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22 millions de Français travaillent dans le privé et financent les 30 millions qui dépendent, eux, de la dépense publique
©Reuters

Interview Irène Inchauspé

Elle croule sous les impôts et les taxes, et tire "la charrette" du secteur public : Privatine, c'est l'histoire d'une mule qui incarne le secteur privé en France, aujourd'hui asphyxié par l'Etat.

Irène Inchauspé

Irène Inchauspé

Passée par Le Point et Challenges, Irène Inchauspé est notamment l'auteur de L'Echéance avec François de Closets et de L'Horreur fiscale avec Sylvie Hattemer. Elle est journaliste à L'Opinion.

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Pourquoi avoir choisi de traiter la question de l'économie privée sous forme de conte, de personnifier les entreprises en mule? Les entreprises françaises en sont-elles réellement à un tel stade de contraintes ? 

Irène Inchauspé : L'idée est venue au moment de toutes les discussions qu'il y a eu sur la loi El Khomri, et j'en avais un peu assez d'entendre dire qu'il fallait que le secteur privé soit être agile. On s'est dit que le secteur privé l'était suffisamment ; les salariés du privé peuvent être licenciés, délocalisés etc. Ils ont largement fait preuve de d'agilité. On s'est dit finalement que non seulement il était agile, mais également il supportait toute la charge des personnes qui dépendent de la dépense publique. Et c'est pour ça qu'on a pensé à une mule, un animal extrêmement agile, et souvent imaginé en train de tirer une charge. On l'a appelé Privatine, car elle représentait le secteur privé, et de faire comprendre qu'il tirait la charrette de ceux qui dépendent du secteur public : les fonctionnaires, les chômeurs, les étudiants… 22 millions de gens travaillent dans le privé, et 30 millions de gens dépendent de la dépense publique. On a ensuite essayé de faire sous la forme d'un conte, de manière un peu ludique pour illustrer ce sujet. On est parti des chiffres de la comptabilité Nationale, car ils ne mentent pas. On sait qu'il y a 57% de dépenses publiques, et on a regardé comment les entreprises privées finançaient cela. On avait un peu assez d'entendre Sapin et ses Consorts dire que tout va bien en France, et que les entreprises sont productives. On s'est dit tout cela était bien gentil, mais diviser la valeur ajoutée par le nombre d'heures de travail n'est pas le bon ratio. Ce dernier, qu'on a appelé "compétitivité du travail", c'est celui qui divise la valeur ajoutée par le coût du travail. C’est-à-dire combien de valeur ajoutée vous dégagez pour un euro de travail. Là, on s'est aperçu en faisant ce calcul que nous sommes avant-derniers dans le recensement des pays par Eurostat, dont les chiffres ne sont pas critiqués, juste devant la Croatie. Les entreprises françaises sont écrasées. Ce n'est pas qu'une question de salaire, mais de charges qui ont augmenté et tous les impôts et les taxes qui sont prélevés sur la production avant même qu'on ait produit quoi que ce soit – ce qui est quand une particularité française -. C'est comme si vous piquiez les grains à un agriculteur avant qu'il n'ait pu les semer. Vous avez, par exemple, le forfait social. Chaque fois qu'une entreprise met de l'argent dans l'intéressement ou dans la participation, elle était taxée de 8% sous Sarkozy. Avec Hollande, on est maintenant à 20%. Cette taxe rapporte cinq milliards d'euros chaque année à l'État. 

A travers ce conte, quels sont les principales critiques que vous adressez à notre système et sa manière de traiter le monde de l'entreprise? Quels sont les différences fondamentales que l'on pourrait pointer en comparaison de certains de nos partenaires plus "dynamiques " ? 

Les comparaisons sont flagrantes. On a pris l'Allemagne et l'Espagne, qui sont des pays assez proches de la France. L'Allemagne a fait des efforts avec les réformes Schroeder sur les salaires, mais surtout en créant des produits très compétitifs et à très forte valeur ajoutée : c'est la qualité allemande que les gens acceptent de payer cher. Les Espagnols, eux, ont fait des efforts considérables sur le coût salarial. C'est spectaculaire de voir comment l'Allemagne nous a dépassé, et comment l'Espagne est devenue deuxième productrice d'automobiles en Europe, devant la France. La critique que l'on fait, c'est l'intrusion de l'État dans la valeur ajoutée, parce qu'il faut bien financer ces fichus 57% de dépenses publiques. On a un problème de compétitivité majeur de nos entreprises françaises. 

Quelles sont, selon vous, les réformes simples et rapides à mettre en place susceptibles d’apporter des solutions, permettant d'améliorer notre situation ?  

Des résolutions simples et rapides, j'ai peur qu'il Il n'y en ai pas beaucoup. Il faut diminuer le fardeau des dépenses publiques, car il faudra bien le faire. Il faudrait aussi relancer l'investissement. Nous, on fait un constat sur le fait qu'on a un problème de compétitivité. Ce qu’on souligne dans le conte, c’est également un problème de consensus. Or, pour qu’une réforme réussisse, comme le montre l’OCDE dans ses rapports, il faut qu’il y ait un consensus sur le diagnostic d’abord. et en France, il y en a a pas. Tant qu’on est dans cette situation, je ne vois pas quelles réformes pourraient aboutir. Il faut aussi améliorer l’efficacité du système. Pas seulement couper drastiquement dedans, mais qu’il devienne plus agile, et plus productif, et qu’on arrête d’accabler le secteur privé. 

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