Polémique
Légion d'honneur : le "coup d'éclat" de Thomas Piketty divise la classe politique, l'économiste répond
Certains y voient un acte politique fort ou républicain, tandis que d'autres regrettent la forme et la manière de faire. Thomas Piketty a réagi ce vendredi soir dans Le Monde.
Le coup d'éclat de Thomas Piketty crée des remous. L'économiste star, auteur du "Capital au XXe siècle", a refusé la légion d'honneur, déclarant à l'AFP que ce n'est pas "le rôle d'un gouvernement de décider qui est honorable". Sa décision a suscité de nombreuses réactions parmi la classe politique.
Un refus "triste et dommage" pour Thierry Mandon. Le secrétaire d'Etat à la réforme de l'Etat et à la simplification regrette le" manque d'humilité" de Piketty, même s'il trouve les thèses de ce dernier "très intéressantes", quoique à prendre" avec des pincettes". "Il y a deux motifs de refus généralement", a estimé Thierry Mandon sur RMC et BFM-TV. "Par humilité, parce qu'on considère que d'autres l'ont plus mérité, ou par raison politique. Thomas Piketty, je ne pense pas que ce soit la première raison".
En colère, Laure de la Raudière voit dans la décision de l'économiste de "l'arrogance et du mauvais goût". La député UMP de l'Eure-et-Loir fustige un "coup de pub".
Le comble du mauvais goût, doublé d'arrogance, un 1er janvier : se faire de la pub... en refusant la Légion d'Honneur. #piketti 1/2
— Laure de La Raudière (@lauredlr) 1 Janvier 2015
Au micro de France Info, le porte-parole du gouvernement Stéphane Le Foll a tenté d'éteindre la polémique en déclarant que c'était le choix de l'économiste. "Il essaye de donner des conseils et ca fait partie du débat" a-t-il déclaré.
Invitée de France Inter, Axelle Lemaire a quant à elle regretté la manière. "Une légion d'honneur", a estimé la secrétaire d'Etat au Numérique, "c'est une récompense pour un mérite qui est reconnu par la nation, pas pour une adhésion à une politique économique d'un gouvernement".
Geneviève Fioraso s'est montré plus mesurée, prenant acte de la décision et soulignant la qualité de ses recherches. "Il a la liberté, il a choisi de refuser, nous prenons acte. L'excellence de son travail demeure", a-t-elle estimé.
Mais si une large partie l'exécutif regrette cet acte, d'autres saluent une décision forte.
Christian Paul félicite un "acte politique", et donne raison à l'économiste. Pour le député frondeur, le "meilleur hommage que l'on pourrait rendre à Piketty, c'est s'inspirer de ses travaux pour en faire une réforme".
Le meilleur hommage à rendre aux travaux de #Piketty: s'en inspirer pour une réforme enfin...structurelle, celle de la fiscalité française.
— Christian Paul (@christianpaul58) 1 Janvier 2015
Quant à Florian Philippot, il voit dans le geste de l'économiste star un acte "profondément républicain", arguant que la légion d'honneur a été "dévoyée par les pouvoirs".
La légion d'honneur a été tellement dévoyée par les pouvoirs que le refus de Piketty apparaît comme très sain et authentiquement républicain
— Florian Philippot (@f_philippot) 1 Janvier 2015
Ce vendredi soir, Thomas Piketty a réagi en se confiant au Monde. "C’est un peu dommage qu’ils ne m’aient pas contacté avant, ça aurait évité tout ce pataquès. "Ils ont l’air de ne pas être contents que je réagisse le 1er janvier. En même temps, c’est eux qui publient mon nom dans le Journal officiel sans m’en dire un mot avant. Le plus simple aurait été un mail, un SMS, un coup de fil… Je leur aurais tout de suite dit que je n’en voulais pas. Et, franchement, ça n’a rien à voir avec l’opinion que je peux avoir de ce gouvernement" se défend l'économiste.
"J’ai toujours trouvé que cette histoire de Légion d’honneur était complètement dépassée. Cette façon de décider qui est le petit groupe de citoyens honorables, dont les mérites éclatants doivent être reconnus, c’est une conception du rôle de l’Etat, du gouvernement, qui me semble totalement surannée" ajoute-t-il depuis Boston. "J’assume totalement ce que je pense de ce gouvernement, dont l’action ces deux dernières années a été catastrophique, et je n’ai pas besoin d’une Légion d’honneur pour le dire ou pour l’écrire" finit-il.
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