Ursula von der Leyen veut renforcer l’intégration budgétaire européenne. Une bonne idée… à contretemps ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Ursula von der Leyen entend instaurer une intégration budgétaire européenne renforcée. Le contexte politique, à l'évidence, ne s'y prête guère. - Photo Frédérick Florin pour AFP
Ursula von der Leyen entend instaurer une intégration budgétaire européenne renforcée. Le contexte politique, à l'évidence, ne s'y prête guère. - Photo Frédérick Florin pour AFP
©Ursula von der Leyen. FREDERICK FLORIN / AFP

Mauvais timing

Ursula von der Leyen entend instaurer une intégration budgétaire européenne renforcée. Le contexte politique, à l'évidence, ne s'y prête guère.

Nathalie Janson

Nathalie Janson

Nathalie Janson est professeur associé d'économie au sein du département Finance à NEOMA Business School. Elle a obtenu son Doctorat en Economie à l'Université Paris I-La Sorbonne en collaboration avec le programme ESSEC PhD.

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Atlantico : Ursula von der Leyen s’est exprimée en faveur d’un renforcement de l’intégration budgétaire européenne. Plus que cela, elle souhaite même l’instaurer. Que faut-il en penser ?

Nathalie Janson : Suggérer le renforcement de l’intégration budgétaire en pleine campagne des élections Européennes est pour le moins osé compte tenu du succès des partis souverainistes dans les pays de la zone Euro. En effet, dans une zone monétaire optimale, l’idée d’avoir une politique budgétaire totalement indépendante n’est pas soutenable. La théorie des zones monétaires optimales élaborée par Robert Mundell explique que partager une monnaie commune est d‘autant plus bénéfique que les cycles économiques des pays qui la composent sont synchrones. Intuitivement, on comprend que lorsqu’on partage une même monnaie il est difficile d’adopter une politique bugétaire qui n’est pas cohérente avec une politique monétaire unique. L’épisode Tsipras en Grèce en 2015 en est une belle illustration même si c’était un cas extrême. Pour relativiser, cette absence de souveraineté absolue sur la politique budgétaire n’est pas seulement l’apanage des pays partageant une monnaie commune. L’économiste Dani Rodrik a théorisé le « trilemme de la mondialisation » qui décrit l’impossibilité d’atteindre les trois objectifs suivants : démocratie, souveraineté nationale et intégration économique internationale. En somme, un pays intégré dans la mondialisation ne peut décider de politique budgétaire indépendamment de ces capacités de financement ce qui confère un avantage unique aux USA compte tenu du statut de leur monnaie.

Qu’est-ce que ce potentiel changement pourrait avoir comme répercussions ? notamment sur le budget de l’Union européenne ?

Ce n’est pas tant la question de la survie budgétaire de l’Union européenne qui se pose – les fonds structurels pourraient demeurer – que la création d’un ministère du budget Européen et d’en choisir quelqu’un à sa tête qui sera sans doute un casse-tête.  Un budget Européen requiert une certaine unanimité sur l’objectif de ses objectifs. On connaît les divergences de vues entre les pays du Nord contre ceux du Sud, un telle harmonie des points de vue semble pour le moment un mirage. La zone Euro est, de ce point de vue, comme une co-propriété qui requiert un consentement aux règles pour fonctionner sans heurt. On y ajouterait le consentement à l’impôt pour le financer ! On imagine les contestations !

Avoir une "combinaison de réforme et d’investissement. . . conduit à la croissance", a-t-elle déclaré. Avant de poursuivre : "Et vous le voyez maintenant dans le développement économique réussi que vous avez en Italie, en Grèce et au Portugal." Peut-on légitimement estimer qu’Ursula von der Leyen est dans le vrai à ce sujet ?

Ursula von der Leyen fait sans doute référence à l’impact positif du programme Next Generation UE, instrument temporaire pour stimuler la reprise. Elle profite des résultats économiques encourageants de ces pays pour montrer quels seraient les bénéfices pour l’ensemble de la zone si l’instrument devenait permanent. C’est sans compter l’aspect institutionnel de la création d’un budget Européen à part entière qui appelle la création d’un ministre du budget Européen. Comment serait-il désigné ?

Pensez-vous que dans le contexte actuel une telle réforme est réalisable ?

Ce projet d’union budgétaire semble aller à l’encontre des aspirations des populations de la Zone Euro compte tenu du succès des partis souverainistes. C’est toute l'ambiguïté de la Zone Euro. Malgré l’intégration par la monnaie, on constate que les différences quant au rôle de l’Etat dans l’économie perdurent. La règle d’or qui préside à la gestion du budget en Allemagne contraste avec la gestion budgétaire incontrôlée de pays comme la France. Pour arriver à une telle intégration budgétaire, on comprend bien qu’un compromis devra être trouvé au préalable entre les pays membres. Mais quel compromis face à de telles divergences ?

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