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Violences du 1er mai : comment les Black Blocks nous font basculer dans une nouvelle ère
©Thomas SAMSON / AFP

Basculement

La manifestation parisienne du 1er mai a basculé dans la violence, avec plus d'un millier de "Black Blocs" qui ont saccagé plusieurs magasins parisiens.

Sylvain Boulouque

Sylvain Boulouque

Sylvain Boulouque est historien, spécialiste du communisme, de l'anarchisme, du syndicalisme et de l'extrême gauche. Il est l'auteur de Mensonges en gilet jaune : Quand les réseaux sociaux et les bobards d'État font l'histoire (Serge Safran éditeur) ou bien encore de La gauche radicale : liens, lieux et luttes (2012-2017), à la Fondapol (Fondation pour l'innovation politique). 

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Atlantico : Lors de la traditionnelle manifestation du 1er mai, un groupe d’environ un millier de membres des « Black Blocs », cagoulés, ont saccagé plusieurs boutiques dans le centre de Paris. Franchit-on insensiblement des paliers dans la mobilisation des activistes violents ? Pouvait-on s’attendre à de tels dérapages ?

Sylvain Boulouque : Les deux phénomènes sont en train de coaguler. On observe une augmentation évidente du nombre de Black Blocs qui est liée aux refus successifs signifiés aux différents acteurs des précédentes actions sociales lors des négociations avec le gouvernement. Ce genre de situation a tendance à revitaliser en partie le passage de certains acteurs des mouvements sociaux qui choisissent de rejoindre les Black Blocks. 

C’est en même temps un phénomène historique, qui avait disparu mais était réapparu  au tournant des années 2000 un peu partout en Europe dans les pays industriels développés lors de grands rassemblements à Gênes, Barcelone ou Seattle il y a quelques années. Ce phénomène avait depuis à nouveau un peu disparu, et était réapparu avec la loi travail de façon un peu plus importante. Mais aujourd’hui, ce mouvement explose parce qu’il a été rejoint par un contingent important de jeunes. Cependant, si on regarde l’histoire sur le plus long terme, c’est un phénomène qui, sous d’autres noms, existe depuis le XIXe siècle. Les affrontements avec la police étaient alors très violents lors de certaines manifestations, et conduisaient souvent à des morts. Et ce tant chez les manifestants, le plus souvent, que chez les forces de l’ordre.

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Les débordements avaient été anticipés par la préfecture. Etaient-ils impossibles à contrôler du fait du nombre ou y a-t-il d’autres raisons ?

Je ne suis pas spécialiste de la police, donc j’aurai plus de mal à vous répondre sur ce point. Il me semble cependant que la police a principalement essayé de contenir au maximum les débordements sans aller à l’affrontement, parce qu’environ 1000 personnes déterminées à aller à la bagarre, et même avec des forces de l’ordre expérimentées, cela peut finir de manière tragique. On peut estimer que les consignes étaient de ne surtout pas tomber dans ce piège. Mieux vaut de nombreux dégâts matériels que des victimes ou des blessés.

Faut-il s’inquiéter qu’un tel mouvement, sur la base de tels faits d’armes, trouve un terrain de développement et d’amplification de son action dans les potentiels mouvements sociaux qui devraient survenir prochainement ?

On peut imaginer deux situations. Il est possible d’une certaine façon qu’il s’agisse d’un cas sporadique qui ne trouve pas de terrain pour se reproduire. Mais s’il venait à se passer quelque chose dans une université, par exemple à Tolbiac, on peut imaginer d’autres actions, et un renforcement voire une revitalisation de cette tendance. 

Ce qui est certain, c’est que ces groupes recherchent d’autres manifestations pour reproduire ces violences. Il pourrait y avoir un effet d’enchainement.

Par ailleurs, comment expliquer l’aveuglement de Jean-Luc Mélenchon face à ce genre d’actions des « autonomes » des Black Blocs ?

C’est un vieil argument stalinien à mon avis. Cela fait écho à ce que Georges Marchais disait - toutes proportions gardées - à propos de « Dany » Cohn Bendit lors de mai 68 en parlant de « l’anarchiste allemand » et des « provocateurs ». Dès qu’on n’est pas dans la ligne du parti, on est forcément dans le camp ennemi - et donc il s’agit de l’extrême-droite.

Cela ne veut pas dire qu’il n’y ait pas un ou deux manifestants d’extrême-droite qui se soient mêlés aux autres, même si cela m’étonnerait, mais dans la grande majorité, on a bien affaire à de militants proches de la gauche radicale.

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