Dieu vous le rendra
Vaut-il mieux taxer les riches ou les encourager à donner ?
Alors que l'heure est à la réduction des niches fiscales, le mécénat à la française devrait envisager de revoir son modèle fondé sur une intervention massive et anonyme des particuliers. Car en réalité, on motive moins un riche avec une caresse fiscale qu'avec la proclamation de l'excellence de son geste.
François Tripet
François Tripet est avocat fiscaliste.
Avocat au Barreau de Paris depuis 1978, il est essentiellement un " patrimonialiste international " qui, avec son équipe, apporte son concours et son assistance à plus d'un millier de familles réparties sur les cinq continents.
François Tripet est l'auteur de l'ouvrage de réference "Droit Fiscal Francais et Trusts patrimoniaux Anglo-saxons " ( LITEC, 1989 )
Le mécénat ou la bienfaisance présentent la particularité d'appeler des dépenses souhaitables, rarement des dépenses nécessaires. En période de crise, le réflexe est de sauvegarder ce qui parait nécessaire et de réduire ce qui semble souhaitable. C'est pourquoi la place du mécénat ou de la bienfaisance pose des questions qui reviennent actuellement sur le devant de la scène.
- Un donateur privé ne donne qu'à des fins soigneusement sélectionnées. Sa première préoccupation est de s'assurer du rapport existant entre les dépenses de fonctionnement de l'institution bénéficiaire et ses ressources totales. Moins les fonds récoltés iront directement à l'activité désintéressée, plus l'institution sera fragilisée. Aux Etats Unis, le taux de mortalité des "Charities" est élevé. Les donateurs sont impitoyables à l'encontre des institutions pavées autant de bonnes intentions que de bénévoles défrayés. Tout au contraire, dans une économie administrée ou semi-administrée du mécénat et de la bienfaisance, les fonctionnaires n'auront de cesse que de "saupoudrer" leurs mannes financières, gage du caractère irréductible de leur pouvoir. Il suffit d'analyser le bilan d'activité de la Fondation de France ou de la Direction des Affaires Culturelles de la Ville de Paris pour s'en convaincre.
- Dans un environnement "compétitif", une institution bénéficiaire soigne ses mécènes ou ses soutiens pour se les attacher ( les "raising funds diners" sont une activité sociale considérable aux Etats-Unis : les banquets commencent dans la décontraction, se poursuivent dans la congratulation et se terminent avec la main au portefeuille). Dans un pays comme la France, une institution évitera rarement le réflexe clientéliste à l'égard du fonctionnaire qui a le pouvoir de lui assurer le renouvellement d'une partie de ses sources de financement. Si ce fonctionnaire est muté à un autre poste, il est très fréquent que l'institution en cause s'en trouve gravement fragilisée, indépendamment de son excellence .
- Enfin et surtout, le donateur accroîtra son don à proportion de sa personnalisation tandis que dans l'approche française, le fonctionnaire n'aura de cesse que de favoriser le nivellement des donateurs en sorte que leur nombre et leur anonymat forme sa force. Du reste, la défiscalisation encadrée de l'effort de mécénat ou de bienfaisance est souvent présentée, en France, comme l'unique attraction acquise . Rares sont ceux qui font l'effort de se donner les moyens convaincants d'en appeler au coeur ou à l'intelligence du donateur pour le motiver : il suffit de lui rappeler que l'activité poursuivie est "évidemment évidente" et qu'il lui en coûtera moins que ce qu'il donne, par la grâce de la magie fiscale ! On reste frappé par la pauvreté argumentaire de communication des "Charities" françaises par rapport à celles de leurs consœurs américaines .
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