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Frontex : l'arme secrète de l'Europe pour traquer les migrants, Frédéric Mitterrand : petites confidences sans filtre et très crues, affaire de la grotte Chauvet : l'Etat, coupable ou innocent ?
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Revue de presse des mensuels

Les hebdos sont en vacances cette semaine... Du coup, on a jeté un œil, voire deux, aux mensuels chic et glossy de janvier... Et ? Et derrière les écrans mode et pub - épais, les écrans... - y'a quand même du y'a bon !

Barbara Lambert

Barbara Lambert

Barbara Lambert a goûté à l'édition et enseigné la littérature anglaise et américaine avant de devenir journaliste à "Livres Hebdo". Elle est aujourd'hui responsable des rubriques société/idées d'Atlantico.fr.

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Les hebdos s’étant mis en vacances la semaine dernière, on s’est dit qu’on allait du coup en profiter ce jeudi pour fureter du côté des mensuels de janvier, histoire de prendre un peu d’avance sur 2014 et, qui sait ?, de changer d’air… Comme c’est fête, on s’est laissé tenter par des revues sur papier glacé chic — “ Vanity Fair ”, “ Vogue ”, “ L’Officiel ”, “ Citizen K ”, “ GQ ”, etc. — dont le contenu nous a, en vérité, pas mal laissé sur notre faim… Dans le lot, on a quand même trouvé quelques petites choses à picorer, parfois même à savourer très, très lentement pour ne pas risquer l’indigestion…

Sharon Stone : la vieille qui voulait pas mourir

Mais commençons par opérer un petit tri… Au rayon des mags à éviter absolument, “ L’Officiel ” — 2 “ articles ” (l’un, cent fois lu, sur les “ années Palace ”, l’autre sur les “ spots exotiques pour passer en beauté en 2014 ”) pour 230 pages de pubs — se pose un peu là… Dans “ Vogue ”, dont les Beckham ornent lascivement la couv, l’interview et le pêle-mêle photos de Victoria sont, certes, sympathiques, mais guère nourrissants. Que dire de “ Citizen K ” ? Pour son 20e anniversaire, le journal propose une rétrospective de ses plus beaux reportages photo, toujours léchés, souvent trash (mais pas trop), où domine une certaine fascination pour le morbide… assez caricaturale, au final. Mais, pour fêter dignement l’événement, “ Citizen K ” s’est aussi offert une splendide couverture où Sharon Stone, allongée sur un lit de fleurs, des roses rouges à la place du sexe, ressemble à s’y méprendre, pour peu qu’on n’y prenne garde, à… Miley Cyrus. Miley Cyrus, oui… C’est pas qu’on soit bégueule — à 55 ans, Sharon est à tomber, et on ne vous parle pas des photos en pages intérieures, où elle pose en robe échancrée et combi-short, la jambe longue, longue, longue, le regard acier, revolver, irrésistible… Juste, on trouve bizarre qu’une femme aussi incroyablement belle ait besoin de jouer la jeune fille, qu’elle ait envie de paraître ce qu’elle n’est pas ou plus… Comme dirait ma mère : “ La vieille, elle veut pas mourir ”. Et cela, même si, de nos jours, on n’est pas vieille à 55 ans, encore moins quand on s’appelle Sharon Stone… Mais il ne suffit pas de le dire, il faut encore le ressentir, n’est-ce pas, Sharon ?

