"Chavirer" de Lola Lafon : victimes, coupables, tyrannie du silence, résilience, une danseuse en souffrance. Surfer encore sur la vague metoo?<!-- --> | Atlantico.fr
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Lola Lafon Chavirer
Lola Lafon Chavirer
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Lola Lafon a publié "Chavirer" aux éditions Actes Sud.

Claire Français

Claire Français

Claire Français est chroniqueuse pour Culture-Tops. ​Culture-Tops est un site de chroniques couvrant l'ensemble de l'activité culturelle (théâtre, One Man Shows, opéras, ballets, spectacles divers, cinéma, expos, livres, etc.).  Culture-Tops a été créé en novembre 2013 par Jacques Paugam , journaliste et écrivain, et son fils, Gabriel Lecarpentier-Paugam

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"Chavirer" de Lola Lafon 

Actes Sud - 352 pages - 20,50 euros

RECOMMANDATION
Bon

THEME
Voulant devenir danseuse et s'extirper de son milieu, une adolescente rencontre sur le chemin de ses rêves une organisation prédatrice. De l'humiliation à la culpabilité, Cléo masquera les failles de son identité en souffrance derrière les douleurs de son corps et le sourire qui sied au dur milieu des Variétés. Jusqu'à faire sienne la phrase "Pardonner était une décision, celle de renoncer à faire payer à l'autre. Ou à soi-même."

POINTS FORTS
La structure du récit dont les ruptures de rythme nous intriguent et nous tiennent en haleine.

Sans jugements autres que ceux des protagonistes sur eux-mêmes ou entre eux, l'auteure décortique  le fonctionnement de la sujétion et de ses conséquences avec recul et empathie.

Une galerie de personnages qui nous révèlent Cléo sous différentes facettes tout en nous faisons pénétrer dans d'autres mondes: judaïsme, militantisme, coulisses du show-biz.

POINTS FAIBLES
Dommage que le parallèle entre l'acceptation du corps malmené par l'exigence de la danse et la soumission de ce même corps victime d'abus sexuels ne soit pas plus développé.

Surfer encore sur la vague metoo?

EN DEUX MOTS
Cela a toujours existé: abus de confiance et abus sexuel; manipulateurs et manipulés. L'intérêt ici est de comprendre l'origine d'une acceptation qui salit le corps et l'esprit. Lola Lafon décrypte le cheminement de la honte et la possibilité de résilience en décrivant des personnages dans toute leur humanité.

UN EXTRAIT
"Cléo était criblée de fragments d'images, elle s'épuisait à les convoquer: l'appartement sentait l'humidité.  Une rue à Paris, dans le 16e arrondissement. Les types, ces jurés, n'étaient pas plus de quatre ou cinq, autant que de gamines. Lesquelles ne s'adressaient pas la parole lors de ces déjeuners, entre elles rien ne se nouait. Zéro échange. Chacune pour soi. Que la meilleure gagne. Que gagnaient-elles? Deux ou trois billets. Il y avait des chambres le long du couloir...

...Cléo avait affirmé ne pas avoir de souvenirs d'enfance: elle en possédait tout un tiroir maintenant grand ouvert à Lara, rempli de mots hachés, de mots salis, d'angoisses nocturnes et de honte.  Après cette fois-là, elle avait commencé à avoir mal au ventre toutes les nuits. Elle n'avait rien à vomir. Tout était vide de sens, de mots, elle n'avait pas dit non, elle avait consenti mais à quoi.

Quel âge avais-tu? redemandait Lara, le mercure en folie dans la gorge.  Cléo secouait la tête, c'était sans importance."

L'AUTEUR
Lola Lafon, née en 1974, passe son enfance et sa jeunesse entre Bucarest, Paris, New York. Premières publications au début des années 2000; en 2014 elle est  récompensée par plusieurs prix littéraires pour La petite communiste qui ne souriait jamais. Très jeune, Lola Lafon s'est tournée vers la danse; également musicienne avec deux albums à son actif, ses convictions féministe et libertaire nourrissent ses ouvrages. Chavirer est son sixième roman.

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