Ukraine. Le général de fer incassable <!-- --> | Atlantico.fr
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Valerii Fedorovych Zaluzhnyi est lieutenant-général, commandant en chef des forces armées d'Ukraine et membre du Conseil national de sécurité et de défense d'Ukraine.
Valerii Fedorovych Zaluzhnyi est lieutenant-général, commandant en chef des forces armées d'Ukraine et membre du Conseil national de sécurité et de défense d'Ukraine.
©DR

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Le président ukrainien Volodymyr Zelensky peut compter sur un second précieux en la personne du « général de fer incassable ». C’est lui son Commandant en chef des Armées qui dirige avec des succès indéniables les opérations militaires depuis le début de l’invasion russe.

Alain Rodier

Alain Rodier

Alain Rodier, ancien officier supérieur au sein des services de renseignement français, est directeur adjoint du Centre français de recherche sur le renseignement (CF2R). Il est particulièrement chargé de suivre le terrorisme d’origine islamique et la criminalité organisée.

Son dernier livre : Face à face Téhéran - Riyad. Vers la guerre ?, Histoire et collections, 2018.

 

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Âgé d’à peine 48 ans, Valerii Fedorovych Zaluzhnyi est né le 8 juillet 1973 dans une famille de militaires. Son père était alors en garnison à Novohrad-Volynsky dans la région de Zhytomyr située à proximité de la Biélorussie.

Après de brillantes études, il a intégré l’Institut des forces terrestres de la Faculté militaire d’Odessa. À l’issue, il a suivi un cursus classique d’officier d’infanterie : chef de section d’instruction puis de combat, commandant de compagnie en unité opérationnelle puis en école, chef de bataillon. En 2005, il est admis à l’Université de la Défense Nationale Ivan Cherniakhovskyi à Kiev dont il sort breveté deux ans plus tard. De 2009 à 2012, il commande la 51è brigade mécanisée de la Garde avant de revenir à l’Université militaire de Kiev pour une formation supérieure d’où il sort en 2014 quelques mois après la révolution de Maïdan et alors que la guerre a débuté dans le Donbass. Il prend alors le commandement d’une brigade en août 2014 à Debaltseve où vont se dérouler les plus durs combats de la guerre en janvier 2015. Les forces gouvernementales subissent de lourdes pertes. Ce serait pour les limiter que le Président Petro Porochenko a été contraint de signer en février 2015 les accords de Minsk II dans des termes jugés très défavorables pour Kiev.

Zaluzhnyi enchaîne ensuite des postes de responsabilité au sein d’états-majors avant de retourner de nouveau sur les bancs de l’Université militaire de Kiev pour obtenir une Maîtrise en relations internationales.

Le 27 juillet 2021, le Président Zelensky démet Ruslan Khomchak de son poste de général en chef des forces armées qu’il occupait depuis le 21 mai 2019 car ce dernier ne parvient pas à assurer une synergie correcte avec le Ministère de la défense. Le même jour, il le remplace par Zaluzhnyi alors chef du commandement opérationnel du Nord.

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Ce dernier prend soin d’éviter la notoriété comme cela a été le cas pour de grands chefs militaires. Il préfère laisser ce rôle au président qui, de par sa formation, est plus apte à mener une politique de communications à la fois intérieure et extérieure. Mais cela ne veut pas dire qu’il manque de caractère tout en ayant une capacité à bien s’entendre avec son entourage. Il est d’ailleurs apprécié au sein des forces qui reconnaissent son côté « humain ».

Il s’explique sur son rôle en les termes suivants: «  maintenant, comme Commandant en chef des forces armées, je suis responsable pour la préparation au combat, l’entraînement et la mise en œuvre des forces armées » (interview en septembre 2021 sur Radio Svoboda).

Durant sa carrière, il n’avait pas caché qu’il souhaitait que les crédits militaires soient augmentés et que l’effort militaire devait mieux être soutenu par la société civile. Mais quand la guerre éclate le 24 février 2022, sa demande principale faite au pouvoir politique est simple : laissez les soldats faire leur travail - et surtout ne pas émettre des doutes sur la manière dont les opérations sont menées -.

Enfin, il affirme aujourd’hui que l’Ukraine a arrêté la seconde armée la plus puissante au monde « bloquant l’adversaire dans toutes les directions […] nous lui avons causé des pertes qu’il n’avait jamais connu ou aurait pu imaginer […] tous les Ukrainiens le savent. Le monde le sait ».

Il fait partie de cette nouvelle génération d’officiers qui a rompu avec l’ex-Armée Rouge en bénéficiant de l’aide de l’OTAN. Cela a été complété par leur expérience au feu au Donbass à partir de 2014.

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Rompant avec la sclérose des tactiques russes héritées des conflits passés, ces officiers ont réussi à mettre sur pied des méthodes militaires qui allient la souplesse et l’initiative accordée aux unités sur le terrain. Pour y parvenir, des pays de l’OTAN comme les USA, la Grande-Bretagne, le Canada, la Pologne, la Lituanie et d’autres, ont ouvert des centres d’entraînement dans l’ouest de l’Ukraine. Ces formations ajoutées à l’expérience du champ de bataille contre les Russes et leurs alliés séparatistes au Donbass, ont apporté de nouvelles capacités tactiques qui tournaient le dos aux vieilles méthodes de l’Union Soviétique.

Les officiers ukrainiens étaient persuadés que l’armée russe attaquerait un jour et qu’ils ne jouaient pas dans le film « le désert des Tartares » comme l’ont fait leurs prédécesseurs de l’OTAN de 1945 à 1990. Cela a permis au général Zaluzhnyi de déclarer en janvier 2022 devant le Comité militaire de l’Alliance « nous sommes prêts ».

Alors que le monde entier - en dehors des services de renseignement anglo-saxons - ne croyait pas à l’hypothèse d’une offensive générale sur l’Ukraine, le pire est arrivé le 24 février avec les tirs de missiles dans la profondeur et le déboulé de blindés sur Kiev et toutes les frontières est et sud du pays. L’armée ukrainienne a parfaitement su manœuvrer pour emporter de haute lutte la première phase. Le président Vladimir Poutine furieux aurait limogé de nombreux responsables dont nombre d’officiers de renseignement. Sur le plan tactique, un commandement unique pour l’Ukraine a été créé et les objectifs revus considérablement. L’offensive depuis le Donbass vers l’ouest se précise. Personne n’est capable aujourd’hui de définir quel sera le sort des armes entre les forces commandées par le général Zaluzhnyi et celles du général russe Alexandre Dvornikov de 13 ans son aîné.

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