“ Technikart ” chez SOS Amitié

Plus piquant, plus malin, aussi, quoique parfois irritant (comme sa liste bobo-branchouille des “ 100 qui ont fait 2013 ”), “ Technikart ” propose un dossier assez marrant sur “ La France cra-cra ” et “ la tendance ultime de l’hiver 2013-2014 du “ pas 100 % net ” ”. Parce que, sur les catwalks comme dans la rue, la mode est de plus en plus, et assez étonnamment, au “ moche ”. A l’heure où “ la chasse aux putes est ouverte ”, le mag prend position en publiant simultanément une interview de Morgane Merteuil, secrétaire générale du STRASS (“ syndicat des travailleurs sexuels ”) et un “ petit guide de la prostitution responsable avant l’application de la loi ” sur la pénalisation des clients. De la provoc facile, pensez-vous… On acquiescerait volontiers si les médias et les politiques avaient équitablement pris en compte la parole des personnes les plus concernées par le sujet... Signe qu’il n’est pas qu’un simple agitateur dépourvu de tout sens moral, “ Technikart ” consacre une longue et très belle enquête à SOS Amitié. “ Rendu célèbre par “ Le Père Noël est une ordure ”, SOS Amitié se résume aujourd’hui aux délires de Thérèse, Zézette et Félix. Pourtant, précise le journal, 1500 bénévoles s’activent pour éviter que des anonymes au bout du roul’ ne se tirent le feu d’artifice de fin d’année dans la tempe ”. Hé oui ! A l’heure qu’il est, faudrait peut-être pas l’oublier…

Clémentine et Yvan Autain : petits désaccords entre papa et fi-fille

Dans “ Marie-Claire ”, Béatrix de l’Aulnoit et Catherine Durand ont eu l’idée — au demeurant pas nouvelle, nouvelle — d’interviewer des femmes politiques avec leur père. Quatre responsables, de gauche comme de droite, ont accepté de jouer le jeu : Clémentine Autain, Marisol Touraine, Valérie Pécresse et Anne Hidalgo. “ Quel est (le) pire défaut (de votre père) ? ”, demandent les journalistes à Clémentine Autain. —“ Se lever à 11 heures. Il n’aime pas l’effort, il a manqué d’ambition ”. Sympa… “ Avez-vous les mêmes convictions politiques ? ” —“ Sur les idéaux, sur les grandes lignes de convictions, nous sommes d’accord, répond-elle. Pas sur la stratégie politique : lui, c’est un libertaire ! ” —“ Elle fait de la politique, qui est l’art du possible, ajoute Yvan Autain, auteur-compositeur-interprète. L’artiste est témoin du monde, c’est celui qui dit non… ” —“ Votre désaccord le plus fort ? ” —“ Pour lui, dit Clémentine, la politique, c’est du spectacle, je ne suis pas d’accord ”. —“ Cela reste un désaccord politique ”, conclut Yvan. Et vlan !

Marisol et Alain Touraine : tel père, telle fille

Plus complices, Marisol et son père, le sociologue Alain Touraine ? Ces deux-là se ressemblent comme deux gouttes d’eau, dirait-on… A la question “ Quel est son pire défaut ? ”, la ministre répond : “ Il est trop exigeant. Une attente très forte ! ” —“ Elle est trop sérieuse, fait Alain en écho. Elle devrait rire plus souvent ”. “ Votre désaccord le plus fort ? ” enchaîne “ Marie-Claire ”. —“ Il travaille tout le temps, dit Marisol. Quand il prend trois jours de vacances, à 88 ans, il s’excuse encore ”. —“ Elle en fait trop, répond le sociologue. Quand je veux lui parler, je l’appelle le soir au ministère. Il est 22 heures, elle y est encore ”. —“ Sa phrase fétiche ? ” —Elle : “ Je pense que… ” —Lui : “ Je n’en connais pas. Elle parle peu ”. Ouille, c’est un peu dur, ça… La filiation n’en demeure pas moins là… “ S’il avait dû changer quelque chose dans votre éducation, demande pour finir le mag, ce serait quoi ? ” —“ Rien, conclut Marisol Touraine, si je n’avais pas eu ce père-là, je n’aurais pas été moi ”. Ah, bé, qu’est-ce qu’on vous disait, hein ?

