5 vœux réalisables (avec un peu de courage) pour la France en 2024<!-- --> | Atlantico.fr
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Une image du feu d'artifice à côté de l'Arc de Triomphe, sur l'avenue des Champs-Elysées, lors des célébrations du Nouvel An à Paris, le 1er janvier 2024.
Une image du feu d'artifice à côté de l'Arc de Triomphe, sur l'avenue des Champs-Elysées, lors des célébrations du Nouvel An à Paris, le 1er janvier 2024.
© Bertrand GUAY / AFP

Bonne année !

Dans un monde idéal, 2024 pourrait être l'année du renouveau pour la démocratie française, d'une remise en cause de la BCE, de l'exemplarité pénale, d'un grand débat public national sur la laïcité et d'une transition énergétique plus efficace.

Guylain Chevrier

Guylain Chevrier

Guylain Chevrier est docteur en histoire, enseignant, formateur et consultant. Ancien membre du groupe de réflexion sur la laïcité auprès du Haut conseil à l’intégration. Dernier ouvrage : Laïcité, émancipation et travail social, L’Harmattan, sous la direction de Guylain Chevrier, juillet 2017, 270 pages.  

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Don Diego De La Vega

Don Diego De La Vega

Don Diego De La Vega est universitaire, spécialiste de l'Union européenne et des questions économiques. Il écrit sous pseudonyme car il ne peut engager l’institution pour laquelle il travaille.

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Jean-Pierre Favennec

Jean-Pierre Favennec

Jean-Pierre Favennec est un spécialiste de l’énergie et en particulier du pétrole et professeur à l’Ecole du Pétrole et des Moteurs, où il a dirigé le Centre Economie et Gestion. 

Il a publié plusieurs ouvrages et de nombreux articles sur des sujets touchant à l’économie et à la géopolitique de l’énergie et en particulier Exploitation et Gestion du Raffinage (français et anglais), Recherche et Production du Pétrole et du Gaz (français et anglais en 2011), l’Energie à Quel Prix ? (2006) et Géopolitique de l’Energie (français 2009, anglais 2011).

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Drieu Godefridi

Drieu Godefridi est juriste (facultés Saint-Louis-Université de Louvain), philosophe (facultés Saint-Louis-Université de Louvain) et docteur en théorie du droit (Paris IV-Sorbonne).

 
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Maurice Signolet

Maurice Signolet

Maurice Signolet est un ancien commissaire divisionnaire. Il a notamment exercé à Aulnay-sous-Bois.

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REDONNER DE L'OXYGENE A LE DEMOCRATIE FRANÇAISE

Drieu Godefridi : Le débat constitutionnel français est l’un des plus complexes qui soit, chargé d’histoire, gros de mille suggestions de réformes, hérissé d’incompréhensions. La critique de la constitution gaullienne n’a jamais cessé depuis 1958 ; pourtant, elle est toujours là. Même l’inlassable critique du coup d’État permanent s’est acclimaté à la constitution gaullienne, si bien qu’il ne fit qu’en accentuer les tendances et pratiques monarchisantes. Le problème réside, selon moi, dans l’incompréhension française du concept de la séparation des pouvoirs. Comment ? Le pays de Montesquieu et de Tocqueville ne comprendrait pas la séparation des pouvoirs ? N’en ont-ils pas offert le concept au monde ? La définition de la séparation des pouvoirs — exécutif, législatif, judiciaire — ne réside-elle pas dans le simple énoncé du concept ? Il convient que soient séparés les pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire — en limitant donc, autant que faire se peut, les empiètements de l’un, sur les deux autres. Voilà qui est limpide ! Or, précisément, cette définition, qui est la vision naïve des révolutionnaires de 1789, est tout ce que la séparation des pouvoirs, au sens de Aristote, Montesquieu, Locke, n’est pas. L’idée de la séparation des pouvoirs est que chaque pouvoir se dresse face aux abus des autres pouvoirs. Ce qui exige, précisément, que les empiètements — les zones de friction entre les trois pouvoirs — soient aussi nombreux, et non rares, que possible. De ce point de vue, force est de constater que, depuis le magistral essai que consacrait en 1999 Jean-François Revel à L’absolutisme inefficace, l’ordre constitutionnel français a accompli des progrès. Quand Revel pouvait encore déplorer la soustraction presque intégrale de l’exécutif à l’empire du judiciaire — donc de la loi — force est de constater que cette critique n’est plus d’actualité. Ce n’est pas Nicolas Sarkozy qui nous contredira, pas davantage que les innombrables détenteurs du pouvoir exécutif passés ou en passe de le faire, par la case judiciaire. L’essor et le développement d’une authentique juridiction constitutionnelle — qui n'est le ‘gouvernement des juges’ que dans la conception faussée des révolutionnaires — est une autre illustration de ce phénomène. Il est temps, sans doute, de reconnaître que le présidentialisme français a perdu de son exceptionnalité, pour se rapprocher du présidentialisme américain. Les améliorations futures sont à rechercher dans la revalorisation du pouvoir législatif sur l’exécutif. Quant au rafraîchissement immédiat de la démocratie française, il viendrait, je crois, d’une élection de Marine Le Pen, en 2027. Depuis trop longtemps la droite est orpheline du pouvoir, dont on la maintient éloignée par mille stratagèmes, subterfuges, et compromissions malsaines, en dépit et non par le fait des institutions. Si la démocratie a jamais signifié quoi que ce soit, c’est que le candidat le plus populaire accède au pouvoir.

