Ces péchés d'omission de François Hollande, ou pourquoi l'économie française va si mal <!-- --> | Atlantico.fr
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Les économistes sont à court de termes pour décrire à quel point l'économie française va mal.
Les économistes sont à court de termes pour décrire à quel point l'économie française va mal.
©Reuters

Le Nettoyeur

La justification idéologique de mesures économiques appliquées à la France émane des institutions de l'Union européenne. François Hollande aurait pu, comme il l'avait promis pendant sa campagne, s'opposer à cette idéologie. Il ne l'a pas fait. Et pendant ce temps, les mêmes causes produisent toujours les mêmes effets.

Pascal-Emmanuel Gobry

Pascal-Emmanuel Gobry

Pascal-Emmanuel Gobry est journaliste pour Atlantico.

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Les économistes sont à court de termes pour décrire à quel point l'économie française va mal.”C'était le titre malheureusement juste du site américain d'information économique Business Insider lorsque sont sortis les derniers chiffres de la production industrielle.

“Nous sommes à court d'adjectifs négatifs pour décrire les données économiques en France ; les chiffres principaux de la production industrielle sont vraiment effroyables, était la citation de Claus Vistesen, économiste chez Pantheon Macroeconomics.

Mais je ne vous apprends rien.

Et cette situation n'est pas la faute de François Hollande, ou moins pas directement. Ses péchés sont des péchés d'omission : ce qu'il aurait dû faire, plutôt que ce qu'il a fait. On pourra rétorquer que pour un chef d'Etat comme pour tout dirigeant les péchés d'omission sont des péchés d'action, et on n'aurait pas tort.

Le problème est simple et reste le même depuis le début de la crise de l'euro, comme je ne cesse de le répéter : c'est celui de la quantité de monnaie.

Le même rapport qui signalait le déclin de la production industrielle en France alertait aussi des tendances déflationnistes, avec un taux d'inflation de 0.5%, plus faible que les 0,7% prévus, ce qui est déjà trop faible.

A chaque instant T, il y a une quantité totale de monnaie disponible dans toute économie. Si, par rapport à la capacité totale de production de l'économie, la quantité de monnaie est trop importante, il y aura une augmentation généralisée des prix (puisqu'une quantité trop importante de monnaie sert à acheter une quantité trop faible de biens et services) ; si la quantité de monnaie n'est pas assez importante, il y aura une stagnation économique généralisée (puisque les consommateurs et entreprises n'ont pas assez d'argent pour acheter tous les biens et services que l'économie produit). Comme on le voit par les chiffres de l'inflation (quasi nulle) et ceux du chômage (hors normes), nous sommes dans le second cas de figure.

Ce qu'on appelle les réformes dites de structure, comme leur nom est censé l'indiquer, sont des réformes dont l'objectif est d'augmenter la capacité totale de production de l'économie. In abstracto, et indépendamment des mérites de telle ou telle réforme en particulier, c'est certainement une bonne idée de vouloir augmenter la capacité de production. Mais si la quantité totale de monnaie dans l'économie est trop faible, quelque soit la capacité de production, la sous-activité et le sous-emploi resteront présents.

Or, quel est la situation de la France par rapport à la création de monnaie ?

Il y a, en gros, trois manières de créer de la monnaie : la politique de la banque centrale, la politique budgétaire de l'Etat, et le crédit bancaire.

Le crédit bancaire est en retrait, puisque les banques agissent rationnellement en anticipant les capacités futures de l'économie. Autrement dit, si l'économie va être mauvaise, les gens risqueront de moins rembourser, et donc les banques prêteront moins (et donc créeront moins de monnaie). Oui, il s'agit d'une prophétie auto-réalisatrice et d'un cercle vicieux. En France, se rajoute le problème de la cartélisation du secteur bancaire, où l'absence de concurrence jugule le crédit.

Pour casser ce cercle vicieux où la récession se prolonge elle-même du fait de la frilosité rationnelle des banques, la théorie économique propose deux outils : la politique monétaire et la politique fiscale.

En augmentant ses déficits (c'est-à-dire en augmentant sa dépense et/ou en baissant les impôts), l'Etat augmente la dépense totale de l'économie, c'est-à-dire la quantité totale de monnaie en circulation dans l'économie. C'est la politique budgétaire.

L'autre instrument, c'est la politique monétaire. La banque centrale peut soit baisser ses taux directeurs, ce qui pousse en théorie les banques à prêter plus d'argent, soit verser directement de l'argent aux citoyens.

Or, les faits têtus sont les suivants. La politique budgétaire du gouvernement est une politique d'austérité ; indépendemment de diverses annonces, l'objectif budgétaire du gouvernement reste entièrement à la baisse, ou au moins le maintien, des déficits. Et la politique monétaire de la BCE reste infiniment plus préoccuppée par l'inflation que par les chiffres économiques et donc opposée à une vraie création monétaire.

Et dans les deux cas, la justification idéologique de ces mesures émane des institutions de l'Union européenne. C'est pour cela que je dis que les péchés de François Hollande sont des péchés d'omission : il aurait pu, comme il l'avait promis pendant sa campagne, s'opposer à cette idéologie (qui, soit dit en passant, est objectivement réactionnaire). Il ne l'a pas fait.

Et pendant ce temps, les mêmes causes produisent les mêmes effets.

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