Frédéric Mitterrand : “ Tapie est un vrai barbare, mais il a des connivences avec les politiques. Il est leur caricature ”

Frédéric Mitterrand par Frédéric Taddeï… difficile de rater l’interview de “ GQ ”. Dans votre livre, “ La récréation ” (Robert Laffont), remarque le journaliste, “ Bernard Kouchner vous dit : “ Au fond, ils te détestent parce que tu n’es pas de leur monde ”. —“ Tu travailles, tu fais tout bien, selon les règles, répond Mitterrand, mais ils sentent que tu n’es pas dans le truc ”. —“ Il y a toujours eu des intrus en politique, objecte Taddéi. Bernard Tapie, par exemple. Dommage qu’il n’ait pas écrit un livre ”. —“ Lui, c’est un vrai barbare, mais il a des connivences avec eux, répond l’ancien ministre. Finalement, il est leur caricature ”. —“ Mais il ne veut pas leur ressembler. Alors que vous, une fois ministre, vous voulez leur ressembler ”. —“ Mais Bernard Tapie applique les règles. Il va voir les uns et les autres. Il leur rend plein de services. Il a arrangé plein de trucs. Au fond, c’est une sorte de domestique. Une sorte de cuisinière. Une cuisinière qui boit ”. —“ Une cuisinière qui se verrait bien racheter le château… ” —“ Qui gratte, qui boit, qui fout le bordel, mais qui fait partie de la maison. Tandis que moi, je suis un invité, c’est différent. Je suis un invité poli qui se tient bien à table ”. Et balance aussi, à l’occasion… Et c’est pas fini !

“ Il y a une collusion entre l’administration et les syndicats pour que rien ne change ”

“ Les pires ennemis que rencontre le ministre de la Culture, quand on vous lit, ce sont les syndicats ”, relève Frédéric Taddeï. —“ (…) Oui, on sentait la haine, la haine de classe, répond Frédéric Mitterrand. Du coup, on met un temps fou à construire un rapport avec eux. Au début, c’est comme dans “ Potiche ”. Quand Deneuve les appelle “ mes amis… ” Mais au fond, il y a une collusion entre l’administration et les syndicats pour que rien ne change. Ils se disputent pour des queues de cerise. Pendant des heures. Là où j’avais une inquiétude c’est qu’ils disaient : “ Vous êtes là pour démanteler le ministère ”. Or, personne n’avait envie de démanteler le ministère. Et Sarkozy moins que personne ”. 

Ce que pense Frédéric Mitterrand du patron de “ Valeurs actuelles ”

“ C’est encore plus frappant avec la presse, poursuit l’ancien ministre. Je me souviens d’un dîner au Bourget dans cet entrepôt sinistre avec ces patrons qui recevaient des subventions très importantes. C’est légitime, soit. Mais après avoir reçu le rapport Cardoso qui cherchait à établir si les subventions se traduisaient par des réformes, j’ai fait un discours dans un silence absolument glacial. Les syndicats et les patrons de presse étaient complètement liés. Quand on pense que le patron de “ Valeurs actuelles ” est un type absolument charmant, à la courtoisie vieille France, alors que son journal est en train de s’aligner sur le Front national. Il était là à la même table que des syndicalistes vraiment staliniens ”. Hou, ça dépote, hein !

Ce que l’ex ministre de la Culture pense des “ artistes connus ”

“ Bon, mais les artistes connus ? ”, reprend Taddeï. —“ Ils détestent le pouvoir et ils en réclament sans cesse ”, répond Mitterrand. —“ Les honneurs et l’argent ! rebondit le journaliste. Patti Smith, dans mon émission “ Ce soir ou jamais ”, avait dit qu’elle trouverait inadmissible, en tant qu’artiste, de toucher de l’argent de l’Etat. Pour les Américains, c’est incompréhensible ! ” —“ Alors là, c’est complètement différent. C’est la tradition de Louis XIV copain avec Racine, protégeant Molière, sourit en coin l’ex ministre de la Culture. C’est enraciné dans la conscience française. Et en même temps, comme ils sont humiliés de devoir le faire, ils détestent le pouvoir ”. Et re-re-re-schplaf ! Mais antantion, nous voilà arrivés au meilleur morceau — au plus croquignolet, en tout cas — de l’interview… Préparez-vous, c’est du lourd !

