seuls 7% n’ont aucune idée du salaire qu’ils souhaitent demander en entretien ; 

- Les trois quarts des candidats sont prêts à baisser leurs prétentions si le poste les intéresse particulièrement ;

- 71% des candidats accordent de l’importance aux avantages qui complètent le salaire : tickets restaurant, participation, intéressement… 

- Près de 9 recruteurs sur 10 seraient prêts à augmenter le salaire si le candidat dépasse leurs espérances.

Le salaire est redevenu le sujet central. Alors, l’attitude à l’égard du salaire est assez paradoxale parce qu’il est souvent peu indiqué clairement par les recruteurs dans les offres d’emploi publiées en ligne notamment. Et pourtant, la dernière étude menée par HelloWork révèle que le fait de ne pas l’afficher est un frein pour plus d’un candidat sur deux au moment d’envoyer sa candidature ! Plus de 90% des candidats comme des recruteurs ont une fourchette de salaire souhaitée en tête. 

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Du côté des entreprises, le salaire proposé pour un poste dépend de la politique salariale déjà appliquée en interne (77%) ou de la grille salariale mise en place dans la société (65%). Le salaire est aussi basé en partie sur les études de rémunération des acteurs du secteur du recrutement (33%). 

« Savoir si le montant correspond aux attentes des deux parties avant de continuer le processus de recrutement pourrait apparaître comme évident, mais en fait ce sujet survient finalement plus tard lors de l’entretien » commente Flavien Chantrel, directeur éditorial chez HelloWork.

Si le salaire n’est pas clairement affiché sur une offre d’emploi en ligne, la question de la rémunération attendra un moment plus intimiste pour apparaître. Dans plus de la moitié des cas (55%), le recruteur commencera à en parler dès le premier entretien téléphonique, pour éviter de se lancer dans un entretien approfondi sans savoir si ce sujet pourrait être bloquant. Près de 4 recruteurs sur 10 le feront seulement lors d’un entretien physique. Candidats (81%) comme professionnels du recrutement (87%) s’accordent sur un point : c’est au recruteur d’aborder en premier cette question.

Alors pour être précis, ça n’est pas la seule condition pour accepter un travail. Il faut que l’entreprise plaise, que l’ambiance, le sens, l’organisation, les horaires correspondent à ses aspirations.  

Mais on revient très souvent au salaire et aux avantages annexes - tickets restaurants, indemnités kilométriques, intéressement, mutuelle. Très importante, la mutuelle.

La crise sanitaire n’a pas changé l’ordre des facteurs de décisions. Et cette étude indique que 90 % des candidats à l’embauche ont une idée précise du salaire qu‘ils souhaitent obtenir. Si l’employeur fait une offre décalée par rapport au projet, il ne trouvera pas de salariés.

Tout cela signifie que les salariés ont actuellement un pouvoir de négociation très fort.

Mais encore faut-il qu‘ils aient une formation, une expertise et qu’ils aient envie de travailler.

Le vrai problème en France, ce sont les seniors qu’on met à la retraite trop vite et qui ne retrouvent pas à se caser sauf exception, et surtout, les jeunes qui n’ont ni formation, ni éducation, ni job et très souvent, pas de familles pour les aides. On les appelle les NEEDS. Ils sont plus d’un million et c’est un vrai drame.

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