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"En 2012, le candidat qui aura le plus de fans Facebook sera élu"
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Web politique

Martine Aubry a lancé sa candidature à la primaire du PS avec un nouveau site web et un nouveau compte Twitter. Elle tentera de rattraper Nicolas Sarkozy qui s'est lancé depuis plusieurs années sur ce terrain. De quelle façon Internet pèsera sur la campagne présidentielle ? Xavier Moisant, qui s'est occupé entre autres de la campagne présidentielle de Jacques Chirac, répond aux questions d'Atlantico. Sans langue de bois.

Xavier Moisant

Xavier Moisant

Xavier Moisant est l'un des co-fondateurs de Gobilab, pour changer notre façon de boire de l'eau. Il sévissait auparavant dans des agences de communication. Xavier Moisant est par ailleurs amateur de trains à l'heure sur la ligne Paris-Rouen depuis 2005 sur Train train quotidien.
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Atlantico : La campagne de la primaire socialiste est lancée depuis ce mardi. Martine Aubry a notamment accompagné sa candidature du lancement de son nouveau site Internet. Qu’en pensez-vous ?

Xavier Moisant : Elle utilise pour son site de façon évidente les codes des campagnes américaines, avec un formulaire « restez informés » en bas de page, l’utilisation du bleu et du rouge qu’utilisent systématiquement les démocrates et les républicains. Au niveau de la charte graphique, le site reste quand même assez pauvre. Ils ne gagneront pas de prix de graphisme… Reste qu’on peut faire des trucs moches mais efficaces !

Elle a par ailleurs lancé son compte Twitter récemment…

L’enjeu est de partir le plus tôt possible pour avoir des bases de données, parce qu’acquérir des milliers de followers sur Twitter prend quand même du temps.

Les politiques français étant ce qu’ils sont et leur intérêt pour le web étant ce qu’il est, il semblerait que jusqu’à présent les équipes de Martine Aubry aient jugé qu’Internet n’était pas assez intéressant pour avoir un compte Twitter et un compte Facebook décents. Désormais, elle est en campagne pour la primaire, alors ils lancent un compte Twitter. Il faudra qu’on m’explique pourquoi la Première secrétaire du PS n’avait pas besoin d’un compte Twitter, alors que la Première secrétaire du PS en campagne pour la primaire en a besoin ! Ca n’a pas de sens !

La sévérité de votre jugement concerne-t-il uniquement Martine Aubry ou les hommes politiques en général ?

Cela concerne l’ensemble de la classe politique française. Non, en fait, cela concerne l’ensemble des décideurs français en général ! Combien il y a-t-il de patrons de presse qui ont un compte Twitter ? Quand vous comparez ce que peut faire le New York Times où tous les journalistes ont un compte Twitter et mettent des hashtags pour enrichir directement la page du journal lorsqu’il y a une simple élection locale…

Mais est-ce que Twitter ne concerne pas finalement qu'une infime minorité d’électeurs ?

Il n’y a pas que Twitter, il y a Facebook… Martine Aubry, là, commence sur Facebook… Comment se fait-il que la Première secrétaire du Parti socialiste français ait à peine un peu plus de 10 000 fans sur sa page Facebook ?

Vous pensez vraiment que c’est ça qui fait une élection ?

En tout cas sur Internet, ce qui fait une élection c’est la taille des bases de données. Sur les 10-11 ans de recul qu’on a sur les campagnes sur Internet, ceux qui sont capables de faire des bases de données, de les exploiter et d’impliquer leurs militants, ont en général un gros avantage.

Alors, qu’est-ce qu’une campagne Internet réussie pour un homme politique ?

C’est une campagne qui permet de s’engager à différents niveaux. Il faut que ça aille du « je veux juste être un petit soldat des réseaux sociaux et partager les informations sur Facebook et Twitter » à « je veux vraiment militer activement pour la campagne ».

Il faut aussi que le candidat s’implique. J’ai regardé le compte Twitter tout neuf de Martine Aubry… on a l’impression qu’elle s’est dit « tiens, je vais faire comme Barack Obama, je vais signer mes twits » !

Une campagne réussie c’est aussi une campagne qui permet de constituer une base de données très forte afin de mobiliser tous les gens contactés pour qu’ils s’engagent, notamment à la fin de la campagne.

J'ai un exemple amusant : Martine Aubry a fait son discours de candidature mardi à 11h30. Je suis allé voir son site en milieu d’après-midi : ils ont fait un copié-collé du texte distribué aux journalistes avec la mention en début de texte la mention « seul le prononcé fait foi ». La première phrase que vous voyez en arrivant sur le site était « seul le prononcé fait foi » ! A ce niveau là, franchement, on est dans l’amateurisme… [NDLR : cette mention figure désormais uniquement en conclusion du texte]. Voilà, ça c’est un bon exemple d’une campagne Internet dont le début n’est pas réussi.

En 2002, vous vous étiez occupé de la campagne web de Jacques Chirac. Qu’est-ce qui a principalement changé depuis ?

Tout a changé ! Les réseaux sociaux n’existaient pas. Les téléphones mobiles n’étaient pas aussi répandus. Ca c’est un point essentiel : en 2012, ça changera totalement l’écho d’un meeting. Lors de la dernière élection présidentielle de 2007, Facebook et Twitter existaient à peine en France. En 2012, il y aura des centaines de milliers de personnes qui posteront des milliers de photos de meetings, les militants auront une capacité de production de contenus démultipliés. Les candidats devront donc faire attention.

Ils devront, selon moi, favoriser la vie des gens qui veulent partager des contenus. Il faudra impliquer les gens qui sont dans des réunions publiques pour donner de l’écho en direct à l’événement. Avant l’événement était programmé en fonction des journaux télévisés, en fonction des journalistes. Désormais, si vous impliquez bien les personnes présentes dans la salle, l’événement peut résonner en direct sur les réseaux sociaux.

Facebook et Twitter pourraient vraiment faire basculer l’élection présidentielle de 2012 ?

Facebook a une telle pénétration dans la société française aujourd’hui que celui qui aura la page Facebook la plus forte aura un avantage technique.

Iriez-vous jusqu’à affirmer que le candidat qui aura le plus de fans Facebook sera celui qui sera élu président de la République ?

(rires) Je suis trop Normand pour répondre oui ou non à cette question. Rationnellement, on peut sans doute dire "oui" car cela signifiera que ce sera celui qui aura le plus mobilisé… Alors, oui, allons jusqu’à dire qu’il est probable que celui qui ait le plus de fans Facebook soit celui qui est élu ! Rendez-vous dans neuf mois !

Cela donne en tout cas un avantage à Nicolas Sarkozy : sa page Facebook a été créé il y a déjà deux ou trois ans, elle compte près de 442 000 fans. Par conséquent, dès qu’il publie quelque chose, l’information se retrouve publiée sur plusieurs milliers d’autres comptes Facebook. Il bénéficiera déjà de cela.

Et Ségolène Royal et ses « Désirs d’avenir » ?

Le problème de Ségolène Royal c’est qu’elle a tellement découragé les gens qui étaient dans son équipe en 2007… Ses Désirs d’avenir ne sont plus ce qu’ils étaient ! Les dernières versions du site n’étaient pas du niveau de ce que Benoît Thieulin faisait en 2007 à ses côtés…

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