“ Mon meilleur copain m’a dit : “ Tu as fait un bouquin tellement homo ” ”

“ Dans votre livre, on vous sent obsédé par la beauté des gens. C’est stupéfiant ”, remarque Taddeï. “ Pas obsédé, rectifie Mitterrand. Mon meilleur copain, Jean-Marc, m’a dit : “ Tu as fait un bouquin tellement homo ”. Mais non, je ne crois pas. —“ Un hétéro n’aurait pas osé, rebondit le journaliste. A cause du syndrome DSK ”. —“ Je ne suis pas du tout obsédé par la beauté des gens. Je veux dire, la séduction fait partie des choses de la vie bien sûr. On regarde les gens, on pense. Peut-être que les hétéros ne se rendent pas suffisamment compte qu’ils sont attentifs à la beauté des femmes en général parce que pour eux c’est naturel. Le fait que ce soit porté plutôt sur les garçons, quoi que je parle aussi de la beauté des femmes, dans un monde où ça reste totalement tabou, du coup ça dérange. Ou ça surprend. Ca entraîne la réaction que vous avez ”

Quand Frédéric Mitterrand regarde Laurent Wauquiez en conseil des ministres "avec un air langoureux"…

—“ Ce qui m’amuse, réagit Taddeï, c’est que vous, vous l’avouez ”. —“ La chose était aiguisée par le fait que je m’abstenais de toute vie personnelle, confie étrangement l'ex-ministre. Forcément, j’étais encore un peu plus attentif ! Mais enfin, si j’avais choisi d’en faire un roman, tout ça serait passé au premier plan. Le sexe, le pouvoir et l’argent ”. —“ Vous ne vous contentez pas d’y penser, vous le dites ! insiste le journaliste. Vous n’hésitez pas à faire des compliments pleins de sous-entendus. J’ai l’impression que vous provoquez sans arrêt. Laurent Wauquiez, par exemple… ” —“ Non, mais attendez, réagit Mitterrand, pourquoi est-ce que Wauquiez m’envoie, en plein conseil des ministres : “ Pourquoi tu me regardes comme ça, avec cet air langoureux ? ” Ca veut dire que lui aussi joue là-dessus ”. —“ Peut-être parce qu’il a compris que vous étiez une cible ou une proie, conclut Taddeï. Qu’il écrive à “ GQ ” pour nous donner sa version, tiens… ” En voilà une bonne idée… on a hâte de te lire, Laurent…

“ Frontex : la machine qui traque les migrants ”

Mais revenons à des sujets plus sérieux. A côté d’une enquête sur “ Le business des croisières intellos ”, qui mérite franchement le coup d’œil, “ GQ ” se penche sur “ Frontex, la machine qui traque les migrants ”. “ Frontex ”, ma, mais qu’est-ce que c’est que ça ? "Le nom est quasi inconnu du grand public, explique le journal. Il désigne pourtant l'agence de surveillance des frontières européennes déjà forte d'une flotte de 116 navires, 27 hélicoptères et 21 avions. Sa mission : endiguer l'immigration clandestine aux portes de l'Europe. Bien que la surveillance des frontières relève de la souveraineté nationale, la communauté européenne s'en préoccupe depuis des années. Récemment, la surveillance a même changé de visage et celmui-ci est devenu résolument high-tech". Ah oui ?

Des drones, un robot, des détecteurs de chaleur...

"Des zeppelins reliés à des satellites pour surveiller la mer, des drones qui patrouillent dans le ciel, un robot nommé Talos qui surveille la frontière entre la Pologne et la Russie, un nouveau genre de caméra infrarouge, Wescam MX15, des détecteurs de chaleur... Ces technologies dernier cri permettent de surveiller les frontières, résume "GQ". Et depuis le 22 octobre dernier, les chefs de la diplomatie européenne ont entériné la création d'Eurosur (European External Border Suveillance System), un nouveau système de surveillance aérienne qui vient renforcer les patrouilles maritimes et terrestres de Frontex. Ce monde rarement évoqué par les médias dessine une nouvelle géostratégie, qui voit l'Europe surveiller ses points d'entrée des migrants et tenter de couper les filières d'immigration clandestine depuis le poste de commandement de Frontex situé à Varsovie en Pologne. Parmi les zones suivies de près : les îles italiennes comme Lampedusa, la côte méditerranéeenne française, l'île de Malte évidemment, mais aussi la ville grecque de Filakio, la région d'Evros en Grèce à proximité de la frontière avec la Turquie, les enclaves espagnoles de Ceuta et Melilla au Maroc et la frontière entre la Slovaquie et l'Ukraine, le long de laquelle sont déjà massés 850 policiers et 500 caméras de surveillance". Impressionnant, non ? Ah, on en apprend, des choses...

Des "frontières intelligentes" pour repousser et accueillir

"Selon (la commissaire aux affaires intérieures, Cécilia Malmström), indique le magazine, l'ensemble de ces moyens techniques et humains doit permettre  à terme des "frontières intelligentes". Ainsi, la surveillance par satellite des côtes méditerranéennes se fait d'abord côté marocain pour tenter de prévenir les traversées et d'éviter que d'éventuels drames humains ne surviennent côté espagnol. Par intelligent, il faut également comprendre que l'Union européenne veut d'une part repousser avec plus de précision ceux qui ne sont pas les bienvenus, mais aussi accueillir plus facilement à ses frontières les voyageurs de pays tiers (notamment venus de Chine et de Russie) qui injectent annuellement quelque 300 milliards d'euros dans son économie. Au plus tôt en 2017, un système entrée/sortie (EES) et un programme pour voyageurs enregistrés (RTP) devrainet fournir aux arrivants une carte et un numéro d'identification leur permettant d'entrer ou de sortir d'Europe "en quelques secondes". Selon la Commission, cinq millions de personnes dont un grand nombre d'hommes d'affaires, d'étudiants et de chercheurs seraient concernées".

Frontex assure avoir sauvé 16 000 vies ces deux dernières années

"D'après une étude de juin 2012 réalisée par deux chercheurs, Ben Hayes et Mathias Vermeulen, pour la Heinrich Böll Stiftung, un institut allemand proche du parti des Verts, la mise en place du système des frontières "intelligentes" coûtera à terme près de 2 milliards d'euros, poursuit "GQ". (...) En un an, l'agence Frontex a, quant à elle, déjà vu son nombre d'arrestations augmenter d'un tiers. Selon l'Office des migrations internationales, 20 000 migrants sont morts en mer au cours des vingt dernières années. Frontex assure, de son côté, avoir sauvé 16 000 vies au cours des seules deux dernières années. le ministre des Affaires étrangères Laurent Fabius a tranché, il a officiellement estimé les moyens de Frontex "insuffisants". Néanmoins, après avoir rencontré pendant deux ans les équipes de l'agence européenne, Julian Röder estime pense que le problème est ailleurs : "Tout le système a été créé pour détecter des êtres humains, pas pour les protéger"". Ca fait réfléchir, hmmm ?

Affaire de la grotte Chauvet : l'Etat coupable ou innocent ?

