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2017, l’année folle où l’on vit le socialisme mourir en mai et ressusciter à l’automne par les impôts
©Reuters

2017, l’odyssée de la fin du monde d’avant

Atlantico a demandé à ses contributeurs leur vision de l’année où la France a vécu de nombreuses surprises et rebondissements et est entrée dans l’ère Macron. Pour Philippe Crevel, 2017 fut une année folle pour les partis politiques.

Philippe Crevel

Philippe Crevel

Philippe Crevel est économiste, directeur du Cercle de l’Épargne et directeur associé de Lorello Ecodata, société d'études et de conseils en stratégies économiques.

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Des changements de repère en pagaille, le passage accéléré des générations avec la mise à la retraite politique de Nicolas Sarkozy, François Hollande, François Fillon et de bien d’autres, la prise de pouvoirs de la génération Y et du digital, la disparition de plusieurs idoles des années 60 et 70, Jean Rochefort, Mireille Darc, Johnny Halliday….

2017, une grande dame nous a quittés. Elle symbolisait le courage, la pugnacité, elle portait haut les valeurs du féminisme, de l’Europe, de la démocratie, je veux parler de Simone Veil. En ce temps de la commémoration facile et télévisuelle, l’émotion est trop souvent l’antichambre de l’oubli. Alors, n’oublions pas de lui rendre hommage cette année, en 2018 pour son entrée au Panthéon et les années qui suivront.

2017, année folle pour les partis politiques, année fatale pour le PS, les Républicains et contre toute attente pour le FN. Mais attention à ne pas tirer de conclusions trop hâtives. En 1993, le PS avait déjà été condamné avant de renaître de ces cendres en 1995 avec la présence de Lionel Jospin au 2e tour de l’élection présidentielle. Certes François Mitterrand était encore vivant. Certes, l’extrême gauche n’obtenait pas 18 % des voix. Année folle car le FN sort tout à la fois vainqueur et grand perdant du round électoral. Vainqueur car Marine le Pen a réédité l’exploit de son père en se hissant au 2e tour de l’élection présidentielle ; perdant du fait de son incapacité à casser le plafond de verre. Plus de 40 % des électeurs ne veulent plus du capitalisme et de l’Europe mais 40 % qui ne savent pas ce qu’ils veulent réellement.

2017 où la victoire de celui qui en voulait le plus, de celui qui n’avait pas de passif et de complexe. 2017 où l’année de gloire du centre qui n’avait plus occupé le pouvoir depuis 1974. A force d’aller de droite à gauche et de gauche à droite, le balancier s’est arrêté au milieu. Lassitude d’une opinion qui vote de moins en moins et espoir d’une opinion qui a depuis longtemps dépassé les barrières idéologiques. En dénonçant l’UMPS, Marine le Pen a ainsi rendu service à Emmanuel Macron car elle a osé dire ce que tout le monde souhaitait. Aujourd’hui, Emmanuel Macron est seul au monde, avec des adversaires au tapis ou en dépression. Il a obtenu ce que Valéry Giscard d’Estaing avait rêvé et qu’il avait écrit dans deux de ses livres « Démocratie Française » et « Deux Français sur trois ». Emmanuel Macron a ressuscité le centre tout en le tuant. François Bayrou qui avait échoué à trois reprises à l’élection présidentielle s’est fait voler son territoire électoral avant de perdre son maroquin dans le cadre d’une sombre affaire de collaborateurs parlementaires. Il ne sert à rien d’avoir raison trop tôt…

Année folle car une fois de plus, les pronostiqueurs ont été mis à dure épreuve. En 2016, le Brexit et l’élection de Donald Trump les avaient pris de cours. En 2017, certes la prudence était de mise mais peu avaient imaginé que les élections législatives aux Pays-Bas se passeraient bien, qu’en France, un jeune homme de 39 ans l’emporte sans coup férir et que la République en Marche obtienne une large majorité à l’Assemblée nationale. Nul n’avait pensé que la Chancelière allemande soit mise en difficulté à des élections qui s’annonçaient triomphales. Nul n’avait pesé la probabilité que l’extrême droite ne revienne au pouvoir en Autriche.