DES HOMMES POLITIQUES QUI OSENT CRITIQUER LA BCE ET QUI AUDITIONNENT SES MEMBRES

Don Diego de la Vega : Mon vœu est quelque chose de réalisable dès la semaine prochaine : avoir des politiciens qui se chargent de critiquer la BCE, de la challenger, de l’auditer et d'auditionner ses membres comme font les sénateurs américains avec la Fed. Je rêve de politiciens français qui vont poser des questions et exiger des réponses. Pourquoi les transcriptions des comptes rendus des réunions internes de la BCE quand elle fixe la politique monétaire sont publiées avec 50 ans de retard ? Pourquoi avoir fait un tel durcissement monétaire ? Quand allez-vous enfin baisser les taux ? Quand allez-vous prendre une vraie mesure contre l'inflation ? Quand allez-vous respecter le traité en matière de casting ? Le traité européen dit que les membres du Comité politique monétaire de la BCE doivent être des spécialistes de politique monétaire reconnus par leurs pairs. Je peux vous dire que sur les 23 membres actuels du Conseil de politique monétaire de la BCE, ce n’est pas le cas. Je rêve donc de politiciens français qui se bougent pour aller dire à Francfort ses quatre vérités. Nous pouvons le faire ! C'est juridiquement possible. La BCE est indépendante, elle n'est pas au-dessus de la critique.

En 2024, je rêve de politiciens français qui se comportent à nouveau comme des actionnaires de la BCE et non pas comme des gens assujettis à la BCE. Ils s‘interdisent toute critique vis à vis de l'institution, vis à vis de son casting, vis à vis de sa communication et vis à vis de sa stratégie. Ce n'est pas normal. Je rêve aussi de politiciens français qui se réapproprient le débat monétaire, de parlementaires français qui débattent dans l'hémicycle de choses monétaires comme les taux d'intérêt, les taux de change ou encore la supervision des banques. Ce genre de choses. Parce que sinon, 80 % de la politique économique nous échappe. Ce n’est pas la peine après de nous faire le grand coup de la souveraineté, de la réindustrialisation et de reprendre son destin en main. 

Il y a certainement tout un tas d'autres contributeurs qui vont vous dire qu’il faudrait que l'on prenne en compte les résultats PISA pour réinjecter de l'argent dans l'éducation nationale. Ce n'est pas faux. Ils vont dire qu’il faudrait une vraie stratégie industrielle pour la France. Ce n'est pas faux non plus. Ils vont dire aussi qu’il faudrait 25 réacteurs nucléaires pour la France pour son autonomie énergétique. C'est vrai. Mais à chaque fois, c'est un chèque de 150 milliards d'euros. Moi, l’avantage de ce que je raconte, c’est que ça coûte zéro. C’est juste du courage. 

UNE RESTRAURATION DE L'EXEMPLARITE PENALE

Maurice Signolet : Il n’est pas un jour sans qu’un fait divers, une exaction, ne ravive le débat sur l’expiation des crimes et des délits. Des arguments idéologiques s’opposent depuis des lustres à la réalité du quotidien, faisant douter de la pertinence des atermoiements politiques que cela implique. La philosophie de l’individualisation de la peine, considérant l’infraction comme un symptôme et non comme acte caractérisé, a conduit à une incompréhension populaire, des taux de récidive exponentiels, et une impunité quasi de fait. L’une des raisons « techniques » de cette dérive est la non obligation par la loi du prononcé des peines à un minimum, laissant une liberté d’appréciation des juges au seul maximum. A de très rares exceptions, pour quelques crimes ou en cas de récidive légale, un minimum peut être évoqué mais très largement interprété. Le seuil de l’insupportable insécuritaire est patent et ces appréhensions exclusivement intellectuelles n’ont plus aucune légitimité. Un sursaut politique de lucidité, devrait, pour sauver la sûreté considérée au même titre que l’égalité et la liberté dès la constitution de 1793, conduire à la restauration dans la loi, d’une « fourchette » pénale imposant un minimum.

UN GRAND DEBAT PUBLIC NATIONAL SUR LA LAICITE EN 2024, COMME RENDEZ-VOUS DE LA NATION !

