"Salina : les trois exils" : un pari très audacieux, à moitié gagné<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Culture
"Salina : les trois exils" : un pari très audacieux, à moitié gagné
©Solimoov

Culture-Tops

Avec "Salina", Laurent Gaudé a choisi un thème très ambitieux, qu'il réussit à dominer parfaitement. Dommage que son style soit parfois artificiel et trop travaillé.

Isabelle De Larocque Latour pour Culture-Tops

Isabelle De Larocque Latour pour Culture-Tops

Isabelle De Laroque Latour est chroniqueuse pour Culture-Tops.

Culture-Tops est un site de chroniques couvrant l'ensemble de l'activité culturelle (théâtre, One Man Shows, opéras, ballets, spectacles divers, cinéma, expos, livres, etc.).  Culture-Tops a été créé en novembre 2013 par Jacques Paugam , journaliste et écrivain, et son fils, Gabriel Lecarpentier-Paugam, 23 ans, en Master d'école de commerce, et grand amateur de One Man Shows.

Voir la bio »

LIVRE

SALINA. Les trois exils

de Laurent Gaudé

Ed. Actes Sud

16.80 €

LU/VU PAR  Isabelle de Larocque Latour

RECOMMANDATION

           BON

THÈME

En des temps mythiques, aux confins du désert,  le clan Djimba voit arriver un cavalier inconnu qui dépose sur le sable un bébé hurlant qu’on appellera Salina, l’enfant aux larmes de sel. Avec l’adoption de la fillette, c’est la fatalité qui s’invite au sein de la tribu.

Salina, devenue femme,  aura trois fils, Mumuyé, le « fils bâtard » né de son union légitime avec un homme qu’elle hait, Koura Kumba,  le « fils colère » engendré en neuf jours pour incarner le bras armé de sa vengeance,  et Malaka, le « fils donné » qui lui offrira le repos et créera la légende.

POINTS FORTS

  • Roman épique et poétique, « Salina » est la reprise, 15 ans après, d’une pièce d’inspiration antique du même Laurent Gaudé, écrite en 2003 et montée pour la première fois en 2006. Le fait est assez rare pour être noté, nos dramaturges contemporains ayant plutôt tendance à adapter pour la scène des textes antérieurs créés par d’autres.
  • On y retrouve les grands thèmes qui  s’entrelacent dans cette première œuvre: le mariage forcé, la vengeance, le culte dû aux morts, tous abordés sous l’angle de la haine et de la violence, mais sans l’expression élégiaque un peu forcée de la pièce, parfois desservie par une interprétation surjouée. Salina n’en demeure pas moins une anti-Antigone barbare qui mutile le corps de celui qui l’a exilée pour l’empêcher de trouver  le repos éternel.
  • La dimension mythique est présente tout au long du récit : Le combat des deux frères ennemis, si long et si ardent qu’il aplatit la montagne,  la veuve hallucinée qui cherche sans trêve les vertèbres dispersées du corps de son mari,  le passeur qui, tel Charon, fait traverser aux morts un Styx vaste comme la mer…
  • La quête de Malaka, le troisième fils à peine évoqué dans la première version de «Salina», apporte au roman une douceur exempte de la pièce  alors qu’il obtient, par son verbe,  l’ouverture des portes du cimetière fabuleux où sa mère retrouvera le repos et l’honneur…

 POINTS FAIBLES

Le style de Gaudé qui se veut proche du poème homérique semble  parfois artificiel, trop travaillé et sujet à quelques faiblesses ; on est loin de la maîtrise d’un Jean-Philippe Jaworski (Janua Vera, Gagner la guerre...) pourtant cantonné au sous-genre de la fantasy.

EN DEUX MOTS

La « Salina » de 2003 est étudiée  en  classe de seconde et de première. Après tout, pourquoi pas ? Les dramaturges français ne sont pas légion depuis la disparition des Anouilh, Giraudoux, Montherlant, et chaque époque a les auteurs qu’elle mérite...

UN EXTRAIT

p. 143,  Salina accepte le nouveau-né que lui tend Salika :

« Je n’ai que cela à t’offrir en échange, Alika : cela qui n’est rien face à l’enfant que tu me donnes. Mais ainsi les sangs du passé seront enterrés. Pour toi, la dernière vertèbre de Sissoko. Que tout s’apaise (…) Je prends la vie que tu m’offres (…) Je voulais mourir mais tout a changé. Le désert sera mon royaume. Je lui apprendrai tout ce que je sais. Il aura les étoiles pour parrain et les hyènes pour escorte »
L’AUTEUR

Romancier, nouvelliste, dramaturge, Laurent Gaudé,  né à Paris en 1972,  est un auteur reconnu, distingué par de nombreux prix : Prix Goncourt des lycéens et prix des libraires pour « La mort du roi Tsongor », (2003) prix Goncourt, prix Jean Giono et prix du roman populiste pour « Le soleil des Scorta » (2004). S’il touche à différents domaines relevant de l’actualité, du social et même du conte pour enfants, il privilégie dans un texte littéraire « la concentration de sentiments, d’énergies, de dits, qui ne soit pas réaliste, qui donne une dimension épique ».

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !