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Voir ses collègues de bureau pendant les vacances (comme Emmanuel Macron et Theresa May), bonne ou mauvaise idée ?
©BORIS HORVAT / AFP

Vive les congés... avec nos collaborateurs !

Faut-il comme Emmanuel Macron et Theresa May voir ses collègues pendant les vacances en misant sur la détente pour espérer des solutions qu’on n’a pas trouvée au bureau ?

Stéphane Clerget

Stéphane Clerget

Stéphane Clerget est médecin pédopsychiatre. Il partage son activité entre les consultations et la recherche clinique. Ses champs d’étude concernent notamment l’adolescence, les troubles émotionnels et les questions d’identité. Il a mis en place à l’hôpital l’une des premières consultations d’aide à la parentalité. Il est l'auteur de Nos garçons en danger (Flammarion) et Les vampires psychiques (Fayard).

Les vampires psychiques de Stéphane Clerget

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Atlantico : Faut-il comme Emmanuel Macron et Theresa May voir ses collègues pendant les vacances en misant sur la détente pour espérer des solutions qu’on n’a pas trouvée au bureau ?

Stéphane Clerget : Recevoir ses collègues en vacances c’est bien entendu les accueillir en étant plus décontracté et les trouver eux même plus relaxés. Même si ce délassement mutuel n’est pas de la même nature que celui qui unit deux amis en vacances -car chacun conserve un self professionnel- il rend possible un mode de communication différent et donc une dynamique d’échange d’un autre type. Ces nouveaux aspects d’interactivité donnent des angles neufs qui peuvent être éclairant pour des solutions nouvelles. C’est aussi la disponibilité d’esprit qui se modifie. L’attention n’est pas parasitée comme dans le cadre professionnel par d’autres actualités professionnelles concomitantes aux échanges ou des anticipations sur d’autres projets à venir. Le cadre vacancier offre un sas de décompression à distance des autres préoccupations de travail et paradoxalement permet d’être parfois plus focus sur le sujet de l’échange qu’on ne le serait au bureau. Le lieu de vacances est un espace où l’on invite une partie de soi privé. C’est donc proposer une nouvelle identité à l’autre qui de fait se positionnera autrement en réponse et aura un message, sinon différent sur le fond, probablement divergent sur la forme. Or une autre configuration peut rendre plus compréhensible ou plus acceptable un contenu informationnel. 

En quoi les lieux de travail peut-être un frein à la résolution des problèmes rencontré en entreprise ?

L’environnement, le cadre influe sur l’identité. Au travail c’est l’être professionnel qui s’exprime, pour le meilleur parfois pour ceux qui donnent le meilleur d’eux au travail au dépend d’une vie privée inféconde, mais aussi pour le pire quand l’individu restreint son intelligence émotionnelle ou sa personnalité imaginant ses traits particuliers non conformes à son idéal professionnel. 
Les lieux de travail peuvent apparaître comme un facteur d’inhibition du fait d’un environnement perçu comme délétère pour l’estime de soi, la confiance en soi, la sérénité bref pour des stimulants affectifs propices à une meilleur cognition et à une meilleurs communication entre partenaires professionnels. Bien sur les lieux de travail évoluent et le bien être des salariés est pris en compte. Pour autant l’open space se généralise. Certes il libère la communication au sein de l’entreprise  (chacun n’est plus enfermé dans son bureau) favorisant l’efficacité du travail d’équipe du fait du contact direct. Cependant c’est un facteur de stress (présence des supérieurs, bruits, distraction, perte du sentiment d’intimité) et il réduit la possibilité de tisser des liens avec un collègue en face de soi. Or ce partenariat en tandem peut être au travail un facteur d’engagement et d’émulation notamment pour ceux qui ont un sentiment de dilution dans le groupe. 

N'aurait-on pas intérêt à développer comme dans d'autres pays (comme le Japon) plus d'activités entre collègues à l'extérieur des bureaux ? 

Développer, comme dans d’autres pays, plus d’activités entre collègues à l’extérieur des bureaux c’est délocaliser le travail. Encore faut il que ce ne soit pas le prétexte à une augmentation du temps de travail déguisé (au Japon le gouvernement a du limiter récemment à 100 heures mensuelles les heures supplémentaires tant les japonais travaillent toujours plus) qui sera un facteur de fatigue et de moindre performance. Modifier le cadre sera l’occasion à chacun de pouvoir exprimer de nouvelles compétences qui, si elles n’étaient pas perçues par l’individu comme des outils pour une meilleure performance professionnelle (et donc sont mises de coté au bureau) s’avèreront finalement opportunes pour créer des liens d’autres sortes avec des collègues voire raisonner autrement. Pour beaucoup, inhibés par un cadre professionnel vécu comme rigide et clivé de leur véritable nature, cela participera de l’humanisation du travail et de l’implication dans l’entreprise en rejoignant leur implication dans l’existence privée. Pour autant certains voudront garder leur armure d’homme ou de femme professionnel (au prix d’une dépense d’énergie psychique importante) et ne se laisseront pas aller sur d’autres niveaux de relation et de communication. Enfin et hélas certains perdront le cadre protecteur du milieu professionnel et se laisseront envahir par des problématiques personnelles qui nuiront à leur image et à leur disposition professionnelle.

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