Guylain Chevrier : Dans un collège d’Issou (Yvelines) un tableau du XVIIe siècle, Diane et Actéon, du Cavalier d’Arpin, a bien malgré lui, créé la discorde. Cette scène mythologique présente Actéon qui surprend Diane au bain et ses quatre suivantes. Une professeure de français a montré le tableau à sa classe de 6e, dans le cadre d’un cours sur l’art, mais l’un de ses élèves n’y voyant que des femmes nues, a détourné la tête au nom de sa religion. Mieux, on apprend que d’autres ont accusé ensuite l’enseignante de racisme. Le mois dernier à Privas, en Ardèche, on rapporte qu’une sortie scolaire a été annulée. Son objet, aller voir Persepolis, un dessin animé de Marjane Satrapi où un enfant raconte l'arrivée au pouvoir en Iran d'une République islamique. Mais l’assassinat de Dominique Bernard, professeur à Arras, par un ancien élève transformé en terroriste, aurait changé la donne. Officiellement annulée pour un problème d'emploi du temps, elle l’a été en fait par peur de représailles. On connaît cette multiplication des contestations des contenus de l’enseignement, qui aboutissent à des mises en accusation indignes, visant des professeurs, parce qu’ils appliquent une conception d’égal accès au savoir qui n’en exclut rien, qui fait la liberté. Une démarche qui peut aujourd’hui, les mettre en danger.

« On ne négocie pas nos valeurs », a répondu le ministre de l’éducation, Gabriel Attal, venu à Issou. C’est courageux, mais qu’est-il donc proposé pour faire face à cette mise au défi de notre République laïque ? A réagir au coup par coup à cette volonté de réintroduire de la censure religieuse dans l’école, prend-t-on bien la juste mesure des choses ? On voit combien cette situation intenable appelle à agir, par-delà les programmes d’enseignement moral et civique (EMC) dédiés aux élèves, qui sont loin de combler le fossé qui ici s’exprime, avec ses dangers. Bien au-delà aussi des formations « Valeurs de la République et laïcité » à destination d’un public cible. Cette question devient un enjeu plus général de société.

Ce qu’il faut pour 2024, c’est un grand débat public national sur « la laïcité », pas pour remettre une fois de plus en cause les choses en semant le trouble par on ne sait quel « en même temps », mais pour en réaffirmer collectivement et solennellement la valeur et le principe. C’est choisir le parti d’un modèle de société promouvant la liberté, comme fruit de la connaissance « de tout » qui émancipe, comme condition de l’action consciente du citoyen, de « l’homo politicus », en faveur de l’intérêt général au bénéfice de tous. Un acquis universel devant l’histoire, l’histoire humaine, qui s’il a été découvert en Occident est une propriété collective du développement de l’esprit, contrairement à cette vision de concurrence des cultures les unes vis-à-vis des autres pour pouvoir imposer la sienne. Si nous n’y allons pas ainsi aujourd’hui par la voie de la confrontation des idées, nous risquons demain un tout autre affrontement.

Reculer, c’est laisser la place au désordre de la prise de pouvoir des différences, à une nation qui se désunit. Certains disent qu’il est déjà trop tard, et votent « extrême » pensant à tort qu’il y a là un unique recours. Il y a comme, diraient certains, une dernière chance à saisir face à ce qui vient : c’est de conjurer la peur en nommant ce qu’elle craint, et en en exposant les termes sur la place publique, et dire ce qui doit être défendu pour la transformer en enthousiasme commun ! C’est une question de courage politique, comme cela fut convoqué à de nombreuses reprises dans notre histoire, sans quoi la France, pays de la liberté, ne serait pas ce qu’elle est. S’il y a un rendez-vous avec la Nation à prendre, c’est bien celui-là ! 

UNE TRANSITION ENERGETIQUE PLUS EFFICACE

Jean-Pierre Favenec : L’appel à une transition énergétique « hors des énergies fossiles » est une étape très importante. Mais le défi est immense

Nos besoins en énergie sont couverts à 80 % par le charbon, le pétrole et le gaz naturel.  En Chine et en Inde plus de 70 % des besoins en électricité sont couverts par le charbon. Le pétrole reste la source principale d’énergie pour le transport : essence et gazole pour les voitures, gazole pour les camions, kérosène pour les avions, fuel pour les navires. En outre les plastiques, autre source majeure de préoccupation environnementale, sont produits à partir de pétrole.

Remplacer ces sources d’énergie ne sera pas simple. Les énergies « décarbonées » n’émettant pas de gaz à effet de serre sont relativement nombreuses (surtout hydraulique, éolien, solaire et nucléaire) mais ne couvrent actuellement que 20 % des besoins.

Certes l’accroissement de la part du vent et du soleil dans le mix énergétique depuis 20 ans est impressionnant. Dans plusieurs pays, près de la moitié de l’électricité est désormais fournie par les énergies renouvelables (hydraulique, vent, soleil).

Hydraulique, éolien et solaire ne pourront pas couvrir l’ensemble de nos besoins. Le nucléaire peut permettre de faire face à une partie de notre consommation d’électricité. Mais les risques d’accident et le problème de la gestion des déchets heurtent une partie de la population. La relance du nucléaire nécessitera beaucoup de pédagogie et de communication.

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