Année folle car 2016 avait semblé sonner le glas de l’Europe. Or, même si elle n’a pas fêté son soixantième anniversaire avec beaucoup de lustre, l’Europe a surmonté l’année 2017. La flamme européenne ne brille pas de ses mille feux mais elle ne s’est pas éteinte. En France, Emmanuel Macron, a osé commencer son mandat sur les notes de l’hymne européen, la 9e  symphonie de Beethoven. Le 26 septembre à la Sorbonne, il a prononcé un long et beau plaidoyer en faveur de l’Europe. Malgré tout, l’Europe a au-delà des discours continué de craquer avec la montée des tentations nationalistes à l’Est. La Pologne, la Hongrie et la Bulgarie tout en étant membres de l’Union européennes s’en éloignent. En 2017, l’Europe n’a toujours pas réussi à traiter la question des migrants. Or, pour des raisons démographiques, pour des raisons géopolitiques, le problème ne peut que s’accroître dans les prochaines années. L’Europe est également à la peine pour s’exprimer et agir de concert en Syrie. Avec la Russie, sa seule politique est la reconduction des sanctions décidées après le rattachement de la Crimée. Cette affaire, dans vingt, quarante ou cinquante ans risque de faire sourire à moins qu’elle soit le symptôme d’un réel délitement. 

En 2017, l’Europe a renoué avec la croissance qui semblait la fuir depuis 2012. Le chômage baisse au point de retrouver son niveau d’avant crise au sein de nombreux États. Les faibles taux d’intérêt, un prix du pétrole correct, la reprise des pays émergents, le maintien de l’activité aux États-Unis ont servi de terreau à la croissance européenne. Les stigmates des crises de 2008 et de 2011 s’estompent doucement. Ils sont encore visibles en Grèce, en Espagne, en Italie et en France. L’Europe du Sud en jouant les cigales budgétaires, en jouant la consommation sur l’investissement, en jouant le bâtiment contre l’industrie a payé un lourd tribut. La France devrait obtenir son meilleur taux de croissance depuis 2011, taux qui sera néanmoins inférieur à la moyenne européenne. Le chômage y restera supérieur. Par ailleurs, notre pays demeurera le dernier pays de l’Union européenne à être sur la liste des États en situation de déficits excessifs ; même la Grèce et l’Espagne n’y figurent plus. Notre dette publique continue immanquablement à progresser et à se rapprocher de la barre symbolique des 100 % du PIB. La France a conservé en 2017 ses titres de championnes d’Europe des prélèvements obligatoires et des dépenses publiques. Le nouveau pouvoir au-delà des jeux de bonneteaux n’a pas réussi à endiguer le flux au point qu’en 2018 les impôts, taxes et cotisations en tout genre augmenteront à nouveau. En France, le socialisme serait mort un mois de mai 2017 mais il survit par les impôts.

2017 sera aussi l’année où un petit pays, la Corée du Nord a défié les États-Unis  avec ses missiles. Les capitales ont été dans l’incapacité de régler ce problème qui perdurera donc en 2018.

2017 restera marquée par quelques valeurs sûres ; les Rolling Stones, après 55 ans de carrière, ont honoré leur rendez-vous à Paris avec trois concerts dans la nouvelle salle U Arena à Nanterre. Comme quoi, pour les baby-boomers qui sont pressés de débarrasser le plancher, tout espoir n’est pas perdu. Le temps n’attend personne et même s’il n’est pas toujours possible d’obtenir ce que l’on veut, en essayant, de temps en temps, il est envisageable de décrocher le graal. C’est certainement, ce à quoi pense en permanence le Président de la République française.

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