Un peu d'Histoire, pour finir ? De Préhistoire, plutôt. A côté d'un reportage sur les héritiers Renault et d'une enquête sur "L'autre cabinet de Fabius", la maison de ventes aux enchères Piasa, "Vanity Fair" nous propose une petite virée en Ardèche, du côté de la grotte Chauvet, "la grotte ornée la plus ancienne de la planète". Depuis sa découverte le 18 décembre 1994, l'apprenti archéologue Jean-Marie Chauvet et ses deux acolytes Eliette Brunel et Christian Hillaire "ont le sentiment d'avoir été oubliés, voire écartés de l'hsitoire, nous raconte le journal. A les écouter, d'autres, l'Etat en tête, empocheraient des millions d'euros en exploitant la découverte sans leur reverser grand-chose. Au début de l'année 2015, une réplique de la grotte Chauvet, appelée "espace de restitution", devrait être ouverte au public. la vraie caverne restera fermée à cause des taux élevés de gaz carbonique et de radon (...). On attend 400 000 touristes par an. Sachant cela, Eliette et ses amis trouveraient légitime de toucher "quelque chose". Combien ? Ils éludent, changent de sujet. Eliette préfère évoquer sa retraite de viticultrice, qu'elle détaille au centime près : "759, 80 euros par mois, complémentaire comprise". (...) Christian, agent de maintenance dans l'industrie nucléaire, l'écoute en opinant : "On n'a pas mérité ça"".

L'affaire des photos

La malchance a frappé vite, un mois à peine après que Jean Clottes, spécialiste mondial de l'art paléolithique, confirme l'importance de la découverte du trio. "Le 22 janvier 1995, explique "VF", ils signent avec les Coulange (propriétaires du terrain) un contrat d'exclusivité mondiale en faveur de l'agence de presse Sygma pour diffuser les photos prises à l'intérieur de la caverne. (...) Une concurrence imprévue va leur causer du tort : plusieurs magazines ("Paris-Match" en France, "Bild" en Allemagne, "Time" aux Etats-Unis) publient des clichés inconnus. Renseignement pris, Jean Clottes a fait 53 photos au cours de ses visites. Le ministère de la culture en a donné quatre à la presse, les autres sont mises en vente par Sygma. (...) Le 22 mars 1995, (Eliette et ses amis) assignent le ministère et Sygma devant le tribunal de grande instance de Paris. Le jugement est rendu en trois mois. Les services de l'Etat et l'agence sont condamnés à retirer de leurs catalogues les photos de Jean Clottes. L'expert désigné par la justice estime qu'elles auraient rapporté quelque 1, 2 million de francs (183 000 euros). Les inventeurs n'ont pourtant droit à aucune réparation. Pour une raison simple : à ce moment précis, personne n'est en mesure de dire à qui appartient vraiment la grotte"". Pourquoi ? En voilà une bonne question...

Pourquoi les découvreurs ne sont pas copropriétaires de la grotte

"A priori, indique le mag, le trio avait découvert ce trésor par hasard un dimanche après-midi. Il devrait donc en être copropriétaire avec ceux qui détiennent le terrain. Seulement voilà : très vite, le ministère a fait remarquer que Jean-Marie Chauvet occupait un poste d'agent au sein de l'une de ses antennes, la direction régionale des affaires culturelles. Son contrat précisait notamment qu'il devait "garder les grottes ornées de l'Ardèche" et "en constituer une photothèque". Ses supérieurs n'ont pas tardé à exhumer une "autorisation temporaire de prospection". Le document, signé par le directeur régional des affaires culturelles de Rhöne-Alpes, était daté du 14 décembre 1994, c'est-à-dire quatre jours avant le dimanche de la découverte. L'agent Chauvet aurait donc découvert ce trésor dans l'exercice de ses fonctions. (...) Quand ils découvrent ces arguments, les trois acolytes bondissent. En novembre 1996, ils portent plainte pour "faux en écriture publique" en soutenant que l'autorisation de prospection a été rédigée après la découverte de la grotte, puis antidatée. Ils assurent par ailleurs que la signature de Jean-Marie Chauvet avait été usurpée sur une note de remboursement de frais". Et ça a fini comment, ce nouveau procès ? Comme le premier ?

