Dégradation de la note du Brésil sur sa dette : pourquoi ce n'est pas le bon moment pour investir dans les pays émergents <!-- --> | Atlantico.fr
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La Présidente du Brésil Dilma Rousseff est extrêmement impopulaire avec un taux d'approbation de la population de 8% seulement.
La Présidente du Brésil Dilma Rousseff est extrêmement impopulaire avec un taux d'approbation de la population de 8% seulement.
©Reuters

Atlantico Bourse

La remise en cause par les agences de notation de la qualité de la signature de la 7ème économie mondiale est en elle-même suffisamment inquiétante pour dissuader d’investir sur les émergents en général. Une certaine prudence tactique doit être de mise sur les quelques semaines à venir.

Alain Pitous

Alain Pitous

Alain Pitous, Directeur Général Adjoint Associé de Talence Gestion (@alainpitous).

Talence Gestion est une société de gestion de portefeuille indépendante spécialisée dans la gestion sous mandat pour les particuliers et la gestion de fonds commun de placement en actions.

Précédemment, il a été pendant 5 ans (2009-2014) Deputy CIO d’Amundi (850 Milliards d’Euro sous gestion) et gérant du fonds Amundi Patrimoine de 2012 à juillet 2014.

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Comme nous l'indiquons depuis plusieurs semaines, la situation dans les pays émergents devient de plus en plus compliquée : après la Russie qui a beaucoup souffert du pétrole et des sanctions pays occidentaux, après la Turquie qui souffre d'une baisse de sa devise et des tensions au Moyen-Orient, après la Chine qui a inquiété l'ensemble de la communauté financière, le Brésil est depuis cette semaine sous les feux de l’actualité.

La nouvelle de la semaine est provenue de l’agence de notation Standard & Poors qui a dégradé la note du Brésil sur sa dette avec des perspectives négatives. Le Brésil n'avait pas besoin de cette mauvaise nouvelle supplémentaire !

En effet, depuis plusieurs mois, toutes les données économiques fondamentales se dégradent :

La croissance : le Brésil est en route pour sa pire récession depuis 25 ans. Le Produit Intérieur Brut (PIB)  a encore reculé au deuxième trimestre 2015. Sur un an le PIB affiche une baisse de 2.6%. La moindre demande internationale explique une partie de ce mauvais score, les mesures monétaires et fiscales restrictives mises en place par le gouvernement expliquent le reste. L’économie Brésilienne souffre également de lacunes plus structurelles qui pèsent constamment sur sa croissance : la faiblesse des infrastructures, le coût du travail et la faiblesse de la devise brésilienne reviennent en boucle chez les analystes et investisseurs pour expliquer leur défiance dans le potentiel de croissance structurelle du Brésil.

L'inflation est également un problème au Brésil : elle a atteint un niveau incroyable de 9,6 % sur un  an glissant en août. Au Brésil, l'inflation est structurellement élevée ; en effet les salaires sont indexés, beaucoup de loi locales imposent des augmentations de prix systématiques et régulières, et de plus, les infrastructures étant faibles et souvent engorgées, les prix augmentent mécaniquement… Mais surtout depuis quelques mois, la forte dépréciation du real a provoqué une hausse des prix des produits importés.

Les finances publiques traversent une période de grandes difficultés. Les objectifs budgétaires et fiscaux affichés par le gouvernement apparaissent de plus en plus difficiles voire impossibles à atteindre du fait de la stagnation l'économie brésilienne : en période de récession et de forte inflation, le déficit augmente régulièrement. Il atteint désormais 8.8% du PIB et aucune amélioration ne peut être envisagée à court-terme…

Sur le plan des comptes extérieurs la situation se dégrade aussi. Le déficit commercial s’aggrave. La baisse du réal n’a pas contribué à améliorer la situation. En effet, les concurrents du Brésil ont aussi vu leur devise baisser et du fait du manque de compétitivité de l’économie Brésilienne, aucun gain de part de marché n’est envisageable ; mais surtout, la baisse de la demande chinoise pèse depuis plusieurs mois sur le niveau des exportations brésiliennes.

Pour finir de ternir l’image du Brésil, la situation politique et sociale s'est fortement dégradée. La  Présidente Rousseff est extrêmement impopulaire avec un taux d'approbation de 8% seulement; sa situation devient particulièrement difficile au congrès avec, de plus, de nombreux problèmes de corruption qui sont venus perturber la crédibilité de toutes les institutions.

Avant l'été nous avions envisagé d’initier des positions sur les marchés émergents. En effet, nous pensions que les matières premières allaient arrêter de baisser et permettre un début d’amélioration économique.  Les nouvelles provenant de Chine nous ont incité à surseoir à ces investissements.

Depuis le mois d’août, la situation qui c'est fortement dégradée et le Brésil est une bonne illustration de cette nouvelle phase d’incertitude. La remise en cause par les agences de notation de la qualité de la signature de la 7ème économie mondiale est en elle-même suffisamment inquiétante pour dissuader d’investir sur les émergents en général. 

Les plus pessimistes envisagent même désormais les effets potentiels du fort ralentissement subi au Brésil sur les valeurs européennes. En effet, certaines entreprises européennes sont bien implantées sur les pays émergents et pourraient souffrir si l’économie ralentissait dans ces pays. Par exemple : Fiat, BIC, Casino, Carrefour, Vallourec, Technip, CGG, Santander ou Telefonica tirent entre 10 et 20% de leur chiffres d’affaires du Brésil. Difficile d’imaginer qu’elles ne souffriraient pas d’un ralentissement encore plus marqué au Brésil.

Comme nous l’évoquions la semaine dernière, une certaine prudence tactique doit être de mise sur les quelques semaines à venir en attendant d’y voir plus clair sur la politique monétaire américaine et ses conséquences sur l’économie mondiale.

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