Le ministère convaincu de faux

"Le parquet de Lyon ouvre une information judiciaire, plusieurs fonctionnaires sont mis en examen, relate "Vanity Fair". A Paris, Maryvonne de Saint-Pulgent, proche conseillère de Jacques Toubon, est accusée de "complicité de faux et usage de faux". Elle sera relaxée après quatre ans d'enquête. En 2000, le tribunal de Lyon prononce la victoire des inventeurs : non seulement le faux est avéré mais l'origine privée de la grotte est confirmée. L'Etat est même contraint de passer un accord avec le trio, afin de l'associer "de manière convenable" à la valorisation de la réplique de la caverne. A les écouter, treize ans plus tard, on en serait loin". Sur ce point, le journal, qui a mené sa propre enquête, a un avis divergent...

Révélations sur l'accord passé entre les découvreurs et l'Etat

"En réalité, révèle le mag, Eliette et ses amis ont déjà tiré quelques profits de la grotte. Ils perçoivent 5 % sur chaque ticket d'entrée au musée de Vallon-Pont-d'Arc, une modeste exposition montée dans une ancienne supérette. Dès le mois d'avril 1995, ils ont aussi publié un livre intitulé "La grotte Chauvet" aux éditions du Seuil : 45 000 exemplaires vendus, un joli succès. L'ouvrage est épuisé. La maison n'a cependant pas souhaité le rééditer : elle propose désormais "La grotte Chauvet, l'art des origines", lui aussi consacré à la grotte. Son auteur n'est autre que Jean Clottes". Mais le plus intéressant est à venir, "Vanity Fair" ayant réussi à se procurer le protocole d'accord conclu avec l'Etat. "Surprise, s'exclame-t-il : ce document de 5 pages, daté du 15 février 2000, révèle (...) que 3 millions de francs (460 000 euros) ont été versés aux inventeurs de la grotte. Ce montant regroupe les "frais exposés" (711 719 francs), les "objets mobiliers contenus dans la grotte" (150 000 francs) et les "indemnités au titre des préjudices subis" (2 138 281 francs)". Ah, ça change un peu le sens de l'histoire, ça... Ce n'est pas fini.

Et si les découvreurs n'étaient pas ceux que l'on croit...

D'après "un ancien facteur, établi en Lozère, spéléologue amateur" du nom de Daniel André, "certains ont été oubliés sur les bords de la grotte" (...). A l'en croire, poursuit en effet le journal, il serait entré dans la caverne le week-end suivant sa découverte. Il était accompagné de Michel Chabaud et Jean-Louis Payan. Ils étaient invités par le trio. "On était tous amis". Maintenant, ils se disent "codécouvreurs". Ils aimeraient disposer d'un droit de visite et d'une petite place dans l'histoire. Récemment, ils ont remis leurs témoignages à un huissier. Avec deux autres personnes : Michel Rosa et Sylviane Lucot, qui auraient des révélations à nous faire. Cela faisait dix-neuf ans qu'ils se taisaient. A présent, ils ont envie de parler. Michel Rosa est un homme modeste, placide, discret que tout le monde surnomme "Baba". Lui aussi est spéléo. Il assène : "C'est moi qui avais ouvert le trou avec ma femme en 1994. Jean-Marie, Christian et Eliette n'ont fait que terminer le travail". A l'écouter, il avait remarqué que ce trou soufflait et il en avait fait part à ses amis. "Ils auraient pu nous prévenir, c'est tout. On s'est fait éjecter". Pourquoi ne s'est-il pas manifesté à l'époque ? "J'avais des soucis, je n'en voulais pas d'autres. Et je n'allais pas me lancer dans une guerre avec des amis". Sylvane, sa femme, raconte la même expédition. "Chacun va prétendre détenir sa vérité, mais moi je sais ce que j'ai vu. D'ailleurs, plein de spéléos de la région avaient fini par rebaptiser la grotte "le trou de Baba"". Elle ne demande pas grand-chose : un droit d'entrée lui suffirait. "Catherine Deneuve a pu descendre. Elle est quoi, elle ?"". C'est vrai, ça... Ah la la, quelle histoire ! Pas dit qu'on en voie un jour le bout, hmmm ? Bon week-end, bonne semaine, les lapins, à l'an